Ce 22 août 2020 est déclaré première journée internationale de l’apostasie à l’appel de nombreuses associations d’ex-musulmans.
Jour de l’Apostasie. Apostasy Day. Ce 22 août 2020 est déclaré première journée internationale de l’apostasie à l’appel de nombreuses associations d’ex-musulmans. Même s’il arrive que des apostats d’autres religions souffrent injustement à cause de ce choix, et cela doit être dénoncé, les ex-musulmans sont en première ligne car l’islam est aujourd’hui la seule religion au monde au nom de laquelle des Etats punissent de mort l’apostasie : Afghanistan, Arabie saoudite, Brunei, Emirats arabes unis, Iran, Maldives, Mauritanie, Qatar, Somalie, Yémen.
Ex-musulmans condamnés ou menacés
Même là où ils ne la punissent pas de mort, beaucoup de pays musulmans criminalisent l’apostasie, et privent les apostats de tout ou partie de leurs droits civiques. Au Pakistan, elle est généralement considérée comme un blasphème contre l’islam, ce qui est puni de mort. En Occident, ici, juste à côté de nous, les apostats de l’islam sont trop souvent confrontés à des pressions insidieuses, des menaces ouvertes et des violences intolérables, abandonnés par des juridictions d’une complaisance coupable envers une religion qui excelle à se poser en victime alors même qu’elle impose son joug. En France, dans notre pays, les représentants officiels de l’islam ont explicitement refusé de reconnaître le droit à l’apostasie, alors qu’il découle simplement de la Constitution. Et l’Etat a laissé faire. Nous avons laissé faire.
L’apostasie, le fait de quitter une religion pour se convertir à une autre ou pour devenir agnostique ou athée, n’est pourtant que l’exercice de la plus sacrée de nos libertés, la liberté de conscience.
Je choisis ce mot à dessein : sacrée. Affirmée et réaffirmée par les déclarations des droits de l’homme, pleinement constituée dans nos lois, fragilisée seulement par ces « accommodements raisonnables » qui ne sont que des accumulations de lâchetés toujours plus grandes, cette liberté précède et excède toute expression juridique, pour toucher à ce qui est à la fois au cœur et au-delà de notre humanité.
Liberté de conscience, j’écris ton nom
Qu’est-ce qui peut nous lancer en quête du divin, sinon la conscience ? Qu’est-ce qui peut nous permettre de distinguer entre la vérité, l’erreur et le mensonge, de savoir quels Dieux méritent notre vénération et quelles entités ne sont pas dignes que l’on s’incline devant elles, sinon la conscience ? Qu’est-ce qui nous permet de dire à une divinité « je crois en toi » sinon la conscience, et le droit de ne pas le dire ?
Car la foi n’est pas affaire de croyance, mais de confiance. Et la confiance ne s’impose pas, elle ne se décrète pas, elle ne s’obtient pas par la contrainte ou la menace. La foi n’est pas de croire qu’un Dieu existe, mais de croire en lui : si je dis à mon enfant, à un ami, à un compagnon d’armes « je crois en toi », ce dont je lui parle dépasse infiniment la seule observation du fait qu’il existe. Comme l’amour, la foi est libre ou elle n’est pas. Le droit de dire « non » est ce qui ouvre la possibilité de dire « oui ».
Qu’une religion pousse un Etat à criminaliser l’apostasie, et elle devient elle-même criminelle. Elle souille la noblesse de la politique en l’instrumentalisant pour étouffer ce qui permet justement l’existence de la politique, c’est-à-dire l’exercice de la conscience pour faire se rencontrer l’idéal et le réel. Elle crache au visage des Dieux qu’elle prétend servir, agissant comme s’ils n’étaient que des tyrans avides que l’on se prosterne devant eux de gré ou de force. Elle trahit ce qui est l’essence même d’une véritable religion, bafouant le droit de tout être humain de rechercher le divin, pour devenir une idolâtrie d’elle-même et de ses dogmes. Hubris, arrogance démesurée d’une religion qui cesse d’essayer humblement de servir les Dieux pour se croire elle-même divine.
Au régal de Moloch
Punir de mort l’apostasie, en fait ou en droit, c’est offrir des sacrifices humains à Moloch. Aucun Etat ne devrait tolérer sur son sol une idéologie qui cautionne voire promeut une telle abomination, qui méprise à se point la dignité de ses sujets, de ses citoyens, de ses habitants, qui prétend ainsi régner sur l’intimité de leur être au mépris du moindre germe de liberté. Aucun Etat de devrait renoncer à employer à la fois le droit et la force, chaque fois que nécessaire, pour réprimer sans faiblir de telles idéologies. Ce qui refuse de reconnaître explicitement la liberté de conscience et donc le droit à l’apostasie ne doit jamais pouvoir bénéficier de la liberté de culte. Jamais. Et en France, tout prédicateur refusant d’affirmer publiquement le droit à l’apostasie des fidèles de sa religion, sans condition d’époque ni de nationalité ni de pays ni de circonstances, doit être considéré comme faisant activement la propagande d’une idéologie contraire à la Constitution, sanctionné en conséquence, et le groupe auquel il appartient dissout et interdit.
Aucun croyant ne devrait tolérer que l’on commette le crime abject de nier la conscience au nom de son ou de ses dieux. Il ne devrait avoir de cesse de l’empêcher, où que ce soit, dans son pays ou dans d’autres, s’il croit vraiment que ce qu’il vénère est digne de nom de « Dieu », car il n’y a pas pire blasphème, il n’y a pas pire impiété que de faire passer un dieu pour un monstre en se comportant en son nom comme s’il n’était qu’un fou mégalomane : c’est ce qui fait naître le cri de révolte de la conscience et de la vertu qui proclament « mieux vaudrait qu’il n’y ait aucun dieu que ce dieu-là ! »
Front de la foi
Et toutes les autres religions devraient s’unir pour rejeter et condamner sans la moindre ambiguïté une soi-disant « religion » interdisant l’apostasie par la menace, la contrainte ou la force, elles devraient s’unir pour affirmer clairement qu’il ne s’agit là que d’une secte indigne de nom de religion. Car enfin ! Si je crois sincèrement aux dieux qui sont les miens, alors je crois en eux, je crois qu’ils sont sages et nobles, qu’ils ne sont pas des tyrans capricieux et vaniteux, et je ne peux donc que respecter la liberté des apostats qui choisissent de quitter ma religion, même si je regrette et désapprouve leur décision. Mais si je crois sincèrement aux Dieux qui sont les miens, alors je crois aussi que toute secte persécutant « ses » apostats empêche ses adeptes de se tourner vers les Dieux véritables, et comment pourrais-je tolérer cela tout en prétendant les servir ? Une religion refusant de dénoncer et de condamner une secte qui criminalise l’apostasie trahit ses dieux, trahit toute véritable divinité, et trahit toutes celles et tous ceux qui voudraient simplement qu’on leur reconnaisse le droit de les prier.
Les apostats ne se contentent pas d’exercer la liberté de conscience, ils la démontrent. Ils prouvent, par leur simple existence, que la religion est un choix. Donc une responsabilité. Et que de cette responsabilité, il est légitime de demander des comptes. Nul ne peut choisir d’adhérer à une idéologie qui piétine la liberté de conscience et espérer ensuite que le reste du monde fasse comme si de rien n’était.
Défendre nos principes
Défendre les apostats quelles que soient les religions qu’ils ont quittées, et combattre les sectes qui les persécutent, est un devoir pour tout citoyen, pour tout croyant, pour tout être qui attache du prix à la vérité et donc au droit de rechercher la vérité. Défendre par le verbe, par l’engagement politique, par les soutiens apportés, mais aussi défendre en combattant, là aussi par le verbe, par le droit, et en exigeant de l’Etat qu’il utilise le monopole qu’il détient de la violence légitime pour combattre par la force, sous peine de perdre et ce monopole et sa légitimité. Faut-il donc que nous soyons devenus paresseux et lâches pour faire semblant de croire que des bougies et des peluches suffisent à barrer la route aux ambitions d’un totalitarisme théocratique !
L’apostasie, le courage de rejeter ce que l’on pense être faux pour se lancer en quête du Vrai, du Bon, du Beau, du Juste, le courage d’écouter honnêtement ce que l’on comprend de sa conscience et de ce que nous murmure le monde, malgré les doutes, les culpabilités, les peurs. C’est en réalité un hommage rendu aux dieux. C’est un acte de la conscience humaine aspirant à plus que des dogmes, un élan de l’âme refusant de s’incliner devant une idée du divin qu’elle juge indigne du divin. L’apostasie, même lorsqu’elle est le choix de l’athéisme, est une prière.
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