Flora Fischer publie ses Confidences d’une dermatologue. Tout tout tout, vous saurez tout sur la dermatologie!
“Ça va pas, tu vas être prise pour une esthéticienne !” s’est entendue dire la pétillante Flora Fischer au moment de choisir sa spécialité, alors qu’elle était étudiante. Les gens ignorent que les dermatologues sont des médecins, ils croient qu’ils ont fait des études d’esthétique, alors que les dermatologues ne sont pourtant pas des médecins au rabais !
“La dermatologie ne passe pas toujours pour une spécialité éclatante ou héroïque, mais elle concerne tout le monde et elle me satisfait” explique la chroniqueuse de Causeur et du Huffington Post qui publie son premier livre chez Robert Laffont.
Les médecins ont peur d’être uberisés à leur tour
Retraçant son parcours, la quadra revient dans les premières pages sur ses études. Alors qu’elle s’est un temps passionné pour la gastro-entérologie à l’hôpital Cochin, c’est vers la dermatologie que s’oriente finalement la jeune femme. Dans un récit précis et inattendu, riche d’anecdotes cocasses ou plus graves et de cas concrets, notre docteur établie dans l’ouest parisien livre d’intéressantes réflexions sur sa spécialité et sur l’intime. Nous sommes souvent inquiets à l’idée d’aller montrer notre peau. Elle s’autorise également des réflexions plus personnelles, nous renseigne sur la configuration particulière de son cabinet et nous indique sa méthodologie personnelle en consultation – osons le dire: une approche toute féminine de la médecine.
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Le témoignage de Flora Fischer s’inscrit dans une période où la pratique de la médecine se trouve confrontée à des patients surinformés (les praticiens craignent de se voir remplacer demain par les machines). Il a été écrit alors que le coronavirus pointait le bout de son sale nez. Flora Fischer évoque la maladie, qu’elle contracte au début du premier confinement, et décrit les symptômes cutanés rencontrés par certains malades (principalement aux extrémités des doigts).
La peau, un organe extraordinaire qu’on oublie quand tout va bien
On en revient toujours à la peau, cet organe extraordinaire qui est une barrière aux propriétés incroyables, et qu’on a tôt fait d’oublier quand tout va bien. Pour une raison ou une autre, chacun est pourtant amené à pousser la porte de la consultation du dermatologue un jour. Prurit mystérieux apparu après des rencontres nocturnes louches… tâches inquiétantes sur la peau… parasites… volonté de gommer les signes du temps sur son visage: les raisons qui poussent à consulter sont nombreuses.
Flora Fischer exerce une activité où les patients doivent se mettre nus et sont aussi souvent amenés à “se mettre à nu”. En effet, les maladies de peau sont souvent “affichantes”, c’est-à-dire que le regard d’autrui peut en accroitre les symptômes. L’intrication entre les troubles psychologiques et certaines maladies de peau est d’ailleurs désormais bien connue. La vénéréologie, enfin, est souvent appelée à la rescousse dans la pratique du dermatologue.
Sexualité en milieu hospitalier et excès de la déferlante metoo
Flora Fischer offre un récit sensible, celui d’un médecin souhaitant faire connaitre à son lecteur toute l’étendue de sa spécialité, mais elle évite soigneusement l’écueil de la sensiblerie, ce que la couverture rose choisie par l’éditeur laisse craindre au premier abord. “La dermatologie est une spécialité très étendue, on passe souvent du banal au très grave et du dégoutant au beau” écrit-elle. Pour le dégoutant, on se rendra au chapitre intitulé “Galerie des horreurs dermatologiques”, lequel mettra à rude épreuve hypocondriaques et cœurs sensibles. “C’est quoi le cas le plus dégueulasse que tu aies pu voir?” demande-t-on fréquemment à Flora Fischer dans un cadre familial ou amical. La réponse comprend un ulcère verdâtre et les vers qui s’en échappent puis cheminent dans la salle de consultation… À côté, morpions, gale ou poux que la praticienne rencontre parfois sont une petite plaisanterie.
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Aux analyses sociétales – sexualité en milieu hospitalier, nouvelles générations qui se présentent au cabinet, metoo dans le corps médical – succède une partie du livre consacrée à la médecine esthétique, laquelle prend une part grandissante dans l’activité des dermatologues. Le Docteur Fischer n’y voit pas de mal, et nous révèle que la tranche des 18-34 ans y a désormais plus recours que celle des 50-60 ans. Voici les dernières tendances: “Les grosses pommettes de hamster commencent à être désuètes, le menton projeté façon frères Dalton aussi.” Mais on apprend que “les lèvres pulpeuses et les gros seins hauts et fermes sont toujours autant appréciés.” Je ne vous avais pas menti: on sourit aussi souvent à la lecture de l’essai de Flora Fischer.
Confidences d’une dermatologue, Flora Fischer, Robert Laffont, 2021.
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