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Ploërmel: le Conseil d’Etat a bien fait de se prononcer contre la croix


Ploërmel: le Conseil d’Etat a bien fait de se prononcer contre la croix
Deux habitants manifestent contre l'érection d'une croix au-dessus de la statue de Jean-Paul II de Ploërmel en 2006. SIPA. 00537705_000019

Au regard de la loi sur la laïcité, le Conseil d’Etat ne pouvait pas laisser en place la croix de Ploërmel. A l’heure de lutter contre l’islamisme, il n’est de toute façon pas souhaitable de faire des « accommodements raisonnables ».


Le Conseil d’État, vient une nouvelle fois de prendre une décision qui a suscité une certaine émotion chez les catholiques. Par un arrêt en date du 25 octobre dernier, il a donné injonction à la commune de Ploërmel de retirer la croix installée au-dessus d’une statue du pape Jean-Paul II. En ces temps de combats furieux sur les questions de laïcité, la décision a été perçue, à la fois comme une injustice mais aussi comme une avanie par une communauté catholique qui se sent maltraitée au regard des complaisances dont bénéficie incontestablement l’islam intégriste. On a donc vu fleurir un tas de commentaires courroucés dans les médias, et les réseaux ont pris le relais avec, comme d’habitude, le hashtag qui tue. Cette fois-ci ce sera #montretacroix pour accompagner un déferlement de photos et de commentaires marqués par la plus grande confusion.

#démontetacroix

Sur Causeur.fr, mon confrère et collègue Pierrick Gardien a, en termes sévères, critiqué la décision de la haute juridiction, la trouvant « pour le moins discutable » et se demandant si celle-ci n’avait pas à cette occasion fait du zèle. Pour ma part, je considère que le Conseil d’État ne pouvait statuer autrement. Et qu’il lui est fait là, pour une fois, une mauvaise querelle.

Revenons rapidement sur les faits tels que l’on peut les connaître aujourd’hui. Un artiste russe Zurab Tsereteli a offert à la commune de Ploërmel une statue en pied du pape Jean-Paul II. Le maire en exercice a soumis au conseil municipal, « une délibération du 28 octobre 2006 qui avait exclusivement pour objet l’acceptation, par la commune, d’un don de M. R… portant sur une statue représentant le pape Jean-Paul II en vue de son installation sur la place éponyme de la commune ». C’est postérieurement qu’a été prise la décision d’installer cette statue sous une arche surmontée d’une croix. Six ans plus tard, des laïcards obtus qui, un siècle après la loi sur la séparation des Eglises et de l’État continuent à bouffer du curé, se sont réveillés et ont considéré qu’il y avait là un spectacle insupportable. Le tribunal administratif de Rennes leur a donné raison et la Cour d’appel de Nantes tort.

Pas de prescription

Pour critiquer la décision du Conseil d’État, Pierrick Gardien a avancé plusieurs arguments. Tout d’abord que l’ensemble statue – Croix était artistiquement indissociable. Et qu’il fallait donc apprécier le monument dans sa globalité. C’est tout simplement erroné, la statue seule a été donnée à la commune et c’est celle-ci qui a décidé de la compléter de cette façon. Le droit moral de l’artiste ne porte bien évidemment que sur la statue elle-même.

On reproche ensuite au Conseil d’État de n’avoir pas considéré que, six ans après, la délibération d’acceptation du don était définitive et inattaquable, les délais de recours étant échus. C’était d’ailleurs l’argument retenu par la Cour administrative d’appel de Nantes pour déclarer irrecevable la demande de nos duettistes laïcards. Or, fort justement, la haute juridiction a constaté qu’il y avait eu deux décisions distinctes : celle du conseil municipal du 28 octobre 2006, mais également, et c’est là l’essentiel, une autre, prise en dehors de tout formalisme, visant à installer l’arche et la croix au-dessus de la statue. Et pour celle-là, les délais n’étaient pas échus, parce que n’avaient pas été réalisées les formalités de publicité qui s’imposent à toute décision administrative pour être exécutoire et pour faire courir les délais de recours. Malicieusement, mon confrère fait appel au bon sens et nous dit : «Pour qui a suivi ce raisonnement juridique alambiqué, la contorsion est grossière : comment le maire de Ploërmel aurait-il pu publier une décision qui n’existe pas ? » Eh bien non, il n’y a pas de contorsion grossière, ni raisonnement alambiqué. Simplement l’application de ce que l’on appelle précisément « la théorie de l’acte inexistant » que les juridictions administratives utilisent depuis fort longtemps ! La décision existe factuellement, mais elle n’a pas « d’existence administrative régulière ». C’est la raison pour laquelle on peut l’attaquer à tout moment.

1905-2017, même combat

Voilà ce que nous dit de façon difficilement réfutable le Conseil d’État : «Toutefois, il ressort également des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la délibération du 28 octobre 2006 avait exclusivement pour objet l’acceptation, par la commune, d’un don de M. R… portant sur une statue représentant le pape Jean-Paul II en vue de son installation sur la place éponyme de la commune et ne comportait aucun élément relatif à l’arche et à la croix de grande dimension, distinctes de la statue et installées en surplomb de celle-ci. L’installation, au-dessus de la statue, d’une arche et d’une croix doit ainsi être regardée comme révélant l’existence d’une décision du maire de la commune distincte de la délibération du 28 octobre 2006 ».

Bien sûr que la décision du maire existait, puisque l’arche et la croix ont été édifiées aux frais de la commune. Elle était grossièrement irrégulière dans la mesure où elle n’était pas le fruit d’une décision formalisée de la commune opposable aux tiers, et surtout constituait une violation évidente de l’article 28 de la loi de 1905 dont il faut rappeler les termes : « Il est interdit, à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires ainsi que des musées ou expositions ».

Ne pas créer de précédents pour les islamistes

C’est la raison pour laquelle la mobilisation autour de l’affaire de Ploërmel est une mauvaise cause. Et ce n’est pas une bonne idée d’invoquer « les racines chrétiennes de la France » ou de tout mélanger en invoquant les foucades de Georges Frêche à Montpellier, ou les obscénités que les escrocs de « l’art » contemporain s’ingénient à installer dans l’espace public.

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En ces temps difficiles où le combat pour la laïcité, qui concerne d’abord l’islam intégriste, n’est pas facile à mener, pourquoi créer des précédents et réclamer ainsi pour les chrétiens des « accommodements raisonnables » en essayant de contourner la loi ? Alors qu’il est essentiel justement de les refuser et de les combattre fermement dès lors qu’ils émanent du salafisme ou du wahhabisme. Pour ne prendre que cet exemple, les prières de rue de Clichy-sous-bois où l’on psalmodie des sourates meurtrières contre les mécréants bénéficient d’un laxisme insupportable de l’État. Les territoires perdus, ces petits califats qui ont fait sécession, sont le fruit de la démission des autorités publiques. C’est justement en étant rigoureux sur les principes, et en étant cohérent que l’on pourra mener ces indispensables combats.



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