Des cages d’escaliers sans fin, des lianes et des fougères envahissantes et l’atelier du maître comme point de fuite: une expo Sam Szafran, ça ne se rate pas. Jusqu’au 3 mars, la galerie parisienne Claude Bernard montre des oeuvres de ce figuratif radical, rescapé des rafles antijuives, qui a roulé sa bosse de son Paname natal à l’Australie avant de poser ses guêtres d’ermite à Malakoff.
Sam Szafran n’aime pas quitter son atelier de Malakoff. Il sort peu, reçoit moins encore. En règle générale, il n’assiste même pas aux vernissages de ses propres expositions. On lui prête un caractère difficile, imprévisible, atrabilaire, voire misanthrope. Il vit enfermé dans cet endroit depuis 1974. C’est une sorte de retraite. On pourrait presque parler de clôture, au sens monacal, si sa femme, Lilette, ne partageait pas son isolement. Le bâtiment est une ancienne usine de métallerie dotée de verrières. L’espace est envahi par des lianes que l’on dénomme usuellement philodendrons, bien que ce terme soit impropre en matière de botanique. Il s’agit de plantes communes dans les appartements, mais qui peuvent, si les conditions s’y prêtent, se développer dans des proportions gigantesques. L’endroit ressemble à une très vieille serre tropicale où la végétation aurait pris le dessus.
On voit aussi du matériel. On est surtout frappé par des alignements de bâtonnets de pastels rangés dans de vastes casiers. Chacun est d’une couleur différente et aucune nuance ne manque. L’artiste peut solliciter tel ou tel stick à la façon d’un organiste appuyant sur une touche pour produire une note. Sam Szafran a également à sa disposition des produits à aquarelle et des papiers à son goût. Cet artiste ne s’exprime en effet que sur papier et prête à ses feuilles la sensualité d’une sorte de peau. Enfin, un grand poêle en fonte trône au milieu, comme dans les ateliers d’antan. Cependant, ce qui domine, c’est bien la végétation, luxuriante, entrelacée, envahissante, démesurée.
Sam Szafran le survivant
Cet univers étrange est l’unique sujet d’inspiration de Sam Szafran depuis une quinzaine d’années. On voit invariablement dans ses œuvres ces plantes dessinées feuille à feuille,
