Députée trentenaire du Piémont (Turin), Augusta Montaruli est l’un des nouveaux visages de la droite italienne. Son parti Fratelli d’Italia, issu de la mouvance postfasciste, ne cesse de grimper dans les sondages (au-delà de 13%) grâce à la popularité de sa présidente Giorgia Meloni, en passe de concurrencer Matteo Salvini au centre-droit et de dépasser le Mouvement 5 étoiles comme troisième force politique italienne. Pour Causeur, Augusta Montaruli dresse un bilan d’étape de la lutte contre le Coronavirus dans la péninsule. Et tire la sonnette d’alarme : l’incivisme de certains de ses concitoyens risque d’aggraver la diffusion de l’épidémie. Toute ressemblance avec une contrée voisine… Entretien.
Daoud Boughezala. Vous êtes députée du Piémont. Quelle est la situation sanitaire de cette région frontalière de la France ?
Augusta Montaruli. D’abord, sans vouloir être alarmiste ni polémiquer, je voudrais dire que trop de monde circule toujours dans la rue malgré le confinement. Aujourd’hui, dans le Piémont, nous enregistrons pratiquement le même nombre de personnes infectées par le Coronavirus que la Vénétie il y a encore quelques semaines. Malheureusement, le Piémont compte 78 morts du Covid-19 de plus que la Vénétie (Ndlr : le 20 mars au soir, il y avait 131 morts du Corona en Vénétie sur 3461 cas positifs contre 209 sur 4031 cas positifs dans le Piémont. La Lombardie bat tous les records avec 22 264 cas positifs et 2549 morts). Avant-hier, le Piémont a obtenu le record d’hospitalisations en Italie, 340 de plus qu’en Lombardie. Hier, les hospitalisations n’ont diminué que parce que d’après les données récoltées, les sujets atteints semblent avoir été mises en quarantaine (1205 personnes en un jour !). La situation est encore plus préoccupante si l’on considère que la Vénétie a fabriqué 40 000 tests de dépistage de plus que le Piémont. Au risque de passer pour une casse-pieds aux yeux de mes amis comme de mes adversaires, je regrette que le Piémont n’ait pas été immédiatement déclaré zone à haut risque comme l’avait demandé le conseil régional. Je regrette qu’il n’y ait pas de fermeture totale, de contrôles dans les rues ni de dépistages de masse. A ceux qui parlent de nécessité économique, je répondrai que si nous continuons sur cette pente, nous subirons une lente agonie pire que la fermeture immédiate.
Avant même que le gouvernement italien n’impose un confinement à tout le pays, vous vous étiez imposé deux semaines de quarantaine à Turin. Pourquoi ?
Après que j’ai rencontré le président de la région Piémont Alberto Cirio (Ndlr : à la tête d’une coalition de centre-droit), il a été contrôlé positif au Coronavirus. Or, quiconque qui a été en contact avec une personne atteinte du virus doit s’imposer quatorze jours de confinement. Au terme de cette période, avec détermination, sans panique, je me remets au travail pour défendre Turin et l’Italie, chose que je peux faire y compris de ma fenêtre.
Que pensez-vous de la manière dont le gouvernement Conte a géré l’épidémie ?
A l’heure actuelle, je ne souhaite pas polémiquer. Je me contenterai de dire qu’une fermeture générale s’impose immédiatement.
Et de la part des régions du nord, Lombardie et Vénétie, d’où est partie l’épidémie en Italie ?
Les régions du Nord ont un système de santé meilleur que le sud pour diverses raisons. Au milieu de cette tragédie, heureusement que l’épidémie s’est d’abord diffusée dans le nord. Je n’ose imaginer dans quelle situation nous nous trouverions aujourd’hui si l’épidémie avait commencé dans le sud. Quand des restrictions les plus draconiennes ont été introduites, nous avons observé une ruée vers le sud. Je voudrais dire à ceux qui sont parti qu’ils ont mal agi. Ils ont fait du mal au sud du pays et portent la responsabilité d’y avoir apporté le risque épidémique. Ils nous ont fait mal parce qu’on n’abandonne pas la terre qui nous a offert des études, un horizon, du travail et de l’affection. En somme, ils ont fait du mal à l’Italie.
L’Italie est désormais considérée comme l’épicentre européen du Covid19. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
L’Italie s’en sortira la tête haute et plus fière que jamais. Contrairement à ce qui a été dit, nous ne sommes pas un pays-bouillon de culture du Coronavirus. Nous sommes la nation qui a transmis toutes les données sur le virus tandis que les experts affirment que la maladie est arrivée pour la première fois en Allemagne avant de se propager ici. Jusqu’à maintenant, nous attendons encore des explications sur la manière dont les contrôles ont été faits et comment les données sanitaires ont été récoltées dans le reste de l’Europe.
Savez-vous si la peur de la contagion a stoppé le flux de migrants qui entrent en Italie ?
Nous avons demandé les chiffres de l’immigration au gouvernement italien. En tout cas, nous espérons que le président du Conseil Conte gère l’immigration clandestine avec sévérité et sans angélisme mais cela n’est toujours pas le cas.
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