Le Musée d’art et d’histoire du judaïsme propose une exposition entière autour de Sigmund Freud. Si cet illustre athée viennois rejetait rites et croyances religieuses, la pensée et la culture juive ont profondément irrigué la psychanalyse dont il est le père. De Courbet à Kokoschka, le commissaire de l’exposition Jean Clair a habilement regroupé des centaines d’œuvres ayant inspiré la libido sciendi freudienne.
Alors que deux hommes aux mains gantées s’affairent avec mille précautions autour d’une grande caisse en bois, le silence se fait spontanément. Une dizaine de personnes, qui travaillent ce matin-là à l’accrochage de l’exposition « Freud : du regard à l’écoute », qui doit s’ouvrir quelques jours plus tard au Musée d’art et d’histoire du judaïsme (MAHJ), à Paris, semblent retenir leur souffle, saisies par la même émotion. Tout juste arrivé du musée d’Orsay, L’Origine du monde apparaît, splendide et scandaleuse. Le tableau peint par Gustave Courbet en 1866, que les agents manipulent avec une précision maniaque, pour le présenter à la petite assistance avant de la poser sur les tréteaux prévus à cet effet, fait l’effet d’un coup de poing dans le cœur. L’espace d’un instant, Jean Clair, commissaire de l’exposition, qui a vu et montré les plus grands chefs-d’œuvre de la peinture mondiale, semble comme retiré en lui-même. « Pour Freud, la vue des organes génitaux n’éveille pas d’émotion esthétique, car cette dernière naît précisément d’un détournement de la pulsion sexuelle vers d’autres buts », écrit Philippe Comar, le directeur des Beaux-Arts, qui est, avec la neurobiologiste Laura Bossi, l’un des deux conseillers scientifiques de Jean Clair dans le riche catalogue. « En somme, représentation des organes génitaux et œuvre d’art sont incompatibles », avance encore Comar, tout en concédant
