Circulaire Castaner sur la présentation des résultats des petites communes, alliances et projets grotesques pour conquérir Paris, majorité volatile… LR peut tirer parti de bien des micmacs. La droite va-t-elle profiter des municipales pour faire son grand retour ?
Chassez le naturel, il revient au galop. Après que l’exécutif a fait tant d’efforts depuis un an et demi pour se rapprocher de la « France périphérique » et remettre au goût du jour les corps intermédiaires, Christophe Castaner a entaché les élections municipales du 15 et du 22 mars par sa circulaire de décembre 2019 aux préfets, qui souhaite supprimer l’attribution des nuances politiques aux candidats élus dans les communes de moins de 9000 habitants. Si les votes sont contre vous, vous n’avez qu’à ignorer leur couleur ! Pas bête, il fallait y penser.
Pour ne rien arranger, la circulaire déroge à la règle selon laquelle une liste a la même couleur politique que sa tête de liste. Elle instaure à la place une catégorie « divers centre » dans laquelle rentrerait toute liste soutenue par la majorité présidentielle, sans que sa tête de liste ne lui appartienne. Pour être clair : une liste de droite portée par la droite mais ne serait-ce que soutenue par LREM rentrerait dans la catégorie « divers centre ».
Carte électorale: LREM à la manœuvre ?
Une tribune de 44 chercheurs en sciences politiques, signée dans le Monde du 26 janvier, proteste contre cette décision, qui change les règles de comptabilisation du rapport de forces politiques, au prétexte que les attributions politiques de la préfecture ne sont pas toujours adéquates avec les revendications du candidat.
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Consciente du vote citadin qu’elle attire – le RN a gagné les européennes sur le vote des communes de moins de 9000 habitants – la République en Marche s’adonne à des manœuvres peu flatteuses, dont la seule vocation est de limiter la trace que laissera sa déculottée annoncée sur la carte de l’hexagone. En privant 53% du corps électoral d’une information cruciale et d’une expression politique partisane, une partie de LREM se voile la face, à défaut de ne pas la perdre. Par cette circulaire injustifiable du point de vue de la science politique, Christophe Castaner invisibilise une partie de la France qui n’a pourtant cessé de se rappeler à son bon souvenir depuis le mouvement des « gilets jaunes ».
A Paris, LREM déraille, Rachida Dati fait une percée
A Paris, LREM n’en finit plus de ressembler à l’ancien monde : projets loufoques qui cachent des gouffres financiers, à l’instar du remplacement de la gare de l’Est par un Central Park parisien, jeu d’alliances sans fondement : rien de nouveau sous le soleil.
Le sondage Odoxa publié ce lundi confirme la tendance de ces derniers mois : au premier tour, Anne Hidalgo obtiendrait 23%, talonnée de près par Rachida Dati (20%), suivie de Benjamin Griveaux (16%), David Belliard (14,5%) et enfin Cédric Villani (10%). Même le ralliement de Pierre-Yves Bournazel (LR) à Griveaux n’a rien changé à la donne, alors ce dernier s’époumone pour faire revenir Villani, lequel souhaite un accord avec les Verts de Belliard, qui lui-même rejoindrait sûrement… Hidalgo au second tour !
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Au-dessus de ce micmac politique, Rachida Dati détonne dans le paysage parisien : élue de longue date, forte d’un bilan positif dans le 7ème arrondissement, son programme s’est construit sur des années et ses priorités se distinguent complètement de celles d’Anne Hidalgo, de Cédric Villani et de Benjamin Griveaux (qui se contentent d’une course effrénée à l’écologie ou d’une adhésion de dernière minute à la création d’une police municipale). Si sa forte personnalité lui a valu quelques résistances de la part de certains élus d’arrondissement, Rachida Dati a obtenu le soutien d’hommes politiques dont la verve et l’expérience ne sont plus à prouver et manquent au paysage politique actuel.
Le retour de la droite ?
Au niveau national, les Républicains sauvent l’honneur démocratique puisque deux élus LR de l’Ain ont demandé un jugement en référé de la circulaire Castaner devant le Conseil d’État, initiative saluée par les cadres de la droite, à l’instar de Damien Abad qui dénonce une « atteinte au droit à l’information et à la libre expression du suffrage ». Ainsi les Républicains reviennent dans le jeu politique, à Paris comme en province, sur fond de volatilité de la majorité.
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Cédric Villani demandait la semaine dernière dans une interview accordée au Point : « les Parisiens veulent-ils revenir au monde d’avant ? Celui de la gauche contre la droite ? » Il semblerait en effet que oui, Monsieur Villani !
La grande synthèse macronienne – qui rejette dans la case d’un irrationalisme crypto-fasciste toute contestation de la pensée « complexe » du président – a débouché depuis deux ans sur une sécession importante d’une partie de la population vis-à-vis de la démocratie représentative. Celle-ci doit reprendre des couleurs et en l’occurrence des couleurs politiques.
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