C’est le tic de langage par excellence. Le virus « du coup » est partout. Dans toutes les phrases, dans toutes les bouches, et on ne s’en aperçoit même pas. Jusqu’à ce que…
Avez-vous remarqué que le virus le plus dévastateur du moment – il avait fait son apparition timidement il y a un ou deux ans déjà, puis il s’est propagé à grande vitesse, et il est désormais sur toutes les lèvres (l’invasion risque d’être totale et de toucher bientôt les perroquets et les mainates). Car c’est le réflexe le plus usité, la pollution du langage la mieux partagée, le recours systématique et la plupart du temps superflu numéro un, le gimmick que nous entendons le plus – pour peu qu’on y prête attention -, et cela devient alors insupportable, et j’en connais certains que j’ai alertés et qui le guettent désormais comme un gibier, en étant assez vite stupéfaits par sa prolifération. C’est donc un nuisible. Un virus, écrivais-je. Un vrai. Son nom ? – « Du coup ».
Du coup, du coup, du coup…
Oui ! Écoutez donc, autour de vous, dans la rue, dans les transports, écoutez vos amis, écoutez vos frères et sœurs, vos cousins, écoutez les commerçants, écoutez vos parents, écoutez les animateurs à la télé, écoutez chaque interviewé à la radio, écoutez les hommes et les femmes politiques. Personne n’y échappe, tout le monde est atteint du virus dukou. Écoutez-vous donc aussi… Vous allez vous surprendre à l’employer, vous en aurez même un peu honte, vous mettrez votre main sur la bouche, ooops, zut, moi aussi, je… « Du coup » se rencontre à tout bout de champ lexical.
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Faites donc, oui, l’expérience de guetter le virus dukou. Quelques heures suffisent pour y devenir allergique. Allergique à son emploi intempestif, incessant, ad nauseam, à sa répétition à l’envi, à son inutilité si parfaite, à sa manière inélégante de meubler une phrase, voire de la commencer, à sa façon peu accorte de ne pas dire, voire de ne rien dire, mais sans gêne pour autant.
On peut le remplacer par quoi, du coup ?
Mais alors, vous vous demandez déjà par quoi le remplacer, si tant est qu’il faille remplacer un virus. Par un autre ? – Certainement pas, de grâce ! Par quelques antidotes, synonymes et autres variantes plus heureuses, plus audibles, moins usitées peut-être. Pourquoi pas. Alors… Par quoi remplacer « du coup » ? – Cherchez, adaptez ! Par rien, d’abord. Oui, par rien. Par le silence, le soupir dans la diction, les points de suspension… Ou bien par de classiques « donc », « de fait », « de ce fait », « et alors », « à la suite de quoi », « à ce moment-là », « lors », « par conséquent », « en conséquence de quoi (ou pas de quoi, d’ailleurs) », « et soudain »… Vous voyez, il y a le choix.
Mais, franchement, vous je ne sais pas, mais moi, vu que je le guette, ce virus qui prolifère tant qu’il rendrait jaloux les sangliers, et qu’il finit par m’obséder comme une chanson dans la tête que l’on n’avait pas envie d’avoir dans la tête parce qu’on ne l’aime pas, en plus, cette chanson ringarde-là, je frôle l’overdose. Du coup, je cesse d’en parler, là.
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