Le PCUS existe encore. Il a changé de nom, déménagé à Paris rue de Solférino et s’appelle désormais le Parti socialiste. Sauf accident nucléaire, Harlem Désir devrait être le prochain premier secrétaire du PS à l’issue du congrès de Toulouse en octobre. L’ex-président de SOS Racisme a été désigné par Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault dans la plus grande opacité et conduira une motion ratissant large, de Benoît Hamon à Pierre Moscovici.
Pour la Maire de Lille, Matignon et a fortiori l’Élysée, le but est de verrouiller le PS en s’assurant qu’il est un vrai parti godillot, hochant la tête dans le bon sens. Désir a l’avantage d’être lisse, de manier la langue de bois et ne pas occuper de réelle surface médiatique à la différence de Jean-Christophe Cambadélis, sniper de DSK recyclé auprès d’Aubry. Le n°2 devrait être Guillaume Bachelay, issu des rangs fabiusiens et devenu la « plume » d’Aubry. Pour le poste de porte-parole, on parle de deux fidèles de Hollande : Olivier Faure, parlementaire et conseiller à Matignon, flanqué de sa collègue députée Karine Berger.
Cette direction, instituée par le fait du prince, a pour seul objectif de tuer le débat idéologique au sein du parti. Les vrais maîtres à bord restent Aubry et Ayrault avec Hollande en coulisses, Désir n’étant qu’un homme de paille. Hollande craignait en effet une rébellion de l’aile gauche du PS et notamment de Benoît Hamon. Mais devenu ministre, ce dernier a remisé ses ambitions au vestiaire. Avec ses proches, il a intégré la motion Aubry-Ayrault en échange de 15 à 25% des postes dans les futures instances dirigeantes du PS.
La gauche du PS sera donc représentée par Emmanuel Maurel, soutenu par Marie-Noëlle Lienemann. Reste à savoir s’il ira au bout de sa démarche et se présentera contre Désir au poste de premier secrétaire. On peut aussi citer les motions de Gérard Filoche, Juliette Méadel, Constance Blanchard et même celle de… Stéphane Hessel. Mais aucun d’eux ne fera le poids face au bulldozer de la motion Aubry-Ayrault. Le Congrès est donc joué d’avance.
Car Hollande le sait bien, il n’y a rien de pire pour un chef de l’Etat de voir « son » parti lui échapper. Avec des députés refusant d’approuver les réformes sans broncher et des grands vizirs qui se voient déjà calife à la place du calife. François Mitterrand a dû supporter les rivalités entre Jospin et Fabius. Jacques Chirac a vu Nicolas Sarkozy prendre l’UMP en 2005. Sarkozy a lui tout fait pour contrôler sa majorité. Quitte à recevoir les députés à l’Elysée, se comportant davantage en chef de parti qu’en chef de l’Etat.
Hollande avait promis de rompre avec ce genre de pratiques mais il sait qu’il devra tenir ses troupes. Dès cet automne, le Parlement débattra de la règle d’or. Les proches de Maurel et Lienemann devraient toussoter mais Hamon joue à fond la solidarité gouvernementale. Et l’année 2013 s’annonce déjà comme une année de rigueur, des promesses ne pourront pas être tenues (quid des 60 000 profs en plus ?).
Mais si la gauche du parti a été quelque peu muselée, un autre chantier s’annonce : répartir les postes entre Aubryistes et Hollandistes. En l’absence de motions différentes, les deux camps devront se distribuer les rôles selon un gentleman agreement. Chacun visera les postes clés du parti (fédérations, élections, trésorerie, communication…) et tout se jouera dans de subtiles négociations de couloir.
C’est bien le drame. Hollande voulait éviter la confrontation avec l’aile gauche du PS, il risque d’avoir maille à partir avec Aubry pour une vulgaire question de strapontins. Certes, Aubry dénonçait la « gauche molle » de Hollande, mais désormais comment distinguer deux camps qui approuvent sans sourciller la règle d’or et le Traité de stabilité ? Ce congrès ne sera qu’une enième bataille d’appareils comme le PS sait si bien les mener.
L’enjeu du Congrès du Toulouse ne sera donc pas le vote des militants. Il tient plus du sommet de Yalta que du réel moment de démocratie interne. Bizarre pour un parti qui s’est targué de ses 2,5 millions de votants à la primaire. Ne nous attendons pas plus à ce que le PS définisse une ligne autonome par rapport au gouvernement. Bizarre pour un parti qui a tant critiqué les godillots de l’UMP. Le seul mot d’ordre de ce Congrès, c’est finalement le renoncement. Serait-ce celui du quinquennat Hollande ?
*Photo : Parti socialiste
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