Le 4 février, le tribunal d’Anvers en Belgique a rendu son verdict à l’encontre des quatre auteurs de l’attentat déjoué le 30 juin 2018 à Villepinte. Assadollah Assadi, le diplomate-terroriste a été condamné à 20 ans de réclusion pour tentative d’attentat terroriste avec l’intention de tuer et activités au sein d’une entité terroriste. Le procès fait monter la tension entre la Belgique, la France et l’Allemagne d’un côté, et l’Iran de l’autre.
30 juin 2018, à Anvers la police belge procède à l’arrestation de Nassimeh Naami et Amir Saadouni, un couple belgo-iranien. Dans leur voiture, les policiers découvrent 500 grammes de TATP (un explosif relativement facile à fabriquer et à dissimuler) et un plan précis des lieux où se tient le jour même la rencontre internationale annuelle pour un Iran libre et démocratique à Villepinte, en banlieue parisienne.
La conférence est organisée par le CNRI (Conseil national de la Résistance iranienne), un organisme composé des opposants de la première heure au régime théocratique d’Iran. Elle accueille plus de 25 000 participants et des personnalités politiques et médiatiques du monde entier. Maryam Radjavi, présidente du mouvement, est plus particulièrement visée par ce projet d’attentat.
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L’immunité diplomatique autrichienne n’est pas valable en Allemagne…
Au même moment, sur une route de Bavière, la police allemande interpelle Assadollah Assadi, diplomate iranien en poste à l’ambassade de Vienne, fortement soupçonné de participer au complot. Dans son véhicule, les autorités allemandes découvrent un carnet avec les codes de communication de l’opération, l’instruction de la mise en application de la bombe ainsi que les noms de nombreux agents iraniens en Europe. Assadi et ses supérieurs pensaient pouvoir profiter sans scrupule de l’immunité diplomatique. Las, celle-ci n’était valable que sur le territoire autrichien, pas en Allemagne, où il a été interpellé. Une précision qui a son importance.
Des mois d’enquête suivant les arrestations ont permis aux autorités belges et allemandes de démontrer l’existence d’un réseau de cellules dormantes sur tout le territoire européen, dont Assadi avait la charge pour le compte du Vevak, ministère des Renseignements et de la Sécurité nationale et principale agence de renseignement iraniens. Il a été notamment prouvé que les agents impliqués dans ce projet terroriste avaient perçu au moins 450 000€ et qu’ils avaient multiplié les voyages à Téhéran. Il a également été établi qu’Assadollah Assadi s’est servi de son passeport diplomatique pour faire venir les 500 grammes de TATP depuis l’Iran, et ensuite les transmettre à Nassimeh Naami et Amir Saadouni. De surcroît, l’enquête a conclu qu’Assadi et ses agents ont eu le feu vert des plus hauts organes décisionnels du pays. Les procureurs belges n’ont pas hésité à parler de terrorisme d’État.
Le cynisme et la mauvaise foi du pouvoir iranien
Depuis l’arrestation d’Assadollah Assadi, le ministre des Affaires étrangères iranien Djavad Zarif n’a cessé de manipuler l’opinion. Il a évoqué un coup monté et invoqué systématiquement l’argument de l’immunité diplomatique de son diplomate, niant la légalité de son arrestation et de son procès. Comble du cynisme, la diplomatie iranienne est allé jusqu’à dénoncer les conditions d’emprisonnement inhumaines d’Assadi. Quand on connaît le chef du pouvoir judiciaire du régime, Ebrahim Raïssi, et le ministre de la Justice, Alireza Avayi, deux hommes qui ont un rôle prépondérant dans le massacre de prisonniers politiques en 1988, sans oublier la mascarade que les mollahs appellent « justice », on a envie de rire de cette mauvaise foi ahurissante.
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Toujours est-il que le régime n’a pas supporté l’idée que ses agissements soient dévoilés alors même que les mollahs jouissent d’une quasi-impunité, offerte par les atermoiements et la faiblesse diplomatique de l’Union Européenne à leur égard sur fond de tensions avec l’administration Trump autour des accords sur le nucléaire. Depuis, le régime iranien fait ce qu’il sait faire de mieux depuis 1979 : le chantage. Un comité spécial regroupant différents services à Téhéran a directement menacé la Belgique de représailles si elle condamnait Assadollah Assadi. Récemment, Ahmad Reza Djalali, médecin irano-suédois et professeur de l’Université libre flamande de Bruxelles, arrêté en 2016 au cours d’une mission à Téhéran, a été jugé pour espionnage au profit d’Israël et condamné à mort. Après presque quatre années passées à l’isolement, étrangement, sa condamnation a été annoncée au début du procès d’Assadi en Belgique. Le message était clair. Ce n’est pas le seul envoyé par les mollahs. À l’automne 2020, c’est l’architecte germano-iranienne à la retraite Nahid Taghavi, qui a été placée au secret à la prison d’Evin, dans des conditions de détention d’un autre âge. Un message adressé à l’Allemagne responsable de l’arrestation du diplomate Assadi. En 2019, Rouhollah Zam, réfugié en France depuis 2012, se fait piéger en Irak par les Gardiens de la révolution. Après avoir été contraint à des aveux télévisés, il a été reconnu coupable de « délits contre la sécurité du pays », « espionnage » au profit de la France, insulte au « caractère sacré de l’islam » et pendu le 12 décembre 2020. En matière de négociations par la peur, le régime d’Iran sait y faire. Reste à savoir si l’Union Européenne va enfin réagir avec fermeté ou si elle va encore se soumettre aux chantages des mollahs.
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