Récemment, Pierre Cormary a publié dans Causeur un article particulièrement agressif contre les opposants au passe sanitaire, qu’il a évidemment amalgamé avec les « antivax » afin de mieux réussir son opération de dénigrement. Je suis moi-même un opposant au passe sanitaire, pas hostile au vaccin tant qu’il s’agit d’une décision individuelle, libre et éclairée, mais tout à fait sceptique quant à la politique de vaccination industrielle. Le texte qui suit est la réponse d’un citoyen français représentatif de quelques millions d’autres qui, lorsqu’ils sont insultés, méritent bien d’être ensuite défendus.
Dans la mesure où les opposants au passe sanitaire, à la vaccination comme thérapeutique de masse et même au vaccin lui-même ont été rangés dans le coin des obscurantistes, des illuminés et des arriérés, il convient de commencer par rétablir une vérité : une étude menée par le prestigieux MIT révèle « qu’une partie importante du scepticisme en matière de santé publique est très informée, scientifiquement instruite et sophistiquée dans l’utilisation des données. Les sceptiques ont utilisé les mêmes ensembles de données que ceux ayant des opinions orthodoxes sur la santé publique ». L’idée que seuls les amoureux du passe sanitaire et du vaccin lisent les études est un mythe répandu par ceux qui ont besoin de faire passer leurs adversaires pour des semi-fous incultes. À l’inverse, il faudrait plutôt faire une grande enquête pour savoir si les amoureux du passe et les vaccinolâtres sont, en nombre, plutôt des auditeurs de BFM ou des lecteurs du Lancet. Mon petit doigt me murmure que les résultats d’une telle enquête pourraient en surprendre plus d’un.
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L’opposition au passe sanitaire n’est pas l’opposition au vaccin, encore moins aux vaccins en règle générale. Le passe sanitaire est un sujet politique et social, le vaccin est un sujet médical. Parmi les opposants au passe, il y a des vaccinés (j’en transporte moi-même deux ou trois par samedi dans ma voiture lorsque nous nous rendons aux manifestations) qui le sont pour raisons personnelles et médicales, mais qui refusent par principe de faire de leur état vaccinal une occasion de jouir de droits supplémentaires dont on priverait les autres. La vérité est qu’il est moralement très difficile de dire à des gens qu’ils ont tort de se plaindre que la liberté n’est plus la même entre tous les citoyens selon qu’ils sont ou non vaccinés. Voilà pourquoi certains malveillants font mine d’amalgamer ces citoyens à des « antivax », parce qu’il est bien évidemment plus facile d’attaquer et de ridiculiser un homme qui rejette la science plutôt qu’un homme qui rejette Olivier Véran. Cet amalgame volontaire est d’ailleurs un aveu involontaire des militants du QR-Code : s’ils pensaient sincèrement que notre opposition au passe suffisait à nous faire passer pour des déments, ils n’auraient pas besoin de rajouter le volet « antivax » pour nous discréditer.
« Antivax » ou citoyens inquiets ?
Et d’ailleurs, qu’est-ce qu’un « antivax » ? J’ai effectivement croisé quelques personnes qui considèrent de longue date que les vaccins sont un poison. Ceux-là n’ont pas abandonné cette idée à l’occasion du dernier vaccin en date. J’affirme cependant qu’ils sont une ultra minorité que je ne rencontre d’ailleurs jamais ni dans les manifestations ni dans mes nombreuses discussions avec toutes sortes de personnes sur les réseaux sociaux ou dans « la vraie vie ». Par contre je vois beaucoup de gens qui manifestent une crainte sincère et un doute honnête à l’endroit des nouveaux vaccins. Mais cette crainte est légitime ! Pour plusieurs raisons :
Nous nous souvenons des déclarations du professeur Éric Caumes (pas connu pour son complotisme) qui le 10 décembre 2020 s’inquiétait de la fréquence inhabituellement élevée des effets secondaires du vaccin Pfizer ; nous nous souvenons aussi des premières déclarations du professeur Alain Fischer qui, intervenant en direct le 3 décembre 2020 aux côtés de Jean Castex, admettait au moment de lancer la grande campagne de vaccination qu’il n’existait aucune étude scientifique sur les vaccins mais seulement des données du fabricant, et que nous n’avions pas de données réelles sur l’efficacité du vaccin en matière de protection et d’infection ; nous n’avons pas oublié la médiatisation des cas de paralysies faciales ou des cas de thromboses observés après des injections. Nous avons vu également, toujours en gros titres dans les médias, les annonces anxiogènes de ces multiples pays européens qui, les uns après les autres, suspendaient la vaccination avec AstraZeneca. Cerise sur la gâteau et couac ultime : le 14 mars 2021, le Premier ministre Jean Castex disait textuellement «il faut avoir confiance dans le vaccin AstraZenaca », or dès le lendemain 15 mars la France suspendait temporairement l’utilisation de ce vaccin… Et surtout, nous avons tous remarqué qu’après avoir longuement commenté ces cas de paralysies faciales et de thromboses, subitement ce sujet a disparu purement et simplement des médias. Alors que le nombre d’injections augmentait au fur et à mesure des semaines, ce qui aurait dû entraîner mécaniquement une augmentation des effets secondaires, les médias ont du jour au lendemain observé un mutisme déroutant qui a beaucoup contribué à nourrir la suspicion.
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Ceux que l’on appelle trop légèrement des « antivax » sont avant tout, pour l’immense majorité d’entre eux, des citoyens qui ne savent plus sur quel pied danser face à tellement de retournements, d’informations contradictoires et d’opacité. Il suffit pourtant d’aller à leur rencontre pour s’en convaincre : le vaccin, ils ne demandent qu’à y croire comme ils croient à la chirurgie, aux antibiotiques, aux antalgiques et à l’alimentation équilibrée. Pourquoi ces Français qui ne rejettent rien de l’arsenal médical auraient subitement à l’endroit des vaccins en particulier une position irrationnelle et démente ? Les pourfendeurs « d’antivax » ne répondent jamais à cette question. Ils préfèrent constater qu’il existe des sceptiques et les insulter au lieu d’interroger les raisons du scepticisme. Il faudra bien un jour qu’ils nous expliquent pourquoi cette haine que je trouve, personnellement, bien plus irrationnelle que le scepticisme vaccinal.
Attaquer les fauteurs de scepticisme plutôt que les sceptiques
Comme a dit le professeur Raoult devant Laurence Ferrari le 23 août 2021 sur Cnews : « Ce qui a fait naître les « antivax » partout dans le monde, ce sont les erreurs politiques. Il y a toujours des gens qui étaient un peu contre la vaccination mais c’était marginal […]. Si on force les gens, plus on les force, plus ils se méfient et plus ils se demandent ce qu’il se passe ». Aux erreurs politiques, nous pouvons ajouter comme explication du scepticisme l’attitude des journalistes qui, en se taisant soudainement sur un sujet sensible qu’ils avaient commencé à aborder, ont forcément encouragé involontairement l’idée qu’une omerta avait été décidée par eux tous, ce qui n’est jamais fait pour rassurer l’opinion.
Pourquoi faire tous ces rappels ? Même pas pour dire que les vaccins contre le Covid sont nocifs, dangereux ou qu’ils vont provoquer une hécatombe car je ne le pense pas. Je fais ces rappels parce qu’ils justifient à mon avis le scepticisme, qu’ils l’expliquent et j’ose le dire : qu’ils le rationnalisent. Ce qui, je le dis encore, ne veut pas dire qu’il faut avoir peur du vaccin : je dis qu’il n’est pas étonnant et même qu’il est normal que des gens aient peur après qu’autant d’éléments soient venus leur apporter autant de raisons (fondées ou non) d’avoir peur. À cause des attentats, beaucoup de nos compatriotes ont peur lorsqu’ils croisent dans la rue ou dans le train un homme à longue barbe et djellaba. Dans l’immense majorité des cas, cet homme ne va pourtant pas les assassiner, néanmoins peut-on reprocher à un citoyen qui connaît la menace terroriste d’avoir peur lorsqu’il croise ce qui ressemble d’aussi près à un terroriste tel qu’il apparaît dans les médias depuis des années ? La gauche a pris l’habitude d’appeler « raciste » le citoyen français qui craint pour sa sécurité. Ne commettons pas l’erreur d’appeler bêtement « antivax » le citoyen qui craint lui aussi, et tout aussi légitimement, pour sa sécurité.
Qui plus est, depuis dix-huit mois nous assistons à une gestion de crise chaotique où erreurs, imprécisions, ratés et couacs se succèdent. Sur la seule partie dite de la « première vague », j’ai eu assez de matière dans ce domaine pour commettre tout un livre. Si j’avais poursuivi ce travail, j’en serais au quatrième tome tant il y a à dire. Ce que nos dirigeants paient aujourd’hui, ce n’est pas le prix d’une défiance populaire irrationnelle et incompréhensible, c’est la facture de toutes leurs erreurs. Et on ne peut décemment pas reprocher à la main qui s’est fait mordre plusieurs fois de ne plus vouloir s’approcher de la gueule du loup.
Finalement, la macronie a joué un coup politique bien habile en réussissant à créer dans la population les conditions d’un clivage autour du passe sanitaire : de cette manière, au lieu que tout le monde exige des comptes aux véritables responsables de ce désastre, voilà que la classe des privilégiés fabriqués par le passe sanitaire se retourne contre les gueux irréductibles, contre les manifestants pouilleux et les « antivax » incultes pour déverser sur eux une colère qui prend trop souvent la forme de la haine. Si j’observais la situation depuis la fenêtre d’un ministère, je me frotterais les mains. Divide et impera, toujours.
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