L’éditorial de novembre d’Elisabeth Lévy
C’est sans doute l’une des meilleures gagneuses de l’histoire de l’art, loin devant Olympia – et ne parlons pas des danseuses, baigneuses et autres pisseuses peintes par nos plus grands maîtres. La Joconde attire chaque jour 30 000 admirateurs, s’enorgueillissent les dirigeants du Louvre. En bons boutiquiers, ils ont fait leurs calculs et renoncé à faire figurer Mona Lisa dans l’« exposition-événement » consacrée à Léonard de Vinci qui, chaque jour, recevra « seulement » les 7 000 visiteurs qui auront dûment acheté leur billet à l’avance. Comment sait-on qu’un événement sera un événement avant qu’il ait eu lieu ? Parce que les gazettes l’annoncent, et que leurs prophéties sont, en l’espèce, autoréalisatrices : qui voudrait rater un événement ? Le public, encouragé par ce label, se précipite et la boucle est bouclée.
Il est communément admis que Vinci est, avec Mozart et Einstein, l’un des grands génies du dernier millénaire. Pour le coup, la main invisible de la gloire n’a pas épousé les caprices du marché, les rares œuvres
