Les tracteurs sont de sortie lorsqu’un couple anichois se voit reprocher l’odeur et le bruit d’une porcherie. Les néoruraux sabotent toujours plus le fantasme vert d’ « élevage urbain ».
Après l’affaire du coq trop bruyant, le cochon puant. Le 26 novembre, le tribunal de Douai a condamné Nathalie et Romaric Delval, éleveurs dans la petite ville d’Aniche (Nord), à payer 58 700 euros à leurs voisins. En cause ? Leurs cochons grouinent un peu fort et émettent des odeurs douteuses, autrement dit des « nuisances sonores et olfactives ». Le couple avait déjà été condamné en 2017 à déplacer sa porcherie dans les quatre mois, avec une astreinte de 200 euros par jour de retard. Ce qu’ils ont fait, construisant un nouveau bâtiment pour 100 000 euros, mais en dépassant largement le délai. Résultat : comme le titre La Voix du Nord, leurs cochons les ont mis sur la paille.
Cependant, les agriculteurs d’Aniche ont pris fait et cause pour les Delval : une manifestation de soutien, qui a eu un certain écho médiatique, a vu défiler 115 tracteurs dans le centre-ville de Douai. Bingo ! La cagnotte Leetchi lancée pour payer les pénalités a recueilli plus de 25 000 euros. Face à la sévérité de la justice, l’opinion a pris le parti des paysans nourriciers contre les néo-ruraux ingrats. D’autant que ces derniers souhaitent faire construire des logements sur le terrain jouxtant la ferme… Or, loin d’être des croquants mal dégrossis, les Delval détiennent ce qu’ils appellent une « petite exploitation en milieu urbain ». Dans leur rue, s’étale une rangée de maisonnettes récentes en brique ou en béton propret, témoin de l’essor du marché immobilier local. En décembre, l’ancienne ville charbonnière a d’ailleurs été le théâtre d’une étrange affaire : un agriculteur qui voulait vendre ses terrains constructibles pour payer sa retraite protestait contre leur requalification en terres agricoles. En ces temps, pour la ville, de densification immobilière, le dernier rêve des écologistes qui consiste à installer partout des « élevages urbains » n’est donc pas près de se réaliser. Car malgré la popularité de nos amies les bêtes, les citadins n’ont pas envie d’aspirer à grandes goulées l’air fumeux d’une porcherie à chaque fois qu’ils ouvrent leurs fenêtres.
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