Nous avons eu de nombreux deuils en cette année 2012 : les disparitions de Chris Marker, de Félicien Marceau ou de Thierry Roland, entre autres et dans des genres de beauté assez différents. Sans compter d’autres disparitions tout aussi douloureuses : mort de l’idée que les socialistes soient de gauche ou que les super-riches aient encore l’idée d’appartenir à une nation et non à une hyperclasse hors-sol.
Il convient d’y ajouter l’annonce d’une nouvelle perte, et non des moindres. Spiderman ne viendra plus enchanter la triste sexualité de l’ado mâle dans sa peau. Dans le 700ème numéro du comics paru mercredi dernier qui porte son nom, Spiderman perd son ultime combat contre le docteur Octopus, son ennemi de toujours. Spiderman, alias Peter Parker, malheureux en amour, était en activité depuis 1962 et avait toujours vingt ans, incarnant une manière de Tanguy américain avec un goût suspect pour le travestissement.
Nous l’avions pour notre part découvert à la fois en lisant Strange dans les années 70 et en regardant un dessin animé dont le générique était énervant car à peine quelques notes entendues, il vous restait toute la journée dans la tête : « L’araignée, l’araignée, est un être bien singulier… ». Il nous énervait un peu, à vrai dire, faisant preuve d’une niaiserie sentimentale assez proche de celle du Surfer d’argent. D’ailleurs les garçons qui étaient fans de l’Araignée et du Surfer d’argent étaient plutôt immatures en général. Souvenez-vous, par exemple, que Dans À bout de souffle made in USA, l’excellent remake de Godard par Jim Mc bride, alors que la fille jouée par Valérie Kaprisky lit Faulkner (qui n’est pas un super héros), son amoureux petit truand traqué par la police incarné par Richard Gere, ne lit que le Surfer d’argent et se voit comme une âme pure exilée dans le cosmos : on voit le niveau.
Alors que nous, nous préférions des super héros sérieux comme Iron-Man, un milliardaire de l’armement, probable électeur de Barry Goldwater, un prométhéen qui en avait et qui s’était transformé en surhomme avec une armure high-tech à réacteurs pour casser du Rouge.
On avait aussi une très vive sympathie pour Daredevil, aveugle, avocat pour les pauvres qui malgré son handicap enfilait son collant rouge et se débrouillait mieux que les voyants pour punir les méchants. En plus Daredevil avait une manière de relation amoureuse à la limite du SM avec La Veuve Noire, une espionne soviétique moulée dans une combinaison anthracite qui lui faisait des seins inoubliables, vraiment inoubliables.
Oui, chaque adolescent aimait voir sa faiblesse transformée en force au travers des super héros. Par exemple, moi j’étais très myope et j’avais des relations compliquées avec les filles à gros seins, même communistes, même brunes. Dardevil était donc logiquement mon super héros d’élection.
C’est pour cela que je ne voudrais pas faire de peine aux fans de Spiderman mais le problème de Peter Parker s’explique de façon très claire : c’est un éjaculateur précoce comme le montre très bien l’adaptation cinématographique par Sam Raimi, où le personnage joué par Tobey Maguire a un mal fou, une fois qu’il a été piqué par l’araignée radioactive, à contrôler la sécrétion blanchâtre de la toile qui lui sort des …poignets, poignets dont on connaît par ailleurs le rôle primordial dans la masturbation. Vous vous étonnerez après que sa vie sentimentale fasse passer celle de Woody Allen pour une promenade de santé donjuanesque.
En même temps, on sait bien ce qui se passe quand on tue un super héros, même aussi défaillant sexuellement que Peter Parker. Les fans hurlent à la trahison. C’est ainsi que Conan Doyle après avoir tué Sherlock Holmes dans Le dernier problème fut obligé de le ressusciter, la colère des accros du détective étant allée, pour certains d’entre eux, jusqu’à envoyer des lettres de menaces. Et pourtant, il en avait assez de son encombrant héros cryptohomo et cocaïnomane.
Que tous les garçons à la sexualité inquiète se rassurent. L’Araignée va revenir, un jour ou l’autre.
Toujours aussi nul avec les filles.
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