Emmanuel Macron menace de réformer la loi de 1905. Certains lobbyistes communautaires y gagneront mais le contrat social y perdra beaucoup. Tribune.
La loi de 1905 est une loi de « séparation DES églises et de l’Etat » et non séparation de l’Eglise et de l’Etat. Il est incroyable de constater le nombre de fois où cette erreur est commise dans les médias.
Précisons que la loi de 1905 porte la liberté absolue de conscience qui donne à chacun le droit de croire ou de ne pas croire. Elle assure la concorde et la paix en affirmant la primauté du commun dénominateur – la citoyenneté républicaine – sur n’importe quelle autre appartenance, empêchant ainsi de graves conflits au sein de la République.
Si le président de la République veut amender la loi de 1905, au risque d’en tuer l’esprit et la philosophie, c’est parce qu’en l’état, il ne peut comme il le souhaite, ni structurer les religions, ni contrôler leurs financements. Il ne peut pas non plus labelliser des associations cultuelles, c’est-à-dire décider de leur caractère religieux ou non.
Or le président de la République veut renouer le lien de l’État avec la religion et « redonner » à l’islam « sa place particulière » (en suivant les avis de l’Institut Montaigne et de Hakim El Karoui). Il s’agirait également de lutter contre l’islamisme et les dérives les plus mortifères d’un fondamentalisme musulman obscurantiste de type salafisto-wahhabite.
Qui serait contre ? Mais le gouvernement fait comme si la rhétorique évangéliste était anodine. Comme s’il n’était problématique qu’un texte religieux, « sacré » pour les pratiquants qui le citent comme référence absolue, tende à dominer toute autre législation, que dans le cas du Coran. Et s’il s’agit de la Bible, des Évangiles, de la Torah ou du Talmud ?
Réintroduire du religieux dans la République représente un énorme risque: celui de mettre à mal la loi républicaine commune à tous pour céder, par le biais des accommodements, aux règles particulières des religions. L’islam, religion non encore sécularisée n’ayant pas fait son aggiornamento comme l’Église catholique, est toujours régi par la Charia, placée par nombre de musulmans au-dessus des lois des pays où ils vivent.
Si le président de la République souhaite réguler les financements des mosquées afin de limiter l’influence des idéologies qu’elles diffusent, ce n’est pas la taxation des financements, très facile à déjouer pour des pays riches, qui pourra permettre d’atteindre cet objectif.
De plus, financer avec de l’argent public certains lieux de culte, fussent grâce à des subventions «destinées à améliorer les performances énergétiques» revient à subventionner le culte. Il est donc inutile de finasser, ce projet viole à deux titres l’article 2 de la loi de 1905 : il est interdit à l’Etat de subventionner des lieux de culte, et de privilégier une religion sur les autres.
Une loi mal comprise, mal respectée, mal transmise, ne peut être que déformée, dénigrée, méprisée, amendée, réformée, vidée de sa substantifique moelle. Cette loi n’est pas un « vieux totem »; elle est au contraire profondément émancipatrice.
Ces projets de modification de la loi de 1905 sont donc à plusieurs titres inacceptables et extrêmement dangereux.
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