Tous les champions n’entrent pas dans l’histoire. Les légendes ne se nourrissent pas seulement de chiffres abscons. L’histoire retient un style, un caractère, une attitude qui nous imposent un respect éternel.
Bartali, un résistant si discret
Face à Gino Bartali (1914-2000), l’émotion nous étreint. Les mots semblèrent tellement vains quand nous apprîmes que Gino le pieux, Gino le vieux, rouspéteur et splendide, dormant avec sa bicyclette et ne se séparant jamais de la médaille de la Madone avait caché de faux papiers d’identité dans la tige de sa selle, durant la Seconde Guerre mondiale. « Il mènera sa lutte contre la barbarie nazie en voyageant à vélo entre les différentes localités de l’Italie du centre et du nord » écrit Alberto Toscano dans L’incroyable destin du champion Gino Bartali (préface de Marek Halter) aux éditions Armand Colin. Gino, le juste fut si discret sur ses activités dans le réseau clandestin de résistance et sur son action personnelle dans le sauvetage et la protection des juifs italiens qu’il n’en parla jamais. C’est seulement après sa mort que le courage du « facteur » fut révélé et que ses admirateurs reconnurent en lui, bien plus qu’un vainqueur du Tour de France ou du Giro. En avril 2006, le président de la République italienne donna à son épouse Adriana, la médaille d’or du mérite civique. Et, en 2013, « les experts du Mémorial de Yad Vashem décident à leur tour de reconnaître officiellement le rôle de Gino Bartali pendant la guerre ».
Ce livre est aussi l’occasion de revenir sur la vraie fausse rivalité entre Coppi, le piémontais et Bartali, le toscan, le coco et le catho, deux ténébreux flamboyants, communiant la même religion celle du vélo et de l’effort. Malaparte avait déjà croqué les deux visages de cette Italie populaire dans un essai paru en 1947 et ressorti en 2007 chez Bernard Pascuito.
Un rugby de précision et d’attaque
Du cyclisme à l’ovalie, il n’y a qu’un coup d’accélérateur, qu’un jeu de jambes. Au même moment, sort en librairie un document exceptionnel qui retrace la carrière d’André Boniface, « le centre mythique » du stade Montois comme le souligne Olivier de Baillenx dans son ouvrage Boni’70, un printemps de rugby chez Atlantica. Ce spécialiste à la plume vive et à la documentation charpentée fait revivre la période démarrant à partir du printemps 1969 quand André accepte d’être l’entraîneur de l’équipe première des jaunes et noirs. La lecture du Temps des Boni de Denis Lalanne, notre maître à droper et à smasher, journaliste sportif et écrivain hussard, ami de Blondin, avait marqué notre adolescence. Baillenx, avec brio et l’appui de nombreux témoignages de joueurs de l’époque, se souvient d’André (aujourd’hui âgé de 83 ans), après la mort de son frère Guy, en 1968. Son retour sur les pelouses est une leçon de vie. Il va inculquer à toute une nouvelle génération, bien épaulé par le roc Dauga, un rugby du mouvement, aérien et chorégraphique, un rugby de précision et d’attaque, pas ce rugby fragmenté, toujours à l’arrêt que nous voyons trop souvent, un rugby de conquête et d’envie. « Et oui, le jeu, toujours. Le jeu des gamins qui courent dans la cour de récréation » avertit l’auteur. Avec ces deux légendes, le sport est toujours plus que du sport.
Un vélo contre la barbarie nazie, Alberto Toscano (Armand Colin, 2018)
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Boni’70, un printemps de rugby, Olivier de Baillenx (Atlantica, 2018)
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