Malgré ses erreurs politiques en série, Trump reste l’idole des 50% d’Américains qui l’ont élu. Pour les petits Blancs, le président est encore et toujours le rempart contre le déclassement, le multiculturalisme et l’arrogance des élites.
L’Amérique de Donald Trump ! Cette formule répétée avec effroi depuis près d’un an maintenant est porteuse de deux significations. Tout d’abord, elle peut faire référence à ce que deviendront les États-Unis sous la présidence de Trump : on imagine une Amérique à la fois belliqueuse et erratique sur le plan international, et qui serait traversée en interne par des lézardes sociales et raciales dégénérant jusqu’à une violence urbaine de plus en plus normalisée. En résumé, l’Amérique, autrefois hégémonique et aujourd’hui secouée par l’émergence d’un monde multipolaire qu’elle ne domine plus, se serait donné un président volontariste prétendant renverser le sens de l’histoire, mais dont les gesticulations pathétiques l’enfonceraient plutôt dans la décadence.
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Mais cette expression peut aussi désigner plus particulièrement la part de l’Amérique qui s’est reconnue dans la campagne de Trump et qui, encore aujourd’hui, le soutient de manière presque inconditionnelle, malgré la campagne de presse quasi permanente dont il est la cible. Autrement dit, on parle de cette frange de l’Amérique en situation d’insurrection et qui continue de voir en Trump l’homme capable de faire écho à sa révolte, à la manière d’un dissident venu de l’overclass, prêt à mener une nouvelle guerre des classes. C’est cette deuxième signification qui m’intéressera ici.
Le président d’un « rassemblement de paumés » ?
Dans les dernières semaines de la campagne présidentielle de 2016, Hilary Clinton avait elle-même fait un portrait au vitriol des soutiens de son adversaire, en les réduisant à un « rassemblement de paumés » (a basket of deplorables). En clair, Trump séduisait et mobilisait la lie de la société américaine avec un discours radicalement anxiogène. De fait, Trump avait reçu l’appui de l’extrême droite américaine, mais il fallait être de mauvaise foi pour faire de ces soutiens surexposés par le système médiatique le cœur de son électorat, qui a largement débordé la base traditionnelle républicaine. Trump était davantage le candidat des indépendants que des représentants du conservatisme officiel, qui l’accusèrent de s’éloigner des axes traditionnels de la politique républicaine, qu’il s’agisse de la diplomatie « impériale » au service de la « démocratie », de la critique du big government ou de la promotion de l’économie de marché. Au contraire, Trump proposait une forme de retour au réalisme diplomatique et prétendait servir
