Le régime des mollahs n’est pas seulement au cœur des tensions géopolitiques, de la Syrie au Yémen. La semaine dernière, trois femmes ont écopé de 55 ans d’emprisonnement pour avoir manifesté contre le port du foulard à Téhéran. On attend impatiemment les réactions de nos féministes.
Le 31 juillet 2019, le tribunal révolutionnaire de Téhéran a condamné trois manifestantes iraniennes à 55 années de prison cumulées. Leur crime ? Avoir participé au « White Wednesday », un mouvement pacifique contre le port obligatoire du voile islamique en Iran. Les manifestantes Mozhgan Keshavarz, Yasaman Ariani et la mère de cette dernière Monireh Arabshahi ont été condamnées à un total de 55 ans d’emprisonnement pour avoir participé au « White Wednesday ». Notons que le juge, Mohammad Moghiseh, a retenu trois motifs principaux pour justifier sa décision : organisation et conspiration mettant en péril la sécurité nationale, diffusion d’une propagande antiétatique, et association dans le but d’encourager la corruption et la prostitution.
Cinq ans de mobilisation
Quel est ce mouvement qui semble effrayer Téhéran ? L’embryon du White Wednesday a vu le jour en 2014, grâce à Masih Alinejad.
Islamic Republic must go. Iranian women are openly asking for a secular democratic government. https://t.co/Hoy5MoHTWC
— Masih Alinejad 🏳️ (@AlinejadMasih) August 6, 2019
Cette journaliste iranienne, actuellement réfugiée aux Etats-Unis, s’est servie de Facebook pour inciter ses compatriotes à poster des photos d’elles sans leurs hijabs, à l’aide de la page « My Stealthy Freedom ». A ce sujet, elle dira lors d’un débat sur CNN : « Vous ne pouvez pas considérer un vêtement qui, au Moyen-Orient, est le symbole le plus visible d’oppression (de la femme) comme un signe de résistance (aux Etats-Unis) ».
Quelques années plus tard en Iran, en 2017, naît à proprement parler le « White Wednesday », dans la lignée de Masih Alinejad, qui encourage les femmes à se libérer du voile islamique imposé dès leur plus jeune âge.
Le lancement du hashtag #WhiteWednesday accélère les choses, car, très vite, de nombreuses femmes découvrent leurs têtes sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram. Le combat se délocalise alors dans les espaces publics, ce qui amène plusieurs femmes à être arrêtées dans la rue après avoir brandi leur voile en signe de révolte. Mozhgan Keshavarz, Yasaman Ariani et Monireh Arabshahi sont les dernières à avoir été condamnées pour cet acte de défiance, étant jugée pour l’exemple par le juge Mohammed Moghiseh.
L’obéissance par la terreur
Mohammed Moghiseh n’en est pas à son premier coup d’essai : plus tôt cette année, il a condamné par contumace une avocate spécialisée en droits humains, Nasrin Sotoudeh, à 38 années d’emprisonnement et 148 coups de fouet, arguant de « conspiration contre le système ».
Bien sûr, il n’a pas été fait état des droits des détenues lors du procès. Non seulement leurs avocats n’ont pas pu participer aux audiences, l’urgence étant de faire appliquer la Charia et non de faire respecter le principe d’un procès équitable. Mais les conditions de détention des détenues sont désastreuses à l’intérieur de la prison de Qarchak, un établissement pénitencier tristement célèbre pour les traitements inhumains qu’il inflige à ses prisonnières.
Où sont les féministes ?
Pendant que de nombreuses iraniennes sont arrêtées et jetées en prison, une frange des féministes et progressistes occidentaux s’enfoncent dans leurs contradictions, en acceptant la promotion du voile en France et ailleurs. De surcroît, les Iraniennes n’ont pas le monopole de ce combat : en Algérie par exemple, un nombre considérable de femmes dénonce depuis quelque temps le port du hijab, qu’elles considèrent comme « une prison de tissu ».
Toujours habituées à dénoncer l’hypothétique oppression patriarcale de nos sociétés libérales et bourgeoises, nos féministes de troisième génération préfèrent ne pas écouter les avertissements de certaines personnalités comme la journaliste franco-marocaine Zineb El Rhazoui. Il faut bien avouer qu’entre le « manspreading », l’écriture inclusive et toutes les autres batailles prétendument avant-gardistes, il reste peu de place pour la défense des droits inaliénables de l’homme. Et, surtout, de la femme.
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