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Justin Trudeau sait tout mieux que vous

Faux libéral, vrai moralisateur


Justin Trudeau sait tout mieux que vous
L'arroseur arrosé: Justin Trudeau a été accusé d'appropriation culturelle lors de son voyage en Inde, février 2018. SIPA. AP22169305_000001

Le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, est un faux libéral… mais un vrai moralisateur.


Le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, est présenté dans plusieurs médias du monde comme un bon libéral dont toutes les actions iraient dans le sens du progrès. Le charismatique politicien incarnerait le changement, l’ouverture et la tolérance. Le jeune héritier de son père serait cool, décontracté et permissif : la légalisation récente de la marijuana au Canada étant censée illustrer ce trait de personnalité. Plus encore, Trudeau serait le prophète d’un libéralisme naturellement accompagné du multiculturalisme.

La fascination pour ce personnage cache pourtant une réalité beaucoup moins rose. Depuis son élection en novembre 2015, Justin Trudeau affiche un tempérament dogmatique qui n’a rien de très libertaire. Le jeune hippie porteur de jeans multiplie les sermons sans aucune retenue. Moralisatrice, la politique de Trudeau n’a de libéral que son versant économique. L’idéologie de l’homme aux mille et une chaussettes est un mélange de mondialisme économique et de romantisme xénophile aux accents psychédéliques.

Trudeau dit comment penser, agir et parler

La controverse déclenchée récemment par le chef du gouvernement est symptomatique de cette pulsion doctrinaire propre aux nouveaux idéologues. Début février, le Premier ministre participait à une assemblée publique dans la ville d’Edmonton. Répondant à la question d’une jeune femme ayant employé le mot « mankind », Trudeau dira préférer celui de « peoplekind », un néologisme jugé plus inclusif, déclenchant alors les applaudissements d’un public acquis aux idéaux du néo-féminisme. Peut-être faudrait-il aussi supprimer le mot man du mot woman ?

La controverse a tellement fait réagir sur les réseaux sociaux que le principal intéressé a été forcé de revenir sur ses propos en déclarant, de manière hypocrite, qu’il s’agissait d’une blague. Comble de l’ironie, certains milieux féministes accuseront même le Premier ministre de s’adonner au « mansplaining », une pratique qui consisterait, chez les promoteurs actifs de la « culture du viol », à reprendre inutilement une femme par sentiment de supériorité. Adieu les professeurs masculins. Voici Justin Trudeau, l’arroseur arrosé.

Le libéralisme illibéral

Ceci étant, si Trudeau disait déjà à ses sujets comment penser et agir, voilà qu’il leur dit aussi comment parler, signe évident de la radicalisation de son idéologie. Quand le petit prince canadien ne dit pas au peuple qu’il gouverne comment se comporter avec les saintes minorités, il lui fait un procès d’intention. Trudeau ne croit pas au libéralisme politique : selon lui, la population n’est pas composée d’individus libres et éclairés capables de vivre en société, mais d’un agrégat d’ignorants aux innombrables phobies. La populace aurait besoin d’un sauveur pour la mener jusqu’à sa rédemption.

A lire aussi: Immigration: les Canadiens ne sont pas Justin Trudeau

Le caractère liberticide du programme de Trudeau apparaît de manière encore plus nette lorsque ce dernier encourage tacitement la censure et le révisionnisme historique. Au nom d’un vivre-ensemble tout programmé d’avance et non ancré dans la réalité, il faudrait passer sous silence les pratiques religieuses qui remettent en question la légitimité même du libéralisme. Au nom de la lutte contre la discrimination, on encourage subtilement à déboulonner les statues des grands hommes qui ont contribué à implanter l’État de droit dans le Nouveau Monde. L’idéologie dominante empêche aussi des enseignants d’aborder des sujets devenus tabous, comme le montre un récent rapport au Québec.

Laisser-faire économique mais interventionnisme moral

Le vrai libéralisme politique consiste à faire abstraction de certaines identités culturelles et non à les exalter dans un esprit fantaisiste qui rappelle le mythe du bon sauvage. Un vrai libéralisme n’appliquerait peut-être pas une laïcité très stricte dans les pays anglo-saxons comme le Canada qui ne connaissent pas cette tradition. Cependant, un tel régime ne s’emploierait certainement pas plus, en contrepartie, à faire la promotion de cultures étrangères mythifiées qu’il faudrait supposément préserver dans toute leur pureté. Un tel régime ne dicterait pas non plus aux gens comment concevoir les rapports entre les sexes.

Le Canada de Trudeau n’est pas l’eldorado libéral qu’on nous présente. Dans ce pays, il est paradoxal de voir coexister le laisser-faire économique avec ce genre inédit d’interventionnisme moral. Les sociétés libres reposent sur l’idée que les individus qui la composent sont capables de faire preuve de jugement. Ce n’est pas sous la contrainte vertueuse que la population canadienne deviendra plus réceptive aux rêveries de son dirigeant actuel.

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Auteur et journaliste. Rédacteur en chef de Libre Média. Derniers livres parus: Un Québécois à Mexico (L'Harmattan, 2021) et La Face cachée du multiculturalisme (Éd. du Cerf, 2018).

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