Jean Charbonnel est l’un des rares anciens ministres du général de Gaulle encore de ce monde. Et comme, de surcroît, il se définit comme un gaulliste de gauche, le livre d’entretiens qu’il publie avec Laurent de Boissieu, journaliste à La Croix et excellent connaisseur de l’histoire de la Ve République en général et des mouvements gaullistes en particulier, ne peut qu’intéresser tous ceux qui se réclament de ce double héritage.
Comme pour tous les membres de cette branche minoritaire, 1974 est une année-charnière. Jusque-là, ils sont pris en considération, notamment par le Général. Ensuite, cela devient beaucoup plus compliqué. Si Charbonnel ménage Giscard, il n’a pas de mots assez durs pour Jacques Chirac qu’il décrit, impitoyablement mais avec une certaine lucidité, comme le fossoyeur en chef du gaullisme.[access capability= »lire_inedits »] L’ancien maire de Brive en voulait tellement à Chirac qu’il a soutenu Barre en 1988, Balladur en 1995 et Sarkozy en 2007.
Aussi justifiées soient ses critiques, on peut se demander si cet anti-chiraquisme virulent suffisait à fonder une ligne politique. D’autant que Charbonnel n’a pas toujours fait preuve de la cohérence idéologique qui a fait défaut à Chirac.
Il peine à particulièrement convaincre lorsqu’il explique ses choix en matière européenne. Après avoir défendu Maastricht, il s’oppose au TCE pour, finalement, approuver le traité de Lisbonne ! Quand on ajoute qu’en 2002, il soutenait Jean-Pierre Chevènement, on se demande où est la logique de ce parcours.
Reste que la lecture de cet ouvrage est un passionnant voyage dans la politique française. De cela, il faut remercier Jean Charbonnel mais aussi Laurent de Boissieu, qui n’oublie aucune des questions que j’aurais voulu poser.
Jean Charbonnel et Laurent de Boissieu, Pour l’honneur du gaullisme, Contre-enquête sur un héritage, Editions Riveneuve.[/access]
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