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Zemmour bienvenu chez les chtis

"Causeur" à la rencontre du public lillois de Zemmour


Zemmour bienvenu chez les chtis
Eric Zemmour à Lille, le 2 octobre 2021 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA Numéro de reportage : 01041242_000021

Eric Zemmour a poursuivi sa tournée promotionnelle en s’arrêtant à Lille samedi, où une foule nombreuse est venue l’applaudir. Dans la salle, nous avons vu une jeunesse passionnée par le récit que l’essayiste fait de l’histoire de France, de vieux LR déboussolés et pas que des idolâtres.


1500 personnes attendent sous la grisaille du Nord. Devant les portes du Lille Grand Palais, les visiteurs se mettent sagement en file – laquelle s’allonge rapidement sur un ou deux kilomètres. Au programme : une conférence de l’essayiste suivie d’une séance dédicace de son dernier ouvrage La France n’a pas dit son dernier mot (Ed. Rubempré).

Le nombre de visiteurs impressionne et la salle se remplit vite. Ses soutiens plastronnent. Tout sourire, Antoine Diers – animateur de l’association les Amis d’Éric Zemmour se réjouit : « Des personnes de tous horizons nous rejoignent. Nous étions hier avec des acteurs économiques à Valenciennes. Éric Zemmour parvient à être crédible sur tous les sujets ! » La veille, l’essayiste s’affichait dans une permanence Les Républicains en compagnie d’élus et de militants.

Candidat de moins en moins virtuel à l’élection présidentielle, beaucoup viennent pourtant encore écouter ici l’écrivain et le journaliste. Paul est étudiant en école d’ingénieurs et le reconnaît : « Mon vote n’est pas encore définitif. Mais son discours me plaît et m’attire. Alors, je viens pour voir l’orateur et me faire mon avis. » Assise sur la rangée supérieure, une dame nous lance à la volée : « Sur l’islam, l’éducation , les finances ou l’économie, on vient aussi voir l’intellectuel. »  L’intérêt est parfois simplement érudit. Valentin a 23 ans et travaille dans la maintenance informatique à Valenciennes. Il est en colère face « à la déconstruction de l’identité française » et l’assure : « L’histoire m’intéresse. Écouter Éric Zemmour est toujours instructif car il maîtrise son sujet. »

Comme Wauquiez n’y va pas…

Notre discussion est interrompue par l’arrivée du non-candidat. Une haie d’honneur l’attend à l’entrée. Dès qu’il est annoncé, le public se lève et l’acclame. Le conférencier fait son petit tour de salle et salue chaleureusement la foule. Des jeunes brandissent une pancarte « Zemmour 2022 ». «  Quel plaisir d’être de retour à Lille » leur lance-t-il. Une ville « qu’il connait », capitale d’une région « qu’il aime »… Le conférencier sait flatter son public : « Vous êtes des nordistes laborieux, besogneux mais aussi ingénieux ». Suit un cours d’histoire industrielle nourrie de chiffres et relevé de bons mots.

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Valentin, 23 ans, travaille dans la maintenance informatique à Valenciennes. Il aime le discours du polémiste comme ses « références à l’histoire ». Il vient écouter le conférencier et peut-être l’homme politique. 
Hélène et Andrée étaient jusqu’à peu adhérentes à la section Les Républicains de Marcq-en-Barœul. Déboussolées par l’attitude de leur parti, elles sont depuis plusieurs années sensibles au discours de l’essayiste. Elles se disent prêtes aujourd’hui à voter pour lui. Photo: Lucien Rabouille

L’orateur sait captiver et animer une foule. D’un bout à l’autre de son intervention, le discours reste nerveux : les députés de droite sont « des chochottes », les « assistés » des « chômeurs professionnels » et il précise qu’ « à la CAF, on voit qui vient toucher la solidarité nationale. » Cette dernière phrase arrive numéro un à l’applaudimètre. Dans la salle, des militants Les Républicains apprécient. Andrée et Hélène, ex-adhérentes LR se disaient « complétement perdues. » « Nous sommes d’anciens fillonistes, plutôt de tendance RPR. Nous attendions la candidature de Wauquiez mais il n’y est pas allé. » Auparavant militantes sur Marcq-en-Barœul, elles assurent que leur section est actuellement partagée : « Il y a les adhérents favorables à Xavier Bertrand et ceux qui hésitent. Beaucoup pensent déjà voter Zemmour.»  

L’archipel zemmourien

Dans le public également, beaucoup de jeunes BCBG et de militants, cadres ou élus issus des partis de droite. Signe de sa mue politique, Eric Zemmour parle leur langue. Au moment des questions avec la salle, il refuse de s’engager sur la sortie de l’euro à laquelle il est pourtant favorable – arguant qu’il n’y a pas de majorité électorale pour cela. Son objectif répété reste de « réconcilier la bourgeoisie patriote acquise aux Républicains avec l’électorat populaire qui vote pour le Rassemblement National. »

 « La France est un composé. C’est mieux qu’une race, c’est une nation », cette sentence qu’Eric Zemmour cite sans cesse inaugure la belle Histoire de France de Jacques Bainville. Retrouve-t-on le composé français dans son public en même temps que cette alliance Trans-classiste et patriote dont il rêve ?

La France au cœur

À en croire Chahinez, jeune trentenaire venue l’écouter, Eric Zemmour s’adresse à tout le monde  : « Je suis fille de Harki et j’ai la France au cœur. Il dit ce qu’on pense. On est dirigés par des ploucs. Sans être très pratiquante, je suis musulmane mais cette foi me regarde. Il faut vivre tranquillement sa religion dans l’espace privé ! » La jeune fille – et à rebours des recommandations du polémiste – confesse avoir donné à ses enfants des prénoms « qui correspondent à ses origines. » Cette question n’a pas laissé indifférent Mahieddine et Ilias, assis discrètement au fond de la salle. Mahieddine a quitté le monde étudiant pour entrer en bac professionnel mécanique : « Je suis plutôt abstentionniste, mais je me retrouve dans certaines parties de son discours. On est contre la déconstruction et le sentiment de culpabilité. On ne veut pas réécrire l’histoire. Même si c’est vrai qu’il est parfois jusqu’au-boutiste… » Comme sur l’épineux sujet des prénoms ? « On fait avec, mais on aurait aimé porter les prénoms d’un héros de l’histoire de France. » Le jeune homme ajoute : « Le sujet Zemmour divise beaucoup mais la communauté maghrébine est plus partagée qu’on ne le croit. Une moitié, s’en fiche, une autre moitié s’y intéresse et dans cette moitié beaucoup entendent son discours. »

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Reste la question économique. Thierry 53 ans, ancien intérimaire en ingénierie aujourd’hui en recherche d’emploi s’est dit « séduit » par le discours mais pas encore « idolâtre » : « Je viens du Douaisis, une terre bien socialo-communiste et toute ma famille vote à gauche (…) Je suis ce qu’il dit sur CNews sans être parfaitement idolâtre. Par exemple, d’un point de vue économique, il dit qu’il faut baisser les charges sociales sur les entreprises pour refaire de l’emploi… On sait que ça ne suffira pas et qu’il faudra réindustrialiser en protégeant nos frontières. Ce dont il a besoin, c’est de voix gilets-jaunes, ceux qui payent les erreurs des capitaines d’entreprises. » Dans le public, une personne l’avait déjà enjoint de « muscler son bras gauche » en précisant bien qu’il conseillait cela « dans la perspective du second tour ». Beaucoup étaient venus en simples curieux. En le voyant sur l’estrade, beaucoup sont repartis conquis. Et certains le voient déjà figurer sur le podium.

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