Si François Hollande gagne l’élection présidentielle, un retour de Martine Aubry sur le devant de la scène est fort à craindre. Martine Aubry et son tropisme nordiste qui fait rêver. Martine Aubry et son papa (Jacques Delors). Martine Aubry et son autre papa (Pierre Mauroy). Martine Aubry et ses emplois jeunes aux libellés légendaires… Aidons donc Martine Aubry a bien réussir son retour aux affaires, en lui suggérant un « nouveau métier » inédit qui pourrait bien rencontrer un vif succès en temps de crise, et dont l’AFP nous apprend l’existence surréelle : celui d’« agent de portage ». Attention, là nous ne parlons pas des porteurs d’eau qui suivaient les aventuriers dans les jongles inexplorées, ni des porteurs de valises SNCF de jadis, qui aidaient les voyageurs à voyager, moyennant quelques anciens francs.
L’« agent de portage » c’est un tout autre univers. C’est un porteur de proximité, voire un porteur citoyen en zone urbaine. On apprend ainsi que la municipalité de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) a engagé quatre de ces sherpas postmodernes afin d’aider les habitants de la cité du Chêne-Pointu à remonter – dans les dix étages du bâtiment – courses, poussettes-avec-enfants et autres fardeaux du même acabit. La raison ? La condamnation des ascenseurs, fin janvier, pour des questions de sécurité liées à un défaut de maintenance. Dans cette copropriété à la dérive, 70% des familles vivent en-dessous du seuil de pauvreté. L’un des habitants, qui a déjà mis en œuvre un système de monte-charges artisanal avec cordes et poulies, pour déjouer les pannes à répétions des ascenseurs à l’abandon, souligne que « c’est un problème parmi d’autres ici ». Il y a eu récemment, en effet, une épidémie de tuberculose…
La municipalité nous rassure, cette mesure folklorique d’aide au franchissement de paliers, vise à « pallier l’urgence » et se veut temporaire. D’ailleurs le maire PS voit cette opération « agents de portages » post-nouveaux métiers comme une expérimentation, pour laquelle il a très sérieusement demandé un financement de l’État. « L’opération coûte 7.000 euros par mois à la ville, dit-il. Nous ne pourrons pas l’assumer seuls ». On ne peut s’empêcher, songeant à ces quatre créateurs professionnels de lien social en gilets fluo et aux mollets musclés, au mythique Sisyphe condamné à rouler éternellement un rocher en haut d’une colline, le laisser tomber, puis recommencer l’opération. Quand tous les ascenseurs de toutes les tours délabrées seront tombés en panne, l’« agent de portage » se généralisera t-il ? Les nouveaux métiers de Martine Aubry, dans les années 90, ne servaient pas à grand chose, mais pouvaient prêter à rire. Ceux de la nouvelle décennie seront peut-être moins drôles.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !