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Daft Punk, les Beatles de la génération Y

Ils ont anobli la musique électronique


Daft Punk, les Beatles de la génération Y
Australie, 2007 © WENN/SIPA Numéro de reportage : SIPAUSA31036593_000008

Voilà un mois que Daft Punk a annoncé sa séparation


Il y a un mois, le légendaire tandem de la musique électronique laissait derrière lui une carrière longue de 28 ans, seulement quatre albums studio (comme Jimi Hendrix – il en faut peu pour être un géant!) et un parterre de fans sidérés, ou au moins surpris, dans le monde entier. On nous avait pourtant juré que 2021 serait une meilleure année, il semblerait que cette nouvelle ne soit venue infirmer nos belles croyances !

Dernière apparition publique en 2016

Annoncée dans un court métrage nommé « Épilogue », la séparation de Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo fait suite à des années d’absence totale, puisque leur dernier album remonte à 2013, et leur dernière apparition publique aux Grammy Awards de 2016.

L’émotion largement partagée indique que Daft Punk parle au plus grand nombre. Entre deux vagues de Covid, la nouvelle aurait pu paraitre dérisoire. Leur album « Discovery » (2001) mériterait de figurer parmi les grands albums du dernier siècle, aux côtés de « Abbey Road », « Sticky Fingers » et « Kind of Blue ». Il aura marqué toute une génération de jeunes qui, des Etats-Unis au Japon, ont connu des soirées sans masques dans lesquelles le DJ passait plusieurs fois leur grand tube planétaire « One more time ».

Un sens rare de l’harmonie

Mais Daft Punk ne se résume pas à une machine à tubes. S’ils laissent un souvenir si unanime, c’est qu’ils ont également su parler aux plus mélomanes et que les « punk idiots » ont su convaincre les critiques. Les jeux de texture sonore sur l’album HomeWork ou les mélodies cosmiques de « Voyager » ou de « Beyond » montrent un sens rare de l’harmonie, apportée par Thomas Bangalter, couplé à une recherche technique du son idéal mené par Guy-Manuel de Homem-Christo.

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Tous les arts ne se valent pas, de même que tous les styles de musique n’ont pas la même exigence ni la même hauteur. Seuls les grands talents sont capables d’élever un art ou un style au rang des plus nobles. Les Daft Punk sont de ces artistes qui font l’histoire de leur art: ils ont anobli la musique électronique. Ce n’est pas là qu’une parole de fan ; si des artistes aussi exigeants que Giorgio Moroder, Nils Roger ou Akira Matsumoto ont bien voulu collaborer avec Daft Punk, c’est qu’ils ont perçu en eux l’indépendance et l’exigence qui font les grands musiciens.

Les raisons musicales de leur grand succès étant données, Daft Punk incarne également dans son imagerie ce que Hegel appelle le « Zeitgeist », ou « l’esprit du temps ». Ils symbolisent l’épopée d’une jeunesse des années 80 et 90, ayant assisté jeune au passage au troisième millénaire, et à la transition vers l’ère des ordinateurs. Leur esthétique, faite de manga japonais et d’un son grunge, que l’on retrouve dans Human After All, synthétise des tendances très différentes qui ont traversé les décennies passées.

Robot rock

Les casques de robot qu’ils décidèrent de porter dès la fin des années 1990 donnent le la d’une génération biberonnée à Internet, où la célébrité et l’anonymat se côtoient, et aussi l’avènement proche de l’époque des robots et d’une certaine disparition de l’Homme. Sans tomber ni dans la facilité ni dans le glauque, le groupe a su extraire de cette modernité technique une forme de poésie. Leur incarnation de l’époque ne les empêche pas d’être tout à fait à rebours sur certains sujets: leurs apparitions et concerts se sont faits extrêmement rares, au moment où les vedettes actuelles désirent apparaitre le plus possible et quotidiennement sur nos écrans.

La France doit beaucoup à Daft Punk culturellement. Pour la première fois depuis longtemps, l’hexagone a été un précurseur musical, si bien que la galaxie d’artistes qui a emboité le pas à Daft Punk a été bien mal nommée – puisqu’en anglais – : « French Touch 2.0 ». Depuis le walkman que nous trainions dans les années 1990 jusqu’à notre application de musique actuelle, Daft Punk n’a rien perdu de sa saveur. Intemporelle. En dépit de mon jeune âge, l’écoute de Daft Punk me fait me sentir vieux. Ce sont les Beatles de ma génération.

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