Pour France Inter, être de gauche, c’est la norme. Journalistes, producteurs, sans oublier les humoristes de la bande à Charline ronronnent l’entre-soi et le mépris de quiconque ne pense pas comme eux. Leur contentement hautain, souvent injurieux, ne poserait aucun problème sur une radio privée. Mais c’est nous qui finançons ce bastion du progressisme. Et ça, c’est vexant.
C’est pas pour me vanter [1], mais à Causeur, on a le bras long. En novembre 2016, dans un numéro sobrement intitulé « France Inter aux Français », nous nous agacions (manière polie de dire qu’on s’étranglait de rage) du fait que notre radio publique, qui a de surcroît bercé la jeunesse de pas mal d’entre nous, manquait avec obstination et ostentation à son devoir de pluralisme, qu’elle était devenue le quartier général du gauchisme culturel, dispensant ses leçons de maintien à une France tellement moisie qu’elle dégage des effluves nauséabonds montant aux narines délicates des journalistes et producteurs chargés de propager la bonne parole. Non sans talent d’ailleurs : si l’on fait abstraction de leurs marottes et nonobstant la baisse du niveau, particulièrement sensible chez la jeune génération journaleuse qui psalmodie les commandements progressistes avec la conviction d’avoir inventé la lune, Inter a de jolis restes, sans oublier les meilleurs techniciens du pays. Si on ajoute l’absence de publicité, qui constitue d’ailleurs une concurrence déloyale vis-à-vis des autres radios, on comprend que beaucoup de gens lui soient fidèles malgré leur irritation. Dont votre servante d’ailleurs, mais moi, c’est par mesquinerie : je paie, j’écoute !
Eh bien, il faut croire qu’on leur a drôlement fichu la frousse. Bon, peut-être que CNews et d’autres ont joué un petit rôle : nul n’ignore désormais que France Inter énerve, c’est d’ailleurs un sujet de plaisanterie en interne où l’on doit considérer que taper sur des ciboulots zemmouro-bollorisés est la preuve qu’on a raison. On ne s’en étonnera pas, dans la chaîne publique, presque tout le monde a refusé de nous parler et ceux qui ont accepté ont exigé le plus grand secret, sans doute parce que nous pourrions être contagieux ou avoir une mauvaise influence – la différence, il y a des maisons pour ça, et pas la ronde. Seul Pierre Weil, qui vient de quitter la station après quarante-deux ans de bons et loyaux services, a accepté de me causer. Pour me faire part de l’ébahissement que suscitaient en lui mes questions : « De l’idéologie à France Inter ? Mais non chère Élisabeth, je ne vois absolument pas de quoi vous parlez ! En quarante-deux ans je n’ai pas subi la moindre pression, je n’ai jamais observé de parti pris. On est ouverts à tous les points de vue et c’est normal : on est payés par la redevance, on doit respecter tous les électeurs. Cette histoire de bien-pensance est grotesque. » On se demande où nous sommes allés chercher une idée pareille.
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Une curieuse boîte à outils
En tout cas, près de cinq ans et d’innombrables articles plus tard, la patronne de la chaîne, Laurence Bloch, offre aux auditeurs « une boîte à outils pour leur permettre de se forger une opinion ». Début juillet, elle annonce l’arrivée de cinq chroniqueurs invités à s’exprimer à tour de rôle (un par jour) dans la matinale, chacun disposant de deux minutes et demie. Et, tenez-vous bien, sur les cinq, deux et demi sont plutôt de droite (la demie, c’est Natacha Polony qui appartient à une gauche trop patriote pour être honnête). Certes, Étienne Gernelle, du Point, officiait déjà dans le « 5/7 » et notre chère Natacha dans le grand face-à-face du samedi. Et puis, le quintette comprend aussi Anne-Cécile Mailfert (de la Fondation des femmes) et Cécile Duflot qui présentent d’impeccables états de service féministes-antiracistes-écologistes et j’en passe. Du reste, il est bien précisé que cette rubrique appelée « En toute subjectivité » ne reflète pas le point de vue de la maison – ce qui laisse penser a contrario que les éditos correspondent à la doxa francintérienne. La directrice de l’info, Catherine Nayl (venue de TF1, ce qui avait suscité quelques grincements de dents), rassure ses troupes dans Le Monde : « Ce ne sont pas des éditorialistes, et ils ne feront pas d’édito. Ils se livreront à un exercice de réflexion sur des questions de société. » Nuance subtile. N’empêche, en plus de Gernelle, il y a Alexandre Devecchio qui, non seulement émarge
