Pour l’ancien PDG d’Elf, la croissance galopante du nombre d’humains est problématique. Bien que la fin du pétrole ne soit pas pour demain, la généralisation du mode de vie occidental exige des investissements colossaux dans les énergies alternatives.
Gil Mihaely. De l’avis quasi général, nous sommes en train de vivre un dérèglement climatique sévère, principalement dû à l’activité humaine. Nombre de scientifiques soutiennent que la planète risque de devenir difficilement habitable si rien n’est fait d’ici quelques décennies. Adhérez-vous à ce consensus ?
Loïk Le Floch-Prigent. Le lien de causalité entre les dérèglements climatiques et l’activité humaine n’est pas clairement démontré. Pour l’instant, on constate une corrélation qu’on n’arrive pas à expliquer de manière convaincante. Alors que l’attention générale se focalise sur les gaz à effet de serre émis par l’utilisation des énergies fossiles, je vois dans la démographie la première grande question écologique mondiale. En effet, la population mondiale a fortement augmenté au cours des deux derniers siècles : on est passé d’un à sept milliards d’individus, et on risque de monter à dix milliards. La planète est-elle capable de contenir autant d’individus qui aspirent tous au mode de vie des plus chanceux ? N’est-ce pas simplement cette surpopulation qui conduit aux changements ? Par ailleurs, il faut se demander si le réchauffement est vraiment un mal absolu. Après tout, la planète a connu des périodes de réchauffement sans pour autant disparaître.
A lire aussi: Réponse à ceux qui doutent du changement climatique
Sans doute, mais pas aussi rapides. Et il n’y avait pas toute une activité humaine à sauver…
Sur la rapidité du changement, on a tendance à confondre deux phénomènes. Le premier est le dérèglement conduisant à des catastrophes qui sont ressenties comme plus graves que par le passé dans un certain nombre de régions. Le second est lié à la fonte des glaciers, à l’augmentation du niveau de la mer et à la disparition annoncée d’un certain nombre de territoires. De ce point de vue, nous ne sommes pas dans une situation d’urgence absolue qui devrait nous faire oublier tout le reste : d’après les observations actuelles, la peur de voir des territoires envahis par les eaux demain n’est nullement fondée. Dire le contraire relève d’une manipulation des résultats scientifiques. En revanche, les phénomènes climatiques de dérèglement sont une véritable urgence. Mais, il faut y regarder de plus près, car le gaz carbonique (CO2) n’est pas l’unique élément dans l’équation. L’urbanisation – avec le béton et l’asphalte – et la déforestation (tous deux liés à la démographie galopante de l’humanité) devraient être prises en compte. En réalité, le nombre d’individus a augmenté de façon dramatique, ce qui a conduit à une urbanisation délirante et une augmentation générale de l’activité. C’est cette transformation-là qui est la cause de nos difficultés. La planète peut probablement
