Si le corps enseignant est désormais voué à être le dernier gardien de la laïcité, il va falloir lourdement l’armer.
Il y a quatre ans en Seine-Saint-Denis, dans le cadre d’une mise à niveau en français agrémentée d’une sensibilisation aux « principes et valeurs de la République » définie par le « contrat d’intégration républicaine » créé sous le quinquennat du président normal François Hollande, j’ai projeté quelques caricatures du prophète Mahomet auprès d’une vingtaine d’étrangers, aux trois-quarts d’obédience musulmane. Aucun d’entre eux ne s’est indigné dans la salle, l’un d’entre eux a même pouffé, succombant à une irrésistible envie de rire avant de vite se reprendre, craignant sans doute d’être amalgamé au camp des impies par ses « pairs ».
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« Je suis professeur », et après?
Toujours est-il que le principe de l’adhésion au droit au blasphème comme condition essentielle à l’intégration en terre française a semblé admis ce jour-là, la séance s’étant en tout cas bien déroulée. C’étaient des adultes voulant des papiers, un public plus coopérant, il faut bien le reconnaître, qu’une trentaine d’adolescents dont les adeptes de la religion de paix et d’amour se sentent aux trois-quarts plus conquis par les lois de cette dernière que par celles du pays où ils sont instruits, comme nous l’a révélé un sondage IFOP fin août dernier – au grand dam du maire écolo du second arrondissement parisien Jacques Boutault, dont le visage blêmit tel celui de Candide connaissant les désillusions de l’amour, quand il en apprit l’existence samedi 17 octobre sur le plateau de CNEWS.
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Il est réconfortant de voir des compatriotes dresser des panneaux « je suis professeur » et suggérer d’organiser des débats autour des caricatures du prophète Mahomet nu dans des établissements à la rentrée, il est fort aimable de la part de Jean-Michel Blanquer de promettre qu’il va désormais « protéger tous les professeurs de France » (il sont 900 000), il est tout aussi aimable de lire çà et là que Samuel Paty était un enseignant « bienveillant » qui « n’a pas fait d’erreurs » – malgré une certaine « maladresse » objectée par certains éditorialistes qui ont sans doute beaucoup enseigné dans leur vie – et qui était de plus « très apprécié de ses élèves » mais très franchement, qui est prêt à risquer sa tête pour avoir montré des caricatures du prophète Mahomet à une classe de 4ème -la moins reposante de toutes-, qui plus est pour un salaire mensuel net de 1700 euros après six années d’ancienneté?
Seulement 6% des enseignants formés pour faire face aux atteintes à la laïcité
Des « présidents de régions » viennent de s’engager à diffuser un « livre de caricatures » auprès des lycéens. Fort bien, mais oseront-ils y mettre la caricature de Mahomet par Luz qui a indigné tant de nos gardiens de vertu? Et doit-on en conclure que les collégiens en seront exemptés? Actuellement, « seuls 6% des enseignants ont reçu une formation pour faire face aux atteintes à la laïcité », s’alarmait l’ancien inspecteur Jean-Pierre Obin le 1er octobre dernier. D’aucuns s’empressent de rappeler que cela fait déjà seize ans que ces entorses à nos lois dans le secondaire ont été consignées dans le fameux rapport du même inspecteur de l’Education nationale. C’est insuffisant. D’après certains collègues, il y aurait déjà trente ans, des jeunes filles accumulaient les certificats médicaux bidons dans certains établissements en France pour ne pas à avoir à montrer leurs cuisses en cours de sport et certaines prenaient des vacances forcées sur les journées de cours pour aller se faire exciser « au pays ».
À quoi sont formés les futurs enseignants actuellement? À la « gestion de classe », à la « différenciation pédagogique », à la prévention du décrochage scolaire ou encore, aux TIC (Technologies de l’information et de la communication). Sur ce dernier point, il n’est pas omis de rappeler en substance aux professeurs de lettres qu’ils sont de grands ringards, étant bien trop peu à utiliser des ordinateurs ou des tablettes dans leur cours alors qu’ils vivent dans le meilleur des mondes gangrené par le repli sur soi, les réseaux sociaux, le communautarisme et le terrorisme. En revanche, silence radio sur la laïcité et l’islamisme.
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Une fois l’émotion retombée, va-t-on réellement armer les professeurs pour faire face au séparatisme islamiste ou va-t-on s’atteler en priorité à « dégenrer » l’école ou à promouvoir encore plus l’ écriture « inclusive » sous les applaudissements de Libé? Une vraie lutte s’offre cette fois aux enseignants, et il ne faudrait pas s’y soustraire. Dans notre société toujours plus atomisée, voilà qui ne ferait pas de mal finalement. Cependant, un fantassin ne va pas au front tout nu. Si le corps enseignant est désormais voué à être le dernier gardien de la laïcité, il va falloir lourdement l’armer. Et cela doit se traduire absolument par bien plus de 6% des enseignants formés pour faire face aux atteintes à la laïcité.
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