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Indonésie: tromperie voilée

Le niqab préserve la « pudeur » des femmes, et l’identité des escrocs


Le port du niqab sert-il toujours à protéger la pudeur des femmes ? Comme beaucoup de jeunes Indonésiens de son âge, AK (dans la presse il n’a été identifié que par ses initiales), 26 ans, est un habitué des sites de rencontre. Sur l’un d’eux, il a noué une relation avec une jeune fille de son âge. Les deux tourtereaux ont fini par se rencontrer sous le regard de Cupidon. Portant le niqab, Adinda Kanza s’est présentée à lui comme musulmane pratiquante, ce qui est loin de déranger le jeune amoureux qui considère ce vêtement traditionnel « comme un signe de dévotion à l’islam ».

Après un an d’échanges respectant les règles du prophète Mahomet, le couple a décidé de se marier. La promise, prétendant être sans famille, a opté pour une simple cérémonie organisée chez AK après qu’elle a apporté une dot de cinq grammes d’or. Cependant, une douzaine de jours après leur mariage, AK a commencé à nourrir des soupçons. Son épouse refusant ostensiblement de quitter son niqab à la maison ou d’avoir tout contact sexuel sous divers prétextes fallacieux, il a fini par enquêter et découvrir l’impensable. Les parents de son épouse étaient bien vivants, en bonne santé, et n’étaient pas au courant de ce mariage. Pire encore, AK est tombé des nues lorsque ceux-ci lui ont révélé que celle qu’il avait épousée était en réalité un homme, se travestissant depuis quatre ans. La police a immédiatement placé en détention la fausse jeune femme, en expliquant que cette dernière avait tout planifié pour voler les biens de son époux. Son imposture était facilitée par sa voix aiguë et, surtout une fois maquillé, des traits du visage remarquablement féminins. Inculpé(e) pour fraude, elle/il risque jusqu’à quatre ans de prison.

Le port du niqab, qui n’est pas traditionnel en Indonésie, y connaît une popularité croissante que même la leçon de l’histoire d’AK ne freinera pas.

Euro: l’invincible Espagne, l’affligeante France

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Le vainqueur de l’Euro 2024 avait l’équipe offrant le jeu le plus séduisant. La France, elle, si elle a réalisé un parcours qui n’est pas honteux durant la compétition, a surtout brillé par… son impuissance à marquer.


L’Espagne, qui a remporté dimanche pour la 4ème fois de son histoire le titre européen – un record dont elle est l’unique détentrice – a confirmé qu’elle était bel et bien « l’invincible sélection » de cet Euro 2004 allemand. Elle s’est imposée magistralement par 2 à 1 à une Angleterre laborieuse qui, convient-il de le reconnaître, a manqué toutefois d’un tout petit peu de réussite dans les dernières minutes. Elle a raté l’égalisation grâce à une tête ibérique qui a coupé miraculeusement, pile-poil sur la ligne de but, la trajectoire du ballon qui allait au fond des filets. La chance n’est pas forcément injuste. Il lui arrive d’accourir à la rescousse à ceux qui la méritent. Ce fut le cas.

C’est qui les plus forts ? Évidemment c’est les Ibères

« La meilleure équipe », a en effet convenu l’entraîneur anglais, Gareth Southgate. « Sa victoire est méritée », a-t-il ajouté.  La presse française, qui déjà avait fait l’éloge dithyrambique des hispaniques lorsqu’ils avaient éliminé les Bleus en demi-finale n’a pas été avare en louanges. Des « intouchables », a proclamé péremptoirement L’Equipe ; une victoire qui ne souffre « aucune contestation », a estimé Le Figaro ; la sélection « la plus complète, la plus belle à voir jouer » a surenchéri Le Parisien ; « la plus séduisante » a reconnu Le Monde ; même son de cloche dans la presse régionale.

On ne peut pas en dire autant des Bleus, les vice-champions du monde. Se faire sortir en demi-finale par l’invincible Espagne n’aurait rien eu de déshonorant et frustrant s’il n’y avait pas un si… À savoir qu’ils étaient arrivés à ce stade du tournoi sans marquer un seul but en plein cours du jeu. Jusqu’à Randal Kolo Muani, sur un centre de Mbappé, n’ouvre le score à la 9ème minute d’un magistral coup de tête et ne mette un terme à cette affligeante stérilité, ils n’avaient à leur actif qu’un penalty et deux buts contre leur camp que leur avaient concédés leurs adversaires… Et en 8ème, ils s’étaient imposés face au Portugal aux tirs au but. En réalité, cette réalisation de Kolo Miani ne fut qu’illusoire. Dès la remise en jeu, l’équipe de France renouait avec sa chronique impuissance à marquer.

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Dix minutes s’étaient à peine écoulées que le jeune prodige de la Roja, Lamine Yamal, pas encore 17 ans, portait l’estocade. D’un coup de pied magistral des 25 mètres, il envoyait en passant par la lucarne le ballon au fond des filets tricolores. Tous les commentateurs l’ont qualifié de « plus beau but du tournoi ». À peine quatre minutes plus tard, c’était « el descabello », le coup de grâce… le ballon se retrouvait au fond des mêmes filets français…

La réussite de la Roja n’est pas seulement imputable aux prouesses de ses deux prodiges, Lamine Yamal (17 ans le jour de la finale, donc), d’origine marocaine, et Nico Williams (22 ans), lui d’origine ghanéenne, et paradoxe respectivement joueurs, au FC Barcelone et à l’Athletic Bilbao, clubs fanions de deux provinces, la Catalogne et le Pays basque, qui revendiquent leur indépendance, ni à la pertinence de son sélectionneur, Luis de la Fuente, qui jusqu’à maintenant n’avait entraîné que les sélections de moins de 20 ans.

Le jeu des Espagnols, qui implique une grande cohésion entre joueurs, repose sur de courtes et usantes passes, sur une possession jalouse du ballon. Ce jeu n’est pas sans une similitude certaine avec l’art tauromachique qui consiste à prendre l’ascendant sur le taureau par des séries d’arabesques que le matador dessine avec sa cape. Et quand l’animal ne sait plus très bien où il en est, on lui porte l’estocade. Résultat, la Roja a gagné tous ses matchs.

Face à elle « tout est allé trop vite pour une équipe de France dont le socle défensif a craqué », avait estimé Le Monde. Car, selon Le Figaro, l’Espagne était « plus créative, plus brillante, plus culottée, plus talentueuse. »

La star Mbappé passe à côté de la compétition, Olivier Giroud… aussi

Qu’est-ce qui peut expliquer que la France a été l’ombre de ce qu’elle fut au Mondial au Qatar face à l’Argentine ? Seul Le Figaro a osé briser une omerta en posant une question que l’ensemble de la presse a éludée : que s’est-il passé avec Olivier Giroud ? Jusqu’à la demi-finale, la moyenne de temps de jeu de ce dernier n’avait été que de neuf minutes par rencontre… Alors, pourquoi Deschamps l’a sélectionné si c’était pour ne pas le faire jouer ?

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 « En voulant axer toutes ses forces sur Mbappé, jamais au niveau durant l’Euro (…), Deschamps s’est raté », a insisté Le Figaro, sous la plume de ses deux chroniqueurs, Baptiste Desprez et Christophe Remise. Dans leur article de jeudi, intitulé « Tout ce qui a (vraiment) manqué aux Bleus dans l’Euro », ils enfoncent le clou. « Autre élément en sa défaveur, la mise au ban d’Olivier Giroud. Au regard des performances très faibles de Marcus Thuram et inégales de Randal Kolo Muani, l’expérience et l’efficacité dans la surface du meilleur buteur de l’histoire de la sélection auraient mérité plus de considération ». On peut ajouter qu’il aurait été plus approprié et judicieux que Thuram et Mbappé se préoccupent davantage de mettre le ballon dans la cage adverse que de chercher à infléchir le choix du bulletin que les électeurs envisageaient de glisser dans l’urne, en somme de jouer au foot et non les consciences.  « Ce déclassement », comme l’a qualifié Le Figaro, la mise à l’écart du meilleur buteur de l’équipe de France (57 buts en 136 matchs), soulève en conséquence une autre question : celui-ci aurait-il un mobile extra-sportif ? Une explication s’impose !

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De l’intérêt de lire Edith Wharton cet été

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La romancière de la haute-société new-yorkaise (1862-1937) nous laisse trois chefs-d’œuvre à découvrir : Chez les heureux du monde, Le temps de l’innocence et Ethan Frome.


Edith Wharton connaît une nouvelle jeunesse. Posées sur les étals des librairies, ses Chroniques de New York, rééditées récemment par Gallimard (coll. Quarto), en imposent aux côtés des livres contemporains… et leurs 200 pages, préface comprise. Le roman le plus connu de l’auteur, Le temps de l’innocence, publié en 1920, est quant à lui au programme des Classes Préparatoires aux Grandes Écoles scientifiques pour l’année 2024-2025. Il existe, en réalité, bien des raisons de découvrir le travail de la première femme à avoir remporté le très convoité prix Pulitzer.


Lire un grand auteur, c’est toujours se plonger dans un monde, c’est-à-dire la combinaison d’un espace géographique, d’une époque, d’un milieu social et familial : l’univers d’Edith Wharton n’a rien des bas-fonds londoniens de Jack London, ni du Berry champêtre de George Sand ; il n’a rien non plus du New York psychotique de Bret Easton Ellis, énigmatique de Paul Auster ou débauché de Salinger ; non, le New York de Wharton est celui de la haute société du début de XXe siècle dont aucun grain de sable ne semble pouvoir venir enrayer la mécanique lampedusienne du « changement pour que rien ne change ».

Apparences

C’est donc au cœur de ce monde trop ordonné qu’apparaissent des personnages déstabilisateurs – disruptifs, dirait-on aujourd’hui -, de façon furtive comme pour finalement mieux asseoir toutes les pesanteurs : c’est le cas de Lily Bart dans le roman Chez les heureux du monde et d’Ellen Olenska dans Le temps de l’innocence, interprétée par Michelle Pfeiffer dans la magistrale adaptation cinématographique de Martin Scorsese au début des années 90. À la fin, les apparences sont sauvées, à peine le vernis a-t-il craquelé ; rien, si ce n’est dans les cœurs, ne s’en est trouvé durablement bouleversé ; et les nouveaux riches sont toujours aussi fortunés. La romancière elle-même navigua dans ce milieu, femme d’affaires redoutable et conservatrice qui ne manqua pas néanmoins de divorcer d’un mari peu au fait des choses de l’amour, encore moins de la fidélité.

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Lire Edith Wharton, en été de surcroît, c’est profiter du plaisir de la lecture, quand on est épuisé par les émissions littéraires, leurs commentateurs et leurs invités dont les péroraisons, si elles valent mieux que celles des plateaux sportifs, n’en demeurent pas moins souvent soporifiques à force d’être mielleuses et moralisatrices, ou quand on se lasse des poncifs associés aux livres – la « petite musique » de l’un, le « pastoralisme » de l’autre – et des débats répétitifs – « faut-il séparer l’œuvre de son auteur ? »

Enterrée en France

Ernst Jünger se demandait à juste titre si l’on finirait par distinguer, à la fin de son siècle – le XXe -, deux classes d’hommes, les uns formés par la télévision, les autres par la lecture. On pourrait ajouter qu’avec le nouveau millénaire, une troisième catégorie d’hommes a fait son apparition : ceux qui sont biberonnés aux réseaux sociaux. À l’époque d’Edith Wharton, ceux-ci n’existaient pas. Dès lors, tout est dans l’écriture, c’est-à-dire dans le style et donc la description des personnages, des lieux, des émotions, dans les dits et non-dits, dans le vocabulaire, autant d’élégances qu’oublie pléthore d’écrivains actuels.

Le monde d’Edith Wharton ne se limite pas aux gazons d’émeraude bordés de géraniums et de coléus, ni aux loges rouges et or de l’opéra de New York où se presse la haute société. Et s’il fallait finir de se convaincre de lire l’écrivain, soulignons donc son rapport à un autre univers : la France. Elle fut introduite dans les cercles littéraires français par Paul Bourget, auteur d’Un crime d’amour, et se lia à d’autres écrivains de son temps, dont Anna de Noailles et André Gide. Elle commença à rédiger Ethan Frome dans la langue de Molière. Signe qui ne trompe pas, celle qui logea une décennie durant rue de Varenne repose aujourd’hui à Versailles.

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Trump: petit cours de journalisme politiquement correct

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Breaking news. Tentative d’assassinat, pendant la campagne électorale américaine. Mince… ce n’est pas le candidat espéré par les journalistes qui était visé.


Vous êtes journaliste ou aspirez à le devenir. Désireux de faire une belle carrière, vous êtes bien conscient de devoir vous aligner le plus servilement possible sur le politiquement correct. Afin d’illustrer ce propos, je me permets de vous proposer ce qui suit.

Imaginons que, lors de la campagne électorale des présidentielles aux États-Unis, l’un des deux candidats se trouve blessé par balle au cours d’un meeting en plein air. Blessure assez légère fort heureusement, cependant la volonté de donner la mort ne fait aucun doute et la qualification de tentative d’assassinat s’impose à tous, adversaires politiques comme partisans.

Deux cas de figure vous sont dès lors proposés.

Premier cas : le candidat visé et blessé est Républicain, donc classé, ou plutôt – politiquement correct oblige – relégué à droite. Appelons-le Donald T.

Devant ce fait d’actualité, ce que à quoi vous devez vous attacher est très clair : focaliser votre article, vos interviews, vos plateaux TV sur le seul sujet des règles de sécurité, de protection et leur mise en œuvre dans cette circonstance. Rien d’autre que la sécurité, cela est essentiel. Y avait-il assez d’agents secrets et non-secrets ? Sont-ils bien formés, après tout ? La position du tireur d’élite couché est-elle la bonne? Le fusil d’assaut sur un trépied est-elle la configuration prévue par le manuel ? Pourquoi l’exfiltration du blessé a-t-elle pris trois minutes et quarante-huit secondes alors qu’elle aurait dû s’effectuer en trois minutes et quarante-cinq secondes ? Pourquoi est-ce la portière arrière de ce côté qu’on a ouverte, et pas l’autre ? Enfin, vous voyez, vous croulez sur les points exploitables. Vous vous en remettez évidemment à l’avis d’experts-spécialistes et de spécialistes-experts qui tous tombent d’accord pour affirmer que s’ils avaient été en charge du truc, ça ne se serait pas passé comme ça. Ah, mais non ! Bref, vous avez compris que vous tenez là le traitement de votre sujet, vos trois pages de canard, l’intégrale de votre journée « spéciale attentat ». Vous n’avez plus qu’à attendre les félicitations de votre hiérarchie. Voire de plus haut.

Second cas de figure : le candidat visé et blessé est Démocrate, l’homme du bon camp, le parti des vertueux. Appelons-le Joe B. Même blessure légère, également à l’oreille. (Notez que nous nous plaçons dans l’hypothèse où ce personnage aurait encore la lucidité de s’être rendu compte de ce qui se passait). Ainsi, vous voilà avec la mission journalistique de traiter la tentative d’assassinat sur la personne du candidat démocrate Joe B.

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Sachez tout d’abord qu’il n’y a absolument aucune urgence à ce que vous vous intéressiez dès à présent aux conditions, bonnes ou mauvaises, dans lesquelles sa sécurité était assurée. Vous décrétez que cela relève de l’anecdotique et ne devra venir que plus tard, seulement si besoin est.

Non, en excellent journaliste adepte du politiquement correct, vous aurez à cœur d’ouvrir votre papier, votre émission radio ou TV par une formule du genre : « Certes, c’est ce pauvre bougre Tartempion-Machin qui a tiré, mais c’est bel et bien le populisme trumpiste qui a engagé la balle dans le canon. » D’emblée, vous êtes au top du top. Vous tenez le coupable, le seul vrai coupable, le fauteur de troubles vaguement raciste, le semeur de haine, de discriminations tous azimuts, le propagateur fanatique de la violence, de toutes les violences. Pour étayer le réquisitoire, vous exhumez de ses propos des cinquante ou soixante dernières années le moindre bout de phrase, la plus légère allusion qui, éventuellement, pourrait presque donner à envisager qu’il aurait pu, plus ou moins, de loin ou de près, encourager un tel acte. Vous convoquez évidemment ce qu’il faut de témoins à charge à la barre de votre procès instruit d’avance. Ils sont légion. Et tous sont d’accord pour déclarer qu’ils avaient vu le coup venir depuis longtemps et que si on avait écouté plus tôt leurs mises en garde contre la montée du fascisme, le retour de la peste brune, ce drame épouvantable ne se serait jamais produit. Ah, mais non !

Bref, vous tenez là le papier de votre vie, celui qui vous ouvrira en grand les portes de la carrière. Car vous n’aurez pas omis de glisser quelques mots bien sentis sur ce fascisme encore rampant qui serait, en vérité, une internationale. Suivez mon regard.

Bien entendu, vous n’omettrez pas non plus de conclure votre brûlot par ces mots qui vous vaudront les vivats de la foule des grands soirs Place de la République : « Plus que jamais la preuve est faite ! Le populisme tue! » De la belle ouvrage, vraiment. Allons, ne me remerciez pas.

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«Un p’tit truc en plus»: anatomie d’un succès mérité

Notre chroniqueur a parfois des défaillances dans son système d’exécration universelle : il aime les animaux, le filet de bœuf Wellington et les bons sentiments. Les vrais, pas la guimauve. Il revient pour nous sur le phénoménal succès du film d’Artus, qui a emballé la France entière — sauf Paris. Peut-être pas un hasard, analyse-t-il.


Je n’ai pas de télévision, et j’ignorais complètement qui était Artus. C’est dire que je suis allé voir Un p’tit truc en plus en état de parfaite innocence, perplexe devant le succès phénoménal (près de 10 millions de spectateurs à ce jour) d’un film français qui n’est ni intello, ni franchouillard.

Sur ces millions d’entrées, moins de 10% ont eu lieu à Paris. Les bobos électeurs d’Aymeric Caron, Sophia Chikirou, Sandrine Rousseau et autres grandes consciences n’ont pas eu d’appétence particulière pour un long métrage mettant en scène une bande de handicapés (h aspiré, hé, patates !) dans un décor bucolique et même carrément provincial. Même pas des gosses, de surcroît : des adultes (Ludovic Boul, par exemple, a près de 47 ans), ceux que le système français ignore et laisse à leur famille qui désespère souvent, quand elle ne les abandonne pas tout à fait. Quelques structures privées, souvent hors de prix, quelques associations philanthropiques vivant de bouts de ficelles s’occupent de ces laissés-pour-compte qui défriseraient le paysage du VIe arrondissement. Ou même ceux du XIXe.

On sait que le projet, du coup, a été difficile à financer. Que les couturiers ne se sont pas bousculés pour habiller les acteurs jouant ici leur propre rôle. Que leur montée des marches, à Cannes — un événement largement partagé sur les rézosocios — contrastait violemment avec le star system et les paillettes de rigueur — au point d’avoir eu du mal à trouver des vêtements à la hauteur de l’événement. Comme a dit Artus : « C’est toujours plus élégant pour une marque d’habiller Brad Pitt que d’habiller Artus et encore plus des acteurs en situation de handicap. » Il a fallu que le groupe Kering (le groupe de François Pinault, qui fédère Yves Saint Laurent, Gucci et Balenciaga) sente le coup de pub et habille le casting du film. Bien fait pour les professionnels de la profession.

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Et passons sur le fait que le palais des festivals, à Cannes, n’est pas équipé pour les chaises roulantes, et qu’Artus a dû porter dans ses bras le jeune Sofian Ribes, atteint d’ataxie-télangiectasie, une vraie saloperie. Ce qui a mis en rage la ministre déléguée aux personnes handicapées, Fadila Khattabi, qui a promis : « En 2025, les marches seront accessibles aux personnes en situation de handicap. » Mais d’ici là, elle sera remplacée par une belle conscience parisienne, et on peut s’attendre au pire.

Je ne reviendrai pas sur le film lui-même. Bien loin d’être, comme l’ont immédiatement identifié Libé et Télérama, un « feel good movie », c’est un récit impitoyable avec les Français ordinaires — ceux qui délibérément augmentent les prix de l’hébergement, de façon à dissuader les protagonistes de revenir chez eux l’année prochaine, ou refusent sous des prétextes fumeux de leur louer des canoës. Artus, qui joue et qui a réalisé le film, s’offre même le luxe de dire du bien des flics, capables de complicité affectueuse et de compassion, et de laisser Clovis Cornillac (impeccable !) le temps de participer aux réjouissances finales. Un film qui ne joue ni sur la « diversité », ni sur les bons sentiments artificiels. Les trisomiques y sont bien de chez nous. On y rit avec bonheur — ah, le cours que donne Ludo à Artus sur comment avoir vraiment l’air d’un handicapé, c’est quelque chose ! Et on y clope comme avant la loi Evin.
De surcroît, le réalisateur est un homme. Hétéro, autant que je sache. The horror !

Pourquoi cette détestation parisienne des films encensés par la province ? Un sentiment de supériorité intellectuelle, sans doute. Comme le note Boulevard Voltaire : « D’autres films ont également été boudés par les Parisiens. On peut, notamment, penser au drame Au nom de la terre (2019), réalisé par Édouard Bergeon avec Guillaume Canet, qui raconte les difficultés d’un agriculteur sur son exploitation. Un véritable succès en salles (2 millions d’entrées), mais dont seuls 5% des entrées sont faits à Paris et en région parisienne. De même pour L’École buissonnière (2017) de Nicolas Vannier. Ce film initiatique, avec tout de même François Cluzet ou encore François Berléand, qui raconte le parcours d’un jeune orphelin en Sologne entre chasse et tradition, n’a réalisé que 5% de ses 2 millions d’entrées dans la capitale. On peut également citer les différentes adaptations de Belle et Sébastien, notamment celles réalisées en 2015 et 2022, qui ne réalisent que 6% de leurs entrées en Île-de-France. À croire que les films sur la nature, les paysans ou encore les régions de France n’intéressent pas les Parisiens. »
Qui s’en serait douté ?

Comme quoi la formule de Marx, « le facteur économique est déterminant en dernière instance », n’est pas forcément vrai. Avec les bobos, c’est le facteur idéologique qui prime — d’où leur déconnexion des problèmes réels de la France. Le handicap, connais pas. Les problèmes des agriculteurs, pas davantage. L’impossibilité de rouler en trottinette électrique dans le Larzac, non plus.

Les Parisiens devraient se méfier. Ils pètent dans la soie et l’entre-soi, se gavent de connivence cuculturelles, et se gaussent des ploucs d’outre-périphérique. Ils sont comme les Elois dans La machine à explorer le temps, de Wells : dilettantes nourris par les Morlocks, cette espèce obscure et souterraine qui œuvre dans les profondeurs, ils leur servent aussi de réserve de viande.

Leur seul espoir, c’est d’être absolument indigestes. Qui peut rêver, en toute conscience, de fricasser Caron ou de faire passer Rousseau au barbecue ?

Bac 2024: en chute libre

La cuvée 2024 du bac est aussi navrante que les précédentes. Et les copies des épreuves de français confirment une situation alarmante: les jeunes Français ne maîtrisent pas notre langue. Une ignorance couverte par le ministère de l’Éducation qui pipeaute les moyennes générales. Attention: les exemples qui suivent piquent les yeux!


Toutes les fins de printemps se ressemblent pour les profs : les copies de bac arrivent en même temps que les coquelicots dans les prés… en moins joli. Le cru 2024 n’est pas décevant, et seuls des extraits prélevés sur le lot peuvent convaincre les plus sceptiques du niveau qu’on a atteint. Ce n’est pas la première fois que j’exerce cette pénible recension, mais la répétition a des vertus pédagogiques. (Précisons qu’il s’agit d’élèves de série générale – le haut du panier.)

Conjugaison, grammaire et vocabulaire approximatifs, mais correction bienveillante

Petite cueillette orthographique donc, au hasard des copies : les mots les plus courants ne sont pas maîtrisés, comme « journé », « tonalitée », « dimention », « adolessant », « délesser », « transparêtre », « la plus parts », « l’orsque »… Rimbaud, dont le nom figure en toutes lettres sur le sujet, a aussi passé un sale quart d’heure : « Rimbeau », « Rimbeaud », « Rimbau »… Ce pauvre Arthur, d’ailleurs, « s émancipie » (en tout cas lui, au même âge que nos futurs bacheliers, connaissait la langue française).

L’orthographe grammaticale n’est pas davantage assimilée : « ces sentiments ce sont dévelloper », « ces ordres sont très contestaient », « leur amour est séparer par une barrière qui l’est empêche d’être enssemble ». On est presque surpris quand on a la chance de tomber sur une phrase écrite correctement.

La conjugaison ? « Ophélie se noye » et « nous essayrons » témoignent du naufrage. La syntaxe, pas mieux : « Claire de Duras laisse au lecteur la capacité à celui-ci de réfléchir », « on sent un amour dont il meurt d’envie de partagé avec elle », « c’est un moment de remise en question, sur si elle peut faire partie de son cœur », « Edouard à su nous fair rentré dans son histoire d’amour ainsi que de nous questionner à comment à-t-il réussi à prouver son amour ».

Presque toutes les copies présentent des défaillances linguistiques majeures et, bien évidemment, les inspecteurs chargés des consignes de correction prennent soin de rappeler que seul doit être pénalisé l’usage d’une langue nuisible à la compréhension. Or, tout ce que je viens de citer est compréhensible (si si, je vous assure, avec un peu d’entraînement). D’ailleurs, pour toujours plus de « bienveillance » (je reprends la novlangue officielle, la bienveillance étant devenue la version présentable de la démission), une nouveauté est apparue cette année : une icône signale les copies d’élèves disposant d’aménagements (tiers-temps, assistance humaine, usage d’un ordinateur…) en raison de tel ou tel handicap dûment reconnu par l’institution. Là où certains professeurs se réjouissent, je ne vois que rupture d’égalité : le profil du candidat doit nous rester inconnu et n’orienter en rien notre jugement. Ce qui compte, c’est la qualité intrinsèque du travail, et non celui qui l’a produit. Tout est fait, dans la scolarité comme à l’examen, pour assigner l’élève à un statut de victime : clairement, ce n’est pas lui qui doit se hisser à un niveau d’exigence (à supposer qu’il existe encore), c’est la notation qui doit prendre en compte son profil et s’y adapter.

Ai-je évoqué les lacunes lexicales (« vagabondeur », « codes sociétaires », « vulgarisme »), les erreurs grammaticales (« l’adjectif “loin” », « l’adverbe “moment” »), ou encore l’inculture crasse que révèle la mention de Napoléon II et de la Naissance de Vénus de Bonnifacci – sans doute un boulanger corse ?

Que dire aussi de ces passages lunaires : « Claire de Duras est un romancier du Moyen Age au xixe siècle », « le registre lyrique bat son plein grêt », « le silence exprime l’ouïe », « la duchesse réfléchit, ce qui est un privilège que seule la noblesse détient », « la métaphore “ciel d’azur” désigne un ciel assombri », « le lieu forme l’intérieur du cadre par l’isotopie du château » (je ne me laisse pas impressionner par un mot savant, qu’on se le dise !). Justement, en ce qui concerne le cadre évoqué par Claire de Duras dans son texte, il s’agit d’un château dans une campagne française, jugée « exotique » par certains, quand d’autres y voient des « éléments naturels importants pour l’écosystème ».

Du côté de la dissertation, on trouve de semblables incongruités : « nous pourrions nous demander si le receuil des Fleurs du mal de Baudelaire aussi est-il allé plus loin », « les français sont en pleine guerre contre la Prusse qui sont bien plus supèrieur », « le jeune poète découvre un renouveau d’émotions à tout va dont-il laisse un intérêt léger avec l’amour d’un été ». On invente « des césures à l’hémistiche au début des vers », « un poème écrit en prose mais avec des vers » (M. Jourdain, sors de ce corps !).

Toute la subtilité dialectique se trouve condensée dans cette annonce de plan : « Nous traiterons cela dans une première partie où oui Rimbaud ira loin ensuit non Rimbaud n’ira pas loin et enfin une conclusion. »

7.5 sur 20

J’ai souffert… mais j’ai aussi bien ri. « Rimbaud arretra la poésie et se tournera vers le trafic d’arme ». Après un entretien chez le conseiller d’orientation ? Son œuvre sera publiée après sa mort, « post-parthum ». Et n’oublions pas qu’il fut surnommé « l’homme aux semelles devant » ; Verlaine a dû se marrer dans sa tombe.

Mon lot de copies a obtenu 7,5 de moyenne. L’inspection a fixé un objectif de 10, afin de s’aligner sur les résultats de la session 2023 (je n’admets toujours pas cette logique soviétique, qui consiste à évaluer sans tenir compte de la qualité réelle des copies…). L’examen perd son sens, sa valeur et son crédit. L’élève est méprisé parce qu’on le trompe. Le professeur est humilié parce qu’on s’assoit sur son expertise. Et celui qui ne souscrit pas à cette gigantesque escroquerie est sommé de rentrer dans le rang.

On s’est émerveillé de l’âge de la plus jeune candidate au bac cette année. Je ne préjuge pas des qualités de cette petite fille, mais comment s’étonner qu’on puisse s’y présenter à neuf ans quand on mesure l’effondrement du niveau ? Les copies parlent d’elles-mêmes, et d’ici peu ce devrait être jouable pour un enfant de cinq ans.

Le Nouveau Front populaire et nos taux de mélanine

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Le racisme anti-blanc, ça suffit !


Je suis Martin Luther King : « Je rêve que mes quatre petits enfants vivent un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère ».
Les élections législatives se sont soldées par un mariage malheureux entre les   carpettes de tout poil et le NFP issu d’une improbable hybridation. Depuis cette union malheureuse contractée dans un réflexe pavlovien pour faire barrage à « l’esssstrême-droite », la France divisée comme jamais danse au-dessus du volcan : d’un hymen contre-nature est née l’insoluble tripartition politique du pays entre macronistes, tenants du NFP et partisans du RN. S’il va de soi que les représentants de ces forces politiques briguant le pouvoir se font les coups les plus tordus, c’est toutefois aux sectateurs de LFI, déchirés, que revient la palme du sordide. Sans foi ni loi, mantes religieuses, ils se dévorent entre eux voire   s’auto-attaquent, en bons scorpions. Il s’agit pour dominer et régner de tirer la couverture à soi, au besoin en l’arrachant avec les dents. Aussi on a vu certains affidés séditieux de la joyeuse bande en accuser d’autres de perpétuer le « privilège blanc » pour entretenir un « racisme d’Etat » au détriment des minorités. Les langues bifides s’agitent ; assurément, les serpents sifflent sur nos têtes. Ainsi, Rokhaya Diallo, papesse de l’indigénisme et soutien des suppôts du sieur Mélenchon a souligné la blanchitude des députés du Nouveau Front populaire et Mediapart n’a pas manqué de contribuer utilement au débat. Dans cette séquence, le pathétique, le comique et le tragique fusionnent.

Rokhaya Diallo éteint la lumière

Lundi 8 juillet, donc, sur BFM TV, Rokhaya Diallo, papesse woke et thuriféraire d’un féminisme aussi sélectif que le tri (le féminisme wokisant dont la devise est : « Dis-moi qui te viole et je te dirai si je te défends »), antiraciste patentée – sauf quand il est question des Blancs – a interpellé Manuel Bompard sur la composition ethnique du groupe des députés élus sous la bannière NFP.  Elle s’est déclarée « éblouie » par la « photo de famille » desdits élus posant sur les marches du Palais Bourbon et a précisé : « On ne peut pas dire que les personnes des quartiers populaires soient visibles et pourtant c’est elles qui se mobilisent pour LFI ou pour le NFP. » L’avocat Charles Consigny, présent sur le plateau et recouvrant opportunément un semblant de courage mâtiné d’une louable indignation a dénoncé des propos susceptibles de tomber sous le coup de la justice. Pourtant, loin d’être intimidée par la révolte inattendue de l’avocat, la militante antiraciste l’a raillé. Dans une allusion limpide à la notion woke de « white tears », Rokhaya Diallo a pointé chez Charles Consigny une réaction larmoyante, indue, voire hystérique à des assertions incontestables: « Il est choqué parce que je dis qu’en politique française, les personnes non blanches ne sont pas représentées ! J’ai l’impression que j’ai fait pleurer Charles Consigny ». Mediapart, comme pour faire chorus, a alors publié un graphique déconcertant qui révélait combien chaque parti siégeant à l’Assemblée nationale comptait de « députés issus de la diversité » et de « députés ultramarins racisés ». Voilà l’idée de communauté nationale pulvérisée ; concassées les sacro-saintes « valeurs de la République » dont on n’a de cesse de nous rebattre les oreilles.

Dévoiement

Il s’agit ici, bien sûr, comme ça se pratique aux États-Unis, d’accréditer auprès des décérébrés (en poussant le bouchon très loin et mémère dans les orties) l’idée qu’ils ne seraient représentés justement que par ceux qui appartiennent à leur groupe religieux, ethnique ou sexuel. Mobilisons-nous pour comptabiliser les « minorités » dans chaque assemblée, corps de métier ou représentation !  Que pareille démarche aille à l’encontre d’un idéal républicain français qui valorise l’individu non pas pour ce qu’il est mais pour ce qu’il fait ; on s’en tape ! Cette nouvelle guignolade aussi sinistre que comique aurait dû m’arracher un sourire et me toucher une paupière sans faire bouger l’autre, mon dessein n’étant plus, depuis belle lurette, « de rompre en visière à tout le genre humain. ». Il s’avère pourtant que cette injonction réitérée à la discrimination – dont on se demande bien en quoi elle est positive – représente une vraie menace pour la paix civile française tant elle nourrit chez une partie de la population une défiance croissante vis-à-vis de l’école, de la police, de la justice comme de la représentation nationale. Aussi, je m’indigne contre cette gauche dévoyée qui sera responsable si on la laisse faire – le drame de Crépol l’atteste – d’une poussée de violence dévastatrice chez ceux qui contestent le mode de vie français. Cette gauche infâme qui se contente de séduire des électeurs « issus de la diversité » et des « minorités » sans vouloir ni émanciper ni agréger précipite en effet le face-à-face entre factions prédit par feu Gérard Collomb. Si nous ne nous ne sonnons pas rapidement la fin de partie, au Pays des Lumières redevenu celui du silex, il sera bientôt dangereux d’être mâle de plus de cinquante ans, Blanc, Chrétien ou Juif. Le racisme anti-blanc, ça suffit !
Pour mémoire, dans BIG OTHER, sa préface à l’édition 2011 du Camp des Saints, Jean Raspail écrivait : « (…) s’agite une redoutable phalange issue du camp de notre nation, et néanmoins tout entière engagée au service volontaire de l’Autre : BIG OTHER… Le premier soin de Big Other a été de tordre le cou au « Français de souche », pour déblayer définitivement le terrain. Ce que je ne parviens pas à admettre, et qui me plonge dans un abîme de perplexité furieuse et désolée, c’est pourquoi tant de Français (…) concourent aveuglément, méthodiquement, voire cyniquement, à l’immolation d’un certaine France -évitons le qualificatif d’éternelle qui les révulse – sur l’autel de l’humanisme exacerbé. »  

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Le porno et la tribu

Elon Musk reproche au New York Times d’avancer que des Amazoniens sont devenus accros au porno à cause de son réseau Starlink.


Le 12 juin, sur le réseau social Twitter qu’il a racheté, Elon Musk accuse le New York Times d’avoir tenu des propos « irrespectueux » et « méchants » envers la tribu amazonienne des Marubos (Brésil), qui venait d’être connectée à internet via son réseau de satellites Starlink. Un reportage publié par le quotidien dix jours plus tôt, et intitulé « La dernière frontière d’internet : les tribus qui vivent reculées du monde en Amazonie », a été repris par de nombreux médias et ensuite partagé de manière virale sur la Toile. Mais son contenu a été déformé pour créer un récit nouveau dont le sens est donné par le titre de la version publiée dans le New York Post, rival droitard du Times : « Une tribu isolée d’Amazonie se connecte enfin à internet, mais finit par devenir accro au porno ».

A lire aussi : Meurice me va comme un gland!

Journalistes et internautes ont été captivés par cette idée d’indigènes si naïfs qu’ils restent sans aucune défense devant l’irruption dans leur vie de tentations devenues banales dans le reste du monde. En réalité, si la tribu en question n’a eu un accès constant et haut débit à internet que récemment, grâce au réseau de satellites du milliardaire, dire que cette population découvre le Web du jour au lendemain est une faribole qui relève du mythe du bon sauvage menacé de corruption par la décadence moderne. Clés USB permettant de stocker toutes sortes de contenus ou smartphones permettant d’aller sur WhatsApp, Facebook ou Instagram lorsque l’on se rend près des zones habitées circulent dans ces villages depuis des années. Le Times a dû publier un rectificatif intitulé : « Non, une tribu reculée n’est pas devenue accro au porno », accusant ses concurrents médiatiques d’avoir travesti la vérité1. Reste que certains passages du reportage n’étaient pas aussi nuancés qu’il le prétend. On pouvait par exemple y lire : « La société moderne a traité les problèmes liés à internet pendant des décennies […]. Les Marubos […] sont confrontés au potentiel et aux périls d’internet d’un coup. » Mais Musk cherchait moins à défendre l’honneur de la tribu qu’à condamner une mauvaise publicité faite à son réseau Starlink.


  1. https://www.nytimes.com/2024/06/11/world/americas/no-a-remote-amazon-tribe-did-not-get-addicted-to-porn.html ↩︎

L’audiovisuel public: un petit air italien…

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En Italie, Giorgia Meloni veut une révolution culturelle à la RAI, la télévision publique. Elle a chargé Giampaolo Rossi de la mener, en le nommant à sa tête. Les opposants craignent l’avènement d’une «Télé Meloni», alors qu’à droite on se félicite d’un possible retour du pluralisme sur les écrans. Une situation qui fait évidemment penser à ce que le Rassemblement national envisage de faire en France…


Il paraît que si on faisait voter les journalistes de la RAI, en Italie, aujourd’hui, la gauche gagnerait, et que le résultat ne représenterait pas du tout le pays. Cette réflexion est celle d’un responsable de droite, anonyme, interrogé par Le Monde, qui est arrivé en poste avec le gouvernement Meloni.
« Il y aurait donc une « asymétrie culturelle » à laquelle il importe de remédier grâce à ce fameux « nouveau récit » national. « Il nous faut moins de promotion des LGBT et plus de contenus favorables à la tradition familiale », préconise-t-il. » (« La RAI, télé guidée » par Allan Kaval dans M, le Magazine du Monde).
J’ai extrait ce court passage d’un article globalement défavorable [1] au projet de réforme de la RAI par le gouvernement Meloni.

Les médias publics se vivent comme un « contre-pouvoir »

Le point de vue développé par cette personnalité de droite ne saurait être rejeté avec la volonté de favoriser l’opprobre sur l’expression de toute pensée conservatrice dans les médias publics, en l’occurrence de la RAI. Même si le Rassemblement national n’est pas arrivé au pouvoir après le second tour des élections législatives, il est difficile de contester que la France penche très fortement à droite. Et que l’audiovisuel public a un parfum subtil ou ostentatoire de gauche. Cette donnée est aisément vérifiable au quotidien et peut s’expliquer d’abord par la logique profonde des médias publics qui, à mon sens de manière perverse, assimile le pouvoir à la droite et se vit comme un contre-pouvoir. La gauche est perçue par eux comme l’alliée naturelle du progrès, de la liberté d’expression et de l’impartialité.

À lire aussi, Marine Le Pen (2021): Il faut privatiser l’audiovisuel public

Sur le plan politique, cette dérive peut se trouver relativement limitée, car on a beau vouloir tordre la réalité dans tous les sens, reste que les faits ont leur pesanteur et que l’information, au risque d’être totalement discréditée, se doit d’en rendre compte. En laissant, il est vrai, le champ libre à une interprétation qui, sauf dans de rares publications assumant l’honneur d’être conservatrices, tourne vers des analyses inscrites dans le progressisme de gauche.
Dans le registre sociétal comme on dit, l’audiovisuel public n’est entravé par rien. Il serait scandaleux, voire indécent, de ne pas pourfendre toute « tradition familiale », la normalité majoritaire des conduites hétérosexuelles et de leurs conséquences naturelles, les valeurs et les principes ayant structuré notre société et façonné une civilisation de qualité depuis des siècles. Et, plus globalement, de ne pas tourner en dérision tout ce qui est conservateur et prétend à l’ordre, à la discipline, à l’acceptation des hiérarchies fondées sur le mérite et la compétence, à la diffusion d’un art intelligible et universel, à une humanité respectée parce que respectable et se respectant elle-même.

A lire aussi du même auteur: La gauche est-elle propriétaire de la culture?

Macron-compatible

Je suis persuadé que, si on faisait voter, comme en Italie, les journalistes de l’audiovisuel public, ils ne seraient pas loin de faire preuve d’une révérence de gauche tout en s’indignant du culot que nous aurions à mettre en cause leur honnêteté. Ils ne seraient sans doute pas si éloignés du pouvoir incarné par le président Macron qui n’a eu de cesse, dans beaucoup de secteurs, de promouvoir l’incongru au détriment de ce qu’on pourrait appeler, pour s’en féliciter, l’évidence des attitudes ordinaires, la banalité des bons choix, compris parce que justes. Tout ce qui viendra, dans les prochaines années, constituer l’audiovisuel public comme un formidable outil au service du public et de son pluralisme sera, j’en suis sûr, bienvenu et accepté. Avec un air italien ou non.


[1] https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2024/07/12/giorgia-meloni-a-l-offensive-sur-l-audiovisuel-public-italien_6248877_4500055.html

Que viva España!

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La messe de l’Euro est dite – un Euro un peu passé par pertes et profits, l’attention des médias étant, et c’est totalement logique, absorbée par la situation politique en France.


Un état de fait qui n’a pas été atténué par les performances de l’équipe de France, demi-finaliste certes, mais dont le jeu ressemble plus à un somnifère qui a le mérite, vu l’état de nos finances publiques, de ne rien couter à la Sécurité sociale. Le mauvais côté de l’histoire est que, 40 ans après la victoire de la bande à Platini, on se souvient du beau jeu du carré magique et on est tenté de prendre des antidépresseurs qui, eux, coutent un pognon de dingue pour citer qui vous savez.

Pourtant, du beau jeu, il y en a eu ! Par une équipe en particulier qui, cerise sur le gâteau, a remporté le titre. Beau jeu ne rime plus, et depuis longtemps, avec Bleus, mais, depuis cet euro, avec Rouge. La « Roja » nouvelle formule a en effet fait oublier le « tiki taka » incessant de la période bénie du football espagnol quand, de 2008 à 2012, nos amis transpyrénéens avaient remporté d’affilée et logiquement deux Euros et un mondial avec l’équipe mythique des Xavi, Iniesta, Casillas, Xabi Alonso, Puyol, Piqué, Torres, record invaincu.

A lire aussi, Dominique Labarrière: Ah, le foot!

Et cette Roja, au sein de laquelle jouent deux Français qui pourtant auraient voulu porter le maillot Bleu mais à qui a toujours été opposé une fin de non-recevoir, Aymeric Laporte et Robin Le Normand, pratique un très beau jeu.

Un jeu offensif, chatoyant, avec peu de calcul et de très grands joueurs en devenir. Comment ne pas être ébahi devant un Lamine Yamal, qui a battu Pelé hier comme plus jeune finaliste d’une grande compétition à 17 ans et un jour, meilleur passeur de la compétition et auteur d’un but sublime face à la France ? Williams, Olmo, Ruiz (aussi bon avec l’Espagne que médiocre avec le PSG, comment l’expliquer ?), Cucurella, Olmo jouent en regardant vers l’avant, pas en pensant à surtout ne pas prendre de but.

Une victoire largement méritée avec sept victoires pour sept matches, et après avoir battu les quatre autres champions du monde européens : Italie, Allemagne (chez elle, après avoir été rejointe à la dernière minute, on peut saluer l’exploit), France puis Angleterre.

Alors bravo à l’Espagne, que viva España, et on attend avec impatience les explications des non-sélections de Laporte et Le Normand, mais j’ai bien peur que nous devions attendre longtemps !

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Indonésie: tromperie voilée

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D.R

Le niqab préserve la « pudeur » des femmes, et l’identité des escrocs


Le port du niqab sert-il toujours à protéger la pudeur des femmes ? Comme beaucoup de jeunes Indonésiens de son âge, AK (dans la presse il n’a été identifié que par ses initiales), 26 ans, est un habitué des sites de rencontre. Sur l’un d’eux, il a noué une relation avec une jeune fille de son âge. Les deux tourtereaux ont fini par se rencontrer sous le regard de Cupidon. Portant le niqab, Adinda Kanza s’est présentée à lui comme musulmane pratiquante, ce qui est loin de déranger le jeune amoureux qui considère ce vêtement traditionnel « comme un signe de dévotion à l’islam ».

Après un an d’échanges respectant les règles du prophète Mahomet, le couple a décidé de se marier. La promise, prétendant être sans famille, a opté pour une simple cérémonie organisée chez AK après qu’elle a apporté une dot de cinq grammes d’or. Cependant, une douzaine de jours après leur mariage, AK a commencé à nourrir des soupçons. Son épouse refusant ostensiblement de quitter son niqab à la maison ou d’avoir tout contact sexuel sous divers prétextes fallacieux, il a fini par enquêter et découvrir l’impensable. Les parents de son épouse étaient bien vivants, en bonne santé, et n’étaient pas au courant de ce mariage. Pire encore, AK est tombé des nues lorsque ceux-ci lui ont révélé que celle qu’il avait épousée était en réalité un homme, se travestissant depuis quatre ans. La police a immédiatement placé en détention la fausse jeune femme, en expliquant que cette dernière avait tout planifié pour voler les biens de son époux. Son imposture était facilitée par sa voix aiguë et, surtout une fois maquillé, des traits du visage remarquablement féminins. Inculpé(e) pour fraude, elle/il risque jusqu’à quatre ans de prison.

Le port du niqab, qui n’est pas traditionnel en Indonésie, y connaît une popularité croissante que même la leçon de l’histoire d’AK ne freinera pas.

Euro: l’invincible Espagne, l’affligeante France

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GRIEZMANN et THURAM à la fin de France-Pologne, Dusseldorf, 1 juillet 2024 © ADIL BENAYACHE/SIPA

Le vainqueur de l’Euro 2024 avait l’équipe offrant le jeu le plus séduisant. La France, elle, si elle a réalisé un parcours qui n’est pas honteux durant la compétition, a surtout brillé par… son impuissance à marquer.


L’Espagne, qui a remporté dimanche pour la 4ème fois de son histoire le titre européen – un record dont elle est l’unique détentrice – a confirmé qu’elle était bel et bien « l’invincible sélection » de cet Euro 2004 allemand. Elle s’est imposée magistralement par 2 à 1 à une Angleterre laborieuse qui, convient-il de le reconnaître, a manqué toutefois d’un tout petit peu de réussite dans les dernières minutes. Elle a raté l’égalisation grâce à une tête ibérique qui a coupé miraculeusement, pile-poil sur la ligne de but, la trajectoire du ballon qui allait au fond des filets. La chance n’est pas forcément injuste. Il lui arrive d’accourir à la rescousse à ceux qui la méritent. Ce fut le cas.

C’est qui les plus forts ? Évidemment c’est les Ibères

« La meilleure équipe », a en effet convenu l’entraîneur anglais, Gareth Southgate. « Sa victoire est méritée », a-t-il ajouté.  La presse française, qui déjà avait fait l’éloge dithyrambique des hispaniques lorsqu’ils avaient éliminé les Bleus en demi-finale n’a pas été avare en louanges. Des « intouchables », a proclamé péremptoirement L’Equipe ; une victoire qui ne souffre « aucune contestation », a estimé Le Figaro ; la sélection « la plus complète, la plus belle à voir jouer » a surenchéri Le Parisien ; « la plus séduisante » a reconnu Le Monde ; même son de cloche dans la presse régionale.

On ne peut pas en dire autant des Bleus, les vice-champions du monde. Se faire sortir en demi-finale par l’invincible Espagne n’aurait rien eu de déshonorant et frustrant s’il n’y avait pas un si… À savoir qu’ils étaient arrivés à ce stade du tournoi sans marquer un seul but en plein cours du jeu. Jusqu’à Randal Kolo Muani, sur un centre de Mbappé, n’ouvre le score à la 9ème minute d’un magistral coup de tête et ne mette un terme à cette affligeante stérilité, ils n’avaient à leur actif qu’un penalty et deux buts contre leur camp que leur avaient concédés leurs adversaires… Et en 8ème, ils s’étaient imposés face au Portugal aux tirs au but. En réalité, cette réalisation de Kolo Miani ne fut qu’illusoire. Dès la remise en jeu, l’équipe de France renouait avec sa chronique impuissance à marquer.

A lire aussi, Philippe David: Que viva España!

Dix minutes s’étaient à peine écoulées que le jeune prodige de la Roja, Lamine Yamal, pas encore 17 ans, portait l’estocade. D’un coup de pied magistral des 25 mètres, il envoyait en passant par la lucarne le ballon au fond des filets tricolores. Tous les commentateurs l’ont qualifié de « plus beau but du tournoi ». À peine quatre minutes plus tard, c’était « el descabello », le coup de grâce… le ballon se retrouvait au fond des mêmes filets français…

La réussite de la Roja n’est pas seulement imputable aux prouesses de ses deux prodiges, Lamine Yamal (17 ans le jour de la finale, donc), d’origine marocaine, et Nico Williams (22 ans), lui d’origine ghanéenne, et paradoxe respectivement joueurs, au FC Barcelone et à l’Athletic Bilbao, clubs fanions de deux provinces, la Catalogne et le Pays basque, qui revendiquent leur indépendance, ni à la pertinence de son sélectionneur, Luis de la Fuente, qui jusqu’à maintenant n’avait entraîné que les sélections de moins de 20 ans.

Le jeu des Espagnols, qui implique une grande cohésion entre joueurs, repose sur de courtes et usantes passes, sur une possession jalouse du ballon. Ce jeu n’est pas sans une similitude certaine avec l’art tauromachique qui consiste à prendre l’ascendant sur le taureau par des séries d’arabesques que le matador dessine avec sa cape. Et quand l’animal ne sait plus très bien où il en est, on lui porte l’estocade. Résultat, la Roja a gagné tous ses matchs.

Face à elle « tout est allé trop vite pour une équipe de France dont le socle défensif a craqué », avait estimé Le Monde. Car, selon Le Figaro, l’Espagne était « plus créative, plus brillante, plus culottée, plus talentueuse. »

La star Mbappé passe à côté de la compétition, Olivier Giroud… aussi

Qu’est-ce qui peut expliquer que la France a été l’ombre de ce qu’elle fut au Mondial au Qatar face à l’Argentine ? Seul Le Figaro a osé briser une omerta en posant une question que l’ensemble de la presse a éludée : que s’est-il passé avec Olivier Giroud ? Jusqu’à la demi-finale, la moyenne de temps de jeu de ce dernier n’avait été que de neuf minutes par rencontre… Alors, pourquoi Deschamps l’a sélectionné si c’était pour ne pas le faire jouer ?

A lire aussi, Franck Crudo: Politique: pourquoi nos footballeurs tricolores font bien de la boucler

 « En voulant axer toutes ses forces sur Mbappé, jamais au niveau durant l’Euro (…), Deschamps s’est raté », a insisté Le Figaro, sous la plume de ses deux chroniqueurs, Baptiste Desprez et Christophe Remise. Dans leur article de jeudi, intitulé « Tout ce qui a (vraiment) manqué aux Bleus dans l’Euro », ils enfoncent le clou. « Autre élément en sa défaveur, la mise au ban d’Olivier Giroud. Au regard des performances très faibles de Marcus Thuram et inégales de Randal Kolo Muani, l’expérience et l’efficacité dans la surface du meilleur buteur de l’histoire de la sélection auraient mérité plus de considération ». On peut ajouter qu’il aurait été plus approprié et judicieux que Thuram et Mbappé se préoccupent davantage de mettre le ballon dans la cage adverse que de chercher à infléchir le choix du bulletin que les électeurs envisageaient de glisser dans l’urne, en somme de jouer au foot et non les consciences.  « Ce déclassement », comme l’a qualifié Le Figaro, la mise à l’écart du meilleur buteur de l’équipe de France (57 buts en 136 matchs), soulève en conséquence une autre question : celui-ci aurait-il un mobile extra-sportif ? Une explication s’impose !

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De l’intérêt de lire Edith Wharton cet été

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La romancière Edith Wharton. DR.

La romancière de la haute-société new-yorkaise (1862-1937) nous laisse trois chefs-d’œuvre à découvrir : Chez les heureux du monde, Le temps de l’innocence et Ethan Frome.


Edith Wharton connaît une nouvelle jeunesse. Posées sur les étals des librairies, ses Chroniques de New York, rééditées récemment par Gallimard (coll. Quarto), en imposent aux côtés des livres contemporains… et leurs 200 pages, préface comprise. Le roman le plus connu de l’auteur, Le temps de l’innocence, publié en 1920, est quant à lui au programme des Classes Préparatoires aux Grandes Écoles scientifiques pour l’année 2024-2025. Il existe, en réalité, bien des raisons de découvrir le travail de la première femme à avoir remporté le très convoité prix Pulitzer.


Lire un grand auteur, c’est toujours se plonger dans un monde, c’est-à-dire la combinaison d’un espace géographique, d’une époque, d’un milieu social et familial : l’univers d’Edith Wharton n’a rien des bas-fonds londoniens de Jack London, ni du Berry champêtre de George Sand ; il n’a rien non plus du New York psychotique de Bret Easton Ellis, énigmatique de Paul Auster ou débauché de Salinger ; non, le New York de Wharton est celui de la haute société du début de XXe siècle dont aucun grain de sable ne semble pouvoir venir enrayer la mécanique lampedusienne du « changement pour que rien ne change ».

Apparences

C’est donc au cœur de ce monde trop ordonné qu’apparaissent des personnages déstabilisateurs – disruptifs, dirait-on aujourd’hui -, de façon furtive comme pour finalement mieux asseoir toutes les pesanteurs : c’est le cas de Lily Bart dans le roman Chez les heureux du monde et d’Ellen Olenska dans Le temps de l’innocence, interprétée par Michelle Pfeiffer dans la magistrale adaptation cinématographique de Martin Scorsese au début des années 90. À la fin, les apparences sont sauvées, à peine le vernis a-t-il craquelé ; rien, si ce n’est dans les cœurs, ne s’en est trouvé durablement bouleversé ; et les nouveaux riches sont toujours aussi fortunés. La romancière elle-même navigua dans ce milieu, femme d’affaires redoutable et conservatrice qui ne manqua pas néanmoins de divorcer d’un mari peu au fait des choses de l’amour, encore moins de la fidélité.

A lire aussi, Patrick Mandon: Drieu la Rochelle, une ombre encombrante

Lire Edith Wharton, en été de surcroît, c’est profiter du plaisir de la lecture, quand on est épuisé par les émissions littéraires, leurs commentateurs et leurs invités dont les péroraisons, si elles valent mieux que celles des plateaux sportifs, n’en demeurent pas moins souvent soporifiques à force d’être mielleuses et moralisatrices, ou quand on se lasse des poncifs associés aux livres – la « petite musique » de l’un, le « pastoralisme » de l’autre – et des débats répétitifs – « faut-il séparer l’œuvre de son auteur ? »

Enterrée en France

Ernst Jünger se demandait à juste titre si l’on finirait par distinguer, à la fin de son siècle – le XXe -, deux classes d’hommes, les uns formés par la télévision, les autres par la lecture. On pourrait ajouter qu’avec le nouveau millénaire, une troisième catégorie d’hommes a fait son apparition : ceux qui sont biberonnés aux réseaux sociaux. À l’époque d’Edith Wharton, ceux-ci n’existaient pas. Dès lors, tout est dans l’écriture, c’est-à-dire dans le style et donc la description des personnages, des lieux, des émotions, dans les dits et non-dits, dans le vocabulaire, autant d’élégances qu’oublie pléthore d’écrivains actuels.

Le monde d’Edith Wharton ne se limite pas aux gazons d’émeraude bordés de géraniums et de coléus, ni aux loges rouges et or de l’opéra de New York où se presse la haute société. Et s’il fallait finir de se convaincre de lire l’écrivain, soulignons donc son rapport à un autre univers : la France. Elle fut introduite dans les cercles littéraires français par Paul Bourget, auteur d’Un crime d’amour, et se lia à d’autres écrivains de son temps, dont Anna de Noailles et André Gide. Elle commença à rédiger Ethan Frome dans la langue de Molière. Signe qui ne trompe pas, celle qui logea une décennie durant rue de Varenne repose aujourd’hui à Versailles.

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La Maison de liesse – Les Beaux Mariages – L’Âge de l’innocence – Vieux New YorkDossiers : «De l’écrit à l’écran» (filmographie) – «New York, de sa fondation à la fin de l’Âge doré». Vie & Œuvre illustré.

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Trump: petit cours de journalisme politiquement correct

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Donald Trump visé par un tireur à Butler, Pennsylvanie, 13 juillet 2024 © Gene J. Puskar/AP/SIPA

Breaking news. Tentative d’assassinat, pendant la campagne électorale américaine. Mince… ce n’est pas le candidat espéré par les journalistes qui était visé.


Vous êtes journaliste ou aspirez à le devenir. Désireux de faire une belle carrière, vous êtes bien conscient de devoir vous aligner le plus servilement possible sur le politiquement correct. Afin d’illustrer ce propos, je me permets de vous proposer ce qui suit.

Imaginons que, lors de la campagne électorale des présidentielles aux États-Unis, l’un des deux candidats se trouve blessé par balle au cours d’un meeting en plein air. Blessure assez légère fort heureusement, cependant la volonté de donner la mort ne fait aucun doute et la qualification de tentative d’assassinat s’impose à tous, adversaires politiques comme partisans.

Deux cas de figure vous sont dès lors proposés.

Premier cas : le candidat visé et blessé est Républicain, donc classé, ou plutôt – politiquement correct oblige – relégué à droite. Appelons-le Donald T.

Devant ce fait d’actualité, ce que à quoi vous devez vous attacher est très clair : focaliser votre article, vos interviews, vos plateaux TV sur le seul sujet des règles de sécurité, de protection et leur mise en œuvre dans cette circonstance. Rien d’autre que la sécurité, cela est essentiel. Y avait-il assez d’agents secrets et non-secrets ? Sont-ils bien formés, après tout ? La position du tireur d’élite couché est-elle la bonne? Le fusil d’assaut sur un trépied est-elle la configuration prévue par le manuel ? Pourquoi l’exfiltration du blessé a-t-elle pris trois minutes et quarante-huit secondes alors qu’elle aurait dû s’effectuer en trois minutes et quarante-cinq secondes ? Pourquoi est-ce la portière arrière de ce côté qu’on a ouverte, et pas l’autre ? Enfin, vous voyez, vous croulez sur les points exploitables. Vous vous en remettez évidemment à l’avis d’experts-spécialistes et de spécialistes-experts qui tous tombent d’accord pour affirmer que s’ils avaient été en charge du truc, ça ne se serait pas passé comme ça. Ah, mais non ! Bref, vous avez compris que vous tenez là le traitement de votre sujet, vos trois pages de canard, l’intégrale de votre journée « spéciale attentat ». Vous n’avez plus qu’à attendre les félicitations de votre hiérarchie. Voire de plus haut.

Second cas de figure : le candidat visé et blessé est Démocrate, l’homme du bon camp, le parti des vertueux. Appelons-le Joe B. Même blessure légère, également à l’oreille. (Notez que nous nous plaçons dans l’hypothèse où ce personnage aurait encore la lucidité de s’être rendu compte de ce qui se passait). Ainsi, vous voilà avec la mission journalistique de traiter la tentative d’assassinat sur la personne du candidat démocrate Joe B.

À lire aussi, Gerald Olivier: Quel « VP » pour Donald Trump?

Sachez tout d’abord qu’il n’y a absolument aucune urgence à ce que vous vous intéressiez dès à présent aux conditions, bonnes ou mauvaises, dans lesquelles sa sécurité était assurée. Vous décrétez que cela relève de l’anecdotique et ne devra venir que plus tard, seulement si besoin est.

Non, en excellent journaliste adepte du politiquement correct, vous aurez à cœur d’ouvrir votre papier, votre émission radio ou TV par une formule du genre : « Certes, c’est ce pauvre bougre Tartempion-Machin qui a tiré, mais c’est bel et bien le populisme trumpiste qui a engagé la balle dans le canon. » D’emblée, vous êtes au top du top. Vous tenez le coupable, le seul vrai coupable, le fauteur de troubles vaguement raciste, le semeur de haine, de discriminations tous azimuts, le propagateur fanatique de la violence, de toutes les violences. Pour étayer le réquisitoire, vous exhumez de ses propos des cinquante ou soixante dernières années le moindre bout de phrase, la plus légère allusion qui, éventuellement, pourrait presque donner à envisager qu’il aurait pu, plus ou moins, de loin ou de près, encourager un tel acte. Vous convoquez évidemment ce qu’il faut de témoins à charge à la barre de votre procès instruit d’avance. Ils sont légion. Et tous sont d’accord pour déclarer qu’ils avaient vu le coup venir depuis longtemps et que si on avait écouté plus tôt leurs mises en garde contre la montée du fascisme, le retour de la peste brune, ce drame épouvantable ne se serait jamais produit. Ah, mais non !

Bref, vous tenez là le papier de votre vie, celui qui vous ouvrira en grand les portes de la carrière. Car vous n’aurez pas omis de glisser quelques mots bien sentis sur ce fascisme encore rampant qui serait, en vérité, une internationale. Suivez mon regard.

Bien entendu, vous n’omettrez pas non plus de conclure votre brûlot par ces mots qui vous vaudront les vivats de la foule des grands soirs Place de la République : « Plus que jamais la preuve est faite ! Le populisme tue! » De la belle ouvrage, vraiment. Allons, ne me remerciez pas.

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«Un p’tit truc en plus»: anatomie d’un succès mérité

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© David Koskas

Notre chroniqueur a parfois des défaillances dans son système d’exécration universelle : il aime les animaux, le filet de bœuf Wellington et les bons sentiments. Les vrais, pas la guimauve. Il revient pour nous sur le phénoménal succès du film d’Artus, qui a emballé la France entière — sauf Paris. Peut-être pas un hasard, analyse-t-il.


Je n’ai pas de télévision, et j’ignorais complètement qui était Artus. C’est dire que je suis allé voir Un p’tit truc en plus en état de parfaite innocence, perplexe devant le succès phénoménal (près de 10 millions de spectateurs à ce jour) d’un film français qui n’est ni intello, ni franchouillard.

Sur ces millions d’entrées, moins de 10% ont eu lieu à Paris. Les bobos électeurs d’Aymeric Caron, Sophia Chikirou, Sandrine Rousseau et autres grandes consciences n’ont pas eu d’appétence particulière pour un long métrage mettant en scène une bande de handicapés (h aspiré, hé, patates !) dans un décor bucolique et même carrément provincial. Même pas des gosses, de surcroît : des adultes (Ludovic Boul, par exemple, a près de 47 ans), ceux que le système français ignore et laisse à leur famille qui désespère souvent, quand elle ne les abandonne pas tout à fait. Quelques structures privées, souvent hors de prix, quelques associations philanthropiques vivant de bouts de ficelles s’occupent de ces laissés-pour-compte qui défriseraient le paysage du VIe arrondissement. Ou même ceux du XIXe.

On sait que le projet, du coup, a été difficile à financer. Que les couturiers ne se sont pas bousculés pour habiller les acteurs jouant ici leur propre rôle. Que leur montée des marches, à Cannes — un événement largement partagé sur les rézosocios — contrastait violemment avec le star system et les paillettes de rigueur — au point d’avoir eu du mal à trouver des vêtements à la hauteur de l’événement. Comme a dit Artus : « C’est toujours plus élégant pour une marque d’habiller Brad Pitt que d’habiller Artus et encore plus des acteurs en situation de handicap. » Il a fallu que le groupe Kering (le groupe de François Pinault, qui fédère Yves Saint Laurent, Gucci et Balenciaga) sente le coup de pub et habille le casting du film. Bien fait pour les professionnels de la profession.

A lire aussi: La palme du grotesque

Et passons sur le fait que le palais des festivals, à Cannes, n’est pas équipé pour les chaises roulantes, et qu’Artus a dû porter dans ses bras le jeune Sofian Ribes, atteint d’ataxie-télangiectasie, une vraie saloperie. Ce qui a mis en rage la ministre déléguée aux personnes handicapées, Fadila Khattabi, qui a promis : « En 2025, les marches seront accessibles aux personnes en situation de handicap. » Mais d’ici là, elle sera remplacée par une belle conscience parisienne, et on peut s’attendre au pire.

Je ne reviendrai pas sur le film lui-même. Bien loin d’être, comme l’ont immédiatement identifié Libé et Télérama, un « feel good movie », c’est un récit impitoyable avec les Français ordinaires — ceux qui délibérément augmentent les prix de l’hébergement, de façon à dissuader les protagonistes de revenir chez eux l’année prochaine, ou refusent sous des prétextes fumeux de leur louer des canoës. Artus, qui joue et qui a réalisé le film, s’offre même le luxe de dire du bien des flics, capables de complicité affectueuse et de compassion, et de laisser Clovis Cornillac (impeccable !) le temps de participer aux réjouissances finales. Un film qui ne joue ni sur la « diversité », ni sur les bons sentiments artificiels. Les trisomiques y sont bien de chez nous. On y rit avec bonheur — ah, le cours que donne Ludo à Artus sur comment avoir vraiment l’air d’un handicapé, c’est quelque chose ! Et on y clope comme avant la loi Evin.
De surcroît, le réalisateur est un homme. Hétéro, autant que je sache. The horror !

Pourquoi cette détestation parisienne des films encensés par la province ? Un sentiment de supériorité intellectuelle, sans doute. Comme le note Boulevard Voltaire : « D’autres films ont également été boudés par les Parisiens. On peut, notamment, penser au drame Au nom de la terre (2019), réalisé par Édouard Bergeon avec Guillaume Canet, qui raconte les difficultés d’un agriculteur sur son exploitation. Un véritable succès en salles (2 millions d’entrées), mais dont seuls 5% des entrées sont faits à Paris et en région parisienne. De même pour L’École buissonnière (2017) de Nicolas Vannier. Ce film initiatique, avec tout de même François Cluzet ou encore François Berléand, qui raconte le parcours d’un jeune orphelin en Sologne entre chasse et tradition, n’a réalisé que 5% de ses 2 millions d’entrées dans la capitale. On peut également citer les différentes adaptations de Belle et Sébastien, notamment celles réalisées en 2015 et 2022, qui ne réalisent que 6% de leurs entrées en Île-de-France. À croire que les films sur la nature, les paysans ou encore les régions de France n’intéressent pas les Parisiens. »
Qui s’en serait douté ?

Comme quoi la formule de Marx, « le facteur économique est déterminant en dernière instance », n’est pas forcément vrai. Avec les bobos, c’est le facteur idéologique qui prime — d’où leur déconnexion des problèmes réels de la France. Le handicap, connais pas. Les problèmes des agriculteurs, pas davantage. L’impossibilité de rouler en trottinette électrique dans le Larzac, non plus.

Les Parisiens devraient se méfier. Ils pètent dans la soie et l’entre-soi, se gavent de connivence cuculturelles, et se gaussent des ploucs d’outre-périphérique. Ils sont comme les Elois dans La machine à explorer le temps, de Wells : dilettantes nourris par les Morlocks, cette espèce obscure et souterraine qui œuvre dans les profondeurs, ils leur servent aussi de réserve de viande.

Leur seul espoir, c’est d’être absolument indigestes. Qui peut rêver, en toute conscience, de fricasser Caron ou de faire passer Rousseau au barbecue ?

Bac 2024: en chute libre

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Publication des résultats du baccalauréat 2023 au lycée Masséna à Nice : un taux de réussite de 98 % après les épreuves principales, contre 84,9 % au niveau national, avant les épreuves de rattrapage © SYSPEO/SIPA

La cuvée 2024 du bac est aussi navrante que les précédentes. Et les copies des épreuves de français confirment une situation alarmante: les jeunes Français ne maîtrisent pas notre langue. Une ignorance couverte par le ministère de l’Éducation qui pipeaute les moyennes générales. Attention: les exemples qui suivent piquent les yeux!


Toutes les fins de printemps se ressemblent pour les profs : les copies de bac arrivent en même temps que les coquelicots dans les prés… en moins joli. Le cru 2024 n’est pas décevant, et seuls des extraits prélevés sur le lot peuvent convaincre les plus sceptiques du niveau qu’on a atteint. Ce n’est pas la première fois que j’exerce cette pénible recension, mais la répétition a des vertus pédagogiques. (Précisons qu’il s’agit d’élèves de série générale – le haut du panier.)

Conjugaison, grammaire et vocabulaire approximatifs, mais correction bienveillante

Petite cueillette orthographique donc, au hasard des copies : les mots les plus courants ne sont pas maîtrisés, comme « journé », « tonalitée », « dimention », « adolessant », « délesser », « transparêtre », « la plus parts », « l’orsque »… Rimbaud, dont le nom figure en toutes lettres sur le sujet, a aussi passé un sale quart d’heure : « Rimbeau », « Rimbeaud », « Rimbau »… Ce pauvre Arthur, d’ailleurs, « s émancipie » (en tout cas lui, au même âge que nos futurs bacheliers, connaissait la langue française).

L’orthographe grammaticale n’est pas davantage assimilée : « ces sentiments ce sont dévelloper », « ces ordres sont très contestaient », « leur amour est séparer par une barrière qui l’est empêche d’être enssemble ». On est presque surpris quand on a la chance de tomber sur une phrase écrite correctement.

La conjugaison ? « Ophélie se noye » et « nous essayrons » témoignent du naufrage. La syntaxe, pas mieux : « Claire de Duras laisse au lecteur la capacité à celui-ci de réfléchir », « on sent un amour dont il meurt d’envie de partagé avec elle », « c’est un moment de remise en question, sur si elle peut faire partie de son cœur », « Edouard à su nous fair rentré dans son histoire d’amour ainsi que de nous questionner à comment à-t-il réussi à prouver son amour ».

Presque toutes les copies présentent des défaillances linguistiques majeures et, bien évidemment, les inspecteurs chargés des consignes de correction prennent soin de rappeler que seul doit être pénalisé l’usage d’une langue nuisible à la compréhension. Or, tout ce que je viens de citer est compréhensible (si si, je vous assure, avec un peu d’entraînement). D’ailleurs, pour toujours plus de « bienveillance » (je reprends la novlangue officielle, la bienveillance étant devenue la version présentable de la démission), une nouveauté est apparue cette année : une icône signale les copies d’élèves disposant d’aménagements (tiers-temps, assistance humaine, usage d’un ordinateur…) en raison de tel ou tel handicap dûment reconnu par l’institution. Là où certains professeurs se réjouissent, je ne vois que rupture d’égalité : le profil du candidat doit nous rester inconnu et n’orienter en rien notre jugement. Ce qui compte, c’est la qualité intrinsèque du travail, et non celui qui l’a produit. Tout est fait, dans la scolarité comme à l’examen, pour assigner l’élève à un statut de victime : clairement, ce n’est pas lui qui doit se hisser à un niveau d’exigence (à supposer qu’il existe encore), c’est la notation qui doit prendre en compte son profil et s’y adapter.

Ai-je évoqué les lacunes lexicales (« vagabondeur », « codes sociétaires », « vulgarisme »), les erreurs grammaticales (« l’adjectif “loin” », « l’adverbe “moment” »), ou encore l’inculture crasse que révèle la mention de Napoléon II et de la Naissance de Vénus de Bonnifacci – sans doute un boulanger corse ?

Que dire aussi de ces passages lunaires : « Claire de Duras est un romancier du Moyen Age au xixe siècle », « le registre lyrique bat son plein grêt », « le silence exprime l’ouïe », « la duchesse réfléchit, ce qui est un privilège que seule la noblesse détient », « la métaphore “ciel d’azur” désigne un ciel assombri », « le lieu forme l’intérieur du cadre par l’isotopie du château » (je ne me laisse pas impressionner par un mot savant, qu’on se le dise !). Justement, en ce qui concerne le cadre évoqué par Claire de Duras dans son texte, il s’agit d’un château dans une campagne française, jugée « exotique » par certains, quand d’autres y voient des « éléments naturels importants pour l’écosystème ».

Du côté de la dissertation, on trouve de semblables incongruités : « nous pourrions nous demander si le receuil des Fleurs du mal de Baudelaire aussi est-il allé plus loin », « les français sont en pleine guerre contre la Prusse qui sont bien plus supèrieur », « le jeune poète découvre un renouveau d’émotions à tout va dont-il laisse un intérêt léger avec l’amour d’un été ». On invente « des césures à l’hémistiche au début des vers », « un poème écrit en prose mais avec des vers » (M. Jourdain, sors de ce corps !).

Toute la subtilité dialectique se trouve condensée dans cette annonce de plan : « Nous traiterons cela dans une première partie où oui Rimbaud ira loin ensuit non Rimbaud n’ira pas loin et enfin une conclusion. »

7.5 sur 20

J’ai souffert… mais j’ai aussi bien ri. « Rimbaud arretra la poésie et se tournera vers le trafic d’arme ». Après un entretien chez le conseiller d’orientation ? Son œuvre sera publiée après sa mort, « post-parthum ». Et n’oublions pas qu’il fut surnommé « l’homme aux semelles devant » ; Verlaine a dû se marrer dans sa tombe.

Mon lot de copies a obtenu 7,5 de moyenne. L’inspection a fixé un objectif de 10, afin de s’aligner sur les résultats de la session 2023 (je n’admets toujours pas cette logique soviétique, qui consiste à évaluer sans tenir compte de la qualité réelle des copies…). L’examen perd son sens, sa valeur et son crédit. L’élève est méprisé parce qu’on le trompe. Le professeur est humilié parce qu’on s’assoit sur son expertise. Et celui qui ne souscrit pas à cette gigantesque escroquerie est sommé de rentrer dans le rang.

On s’est émerveillé de l’âge de la plus jeune candidate au bac cette année. Je ne préjuge pas des qualités de cette petite fille, mais comment s’étonner qu’on puisse s’y présenter à neuf ans quand on mesure l’effondrement du niveau ? Les copies parlent d’elles-mêmes, et d’ici peu ce devrait être jouable pour un enfant de cinq ans.

Le Nouveau Front populaire et nos taux de mélanine

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La journaliste Rokhaya Diallo © Hannah Assouline

Le racisme anti-blanc, ça suffit !


Je suis Martin Luther King : « Je rêve que mes quatre petits enfants vivent un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère ».
Les élections législatives se sont soldées par un mariage malheureux entre les   carpettes de tout poil et le NFP issu d’une improbable hybridation. Depuis cette union malheureuse contractée dans un réflexe pavlovien pour faire barrage à « l’esssstrême-droite », la France divisée comme jamais danse au-dessus du volcan : d’un hymen contre-nature est née l’insoluble tripartition politique du pays entre macronistes, tenants du NFP et partisans du RN. S’il va de soi que les représentants de ces forces politiques briguant le pouvoir se font les coups les plus tordus, c’est toutefois aux sectateurs de LFI, déchirés, que revient la palme du sordide. Sans foi ni loi, mantes religieuses, ils se dévorent entre eux voire   s’auto-attaquent, en bons scorpions. Il s’agit pour dominer et régner de tirer la couverture à soi, au besoin en l’arrachant avec les dents. Aussi on a vu certains affidés séditieux de la joyeuse bande en accuser d’autres de perpétuer le « privilège blanc » pour entretenir un « racisme d’Etat » au détriment des minorités. Les langues bifides s’agitent ; assurément, les serpents sifflent sur nos têtes. Ainsi, Rokhaya Diallo, papesse de l’indigénisme et soutien des suppôts du sieur Mélenchon a souligné la blanchitude des députés du Nouveau Front populaire et Mediapart n’a pas manqué de contribuer utilement au débat. Dans cette séquence, le pathétique, le comique et le tragique fusionnent.

Rokhaya Diallo éteint la lumière

Lundi 8 juillet, donc, sur BFM TV, Rokhaya Diallo, papesse woke et thuriféraire d’un féminisme aussi sélectif que le tri (le féminisme wokisant dont la devise est : « Dis-moi qui te viole et je te dirai si je te défends »), antiraciste patentée – sauf quand il est question des Blancs – a interpellé Manuel Bompard sur la composition ethnique du groupe des députés élus sous la bannière NFP.  Elle s’est déclarée « éblouie » par la « photo de famille » desdits élus posant sur les marches du Palais Bourbon et a précisé : « On ne peut pas dire que les personnes des quartiers populaires soient visibles et pourtant c’est elles qui se mobilisent pour LFI ou pour le NFP. » L’avocat Charles Consigny, présent sur le plateau et recouvrant opportunément un semblant de courage mâtiné d’une louable indignation a dénoncé des propos susceptibles de tomber sous le coup de la justice. Pourtant, loin d’être intimidée par la révolte inattendue de l’avocat, la militante antiraciste l’a raillé. Dans une allusion limpide à la notion woke de « white tears », Rokhaya Diallo a pointé chez Charles Consigny une réaction larmoyante, indue, voire hystérique à des assertions incontestables: « Il est choqué parce que je dis qu’en politique française, les personnes non blanches ne sont pas représentées ! J’ai l’impression que j’ai fait pleurer Charles Consigny ». Mediapart, comme pour faire chorus, a alors publié un graphique déconcertant qui révélait combien chaque parti siégeant à l’Assemblée nationale comptait de « députés issus de la diversité » et de « députés ultramarins racisés ». Voilà l’idée de communauté nationale pulvérisée ; concassées les sacro-saintes « valeurs de la République » dont on n’a de cesse de nous rebattre les oreilles.

Dévoiement

Il s’agit ici, bien sûr, comme ça se pratique aux États-Unis, d’accréditer auprès des décérébrés (en poussant le bouchon très loin et mémère dans les orties) l’idée qu’ils ne seraient représentés justement que par ceux qui appartiennent à leur groupe religieux, ethnique ou sexuel. Mobilisons-nous pour comptabiliser les « minorités » dans chaque assemblée, corps de métier ou représentation !  Que pareille démarche aille à l’encontre d’un idéal républicain français qui valorise l’individu non pas pour ce qu’il est mais pour ce qu’il fait ; on s’en tape ! Cette nouvelle guignolade aussi sinistre que comique aurait dû m’arracher un sourire et me toucher une paupière sans faire bouger l’autre, mon dessein n’étant plus, depuis belle lurette, « de rompre en visière à tout le genre humain. ». Il s’avère pourtant que cette injonction réitérée à la discrimination – dont on se demande bien en quoi elle est positive – représente une vraie menace pour la paix civile française tant elle nourrit chez une partie de la population une défiance croissante vis-à-vis de l’école, de la police, de la justice comme de la représentation nationale. Aussi, je m’indigne contre cette gauche dévoyée qui sera responsable si on la laisse faire – le drame de Crépol l’atteste – d’une poussée de violence dévastatrice chez ceux qui contestent le mode de vie français. Cette gauche infâme qui se contente de séduire des électeurs « issus de la diversité » et des « minorités » sans vouloir ni émanciper ni agréger précipite en effet le face-à-face entre factions prédit par feu Gérard Collomb. Si nous ne nous ne sonnons pas rapidement la fin de partie, au Pays des Lumières redevenu celui du silex, il sera bientôt dangereux d’être mâle de plus de cinquante ans, Blanc, Chrétien ou Juif. Le racisme anti-blanc, ça suffit !
Pour mémoire, dans BIG OTHER, sa préface à l’édition 2011 du Camp des Saints, Jean Raspail écrivait : « (…) s’agite une redoutable phalange issue du camp de notre nation, et néanmoins tout entière engagée au service volontaire de l’Autre : BIG OTHER… Le premier soin de Big Other a été de tordre le cou au « Français de souche », pour déblayer définitivement le terrain. Ce que je ne parviens pas à admettre, et qui me plonge dans un abîme de perplexité furieuse et désolée, c’est pourquoi tant de Français (…) concourent aveuglément, méthodiquement, voire cyniquement, à l’immolation d’un certaine France -évitons le qualificatif d’éternelle qui les révulse – sur l’autel de l’humanisme exacerbé. »  

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Le porno et la tribu

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D.R

Elon Musk reproche au New York Times d’avancer que des Amazoniens sont devenus accros au porno à cause de son réseau Starlink.


Le 12 juin, sur le réseau social Twitter qu’il a racheté, Elon Musk accuse le New York Times d’avoir tenu des propos « irrespectueux » et « méchants » envers la tribu amazonienne des Marubos (Brésil), qui venait d’être connectée à internet via son réseau de satellites Starlink. Un reportage publié par le quotidien dix jours plus tôt, et intitulé « La dernière frontière d’internet : les tribus qui vivent reculées du monde en Amazonie », a été repris par de nombreux médias et ensuite partagé de manière virale sur la Toile. Mais son contenu a été déformé pour créer un récit nouveau dont le sens est donné par le titre de la version publiée dans le New York Post, rival droitard du Times : « Une tribu isolée d’Amazonie se connecte enfin à internet, mais finit par devenir accro au porno ».

A lire aussi : Meurice me va comme un gland!

Journalistes et internautes ont été captivés par cette idée d’indigènes si naïfs qu’ils restent sans aucune défense devant l’irruption dans leur vie de tentations devenues banales dans le reste du monde. En réalité, si la tribu en question n’a eu un accès constant et haut débit à internet que récemment, grâce au réseau de satellites du milliardaire, dire que cette population découvre le Web du jour au lendemain est une faribole qui relève du mythe du bon sauvage menacé de corruption par la décadence moderne. Clés USB permettant de stocker toutes sortes de contenus ou smartphones permettant d’aller sur WhatsApp, Facebook ou Instagram lorsque l’on se rend près des zones habitées circulent dans ces villages depuis des années. Le Times a dû publier un rectificatif intitulé : « Non, une tribu reculée n’est pas devenue accro au porno », accusant ses concurrents médiatiques d’avoir travesti la vérité1. Reste que certains passages du reportage n’étaient pas aussi nuancés qu’il le prétend. On pouvait par exemple y lire : « La société moderne a traité les problèmes liés à internet pendant des décennies […]. Les Marubos […] sont confrontés au potentiel et aux périls d’internet d’un coup. » Mais Musk cherchait moins à défendre l’honneur de la tribu qu’à condamner une mauvaise publicité faite à son réseau Starlink.


  1. https://www.nytimes.com/2024/06/11/world/americas/no-a-remote-amazon-tribe-did-not-get-addicted-to-porn.html ↩︎

L’audiovisuel public: un petit air italien…

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DR.

En Italie, Giorgia Meloni veut une révolution culturelle à la RAI, la télévision publique. Elle a chargé Giampaolo Rossi de la mener, en le nommant à sa tête. Les opposants craignent l’avènement d’une «Télé Meloni», alors qu’à droite on se félicite d’un possible retour du pluralisme sur les écrans. Une situation qui fait évidemment penser à ce que le Rassemblement national envisage de faire en France…


Il paraît que si on faisait voter les journalistes de la RAI, en Italie, aujourd’hui, la gauche gagnerait, et que le résultat ne représenterait pas du tout le pays. Cette réflexion est celle d’un responsable de droite, anonyme, interrogé par Le Monde, qui est arrivé en poste avec le gouvernement Meloni.
« Il y aurait donc une « asymétrie culturelle » à laquelle il importe de remédier grâce à ce fameux « nouveau récit » national. « Il nous faut moins de promotion des LGBT et plus de contenus favorables à la tradition familiale », préconise-t-il. » (« La RAI, télé guidée » par Allan Kaval dans M, le Magazine du Monde).
J’ai extrait ce court passage d’un article globalement défavorable [1] au projet de réforme de la RAI par le gouvernement Meloni.

Les médias publics se vivent comme un « contre-pouvoir »

Le point de vue développé par cette personnalité de droite ne saurait être rejeté avec la volonté de favoriser l’opprobre sur l’expression de toute pensée conservatrice dans les médias publics, en l’occurrence de la RAI. Même si le Rassemblement national n’est pas arrivé au pouvoir après le second tour des élections législatives, il est difficile de contester que la France penche très fortement à droite. Et que l’audiovisuel public a un parfum subtil ou ostentatoire de gauche. Cette donnée est aisément vérifiable au quotidien et peut s’expliquer d’abord par la logique profonde des médias publics qui, à mon sens de manière perverse, assimile le pouvoir à la droite et se vit comme un contre-pouvoir. La gauche est perçue par eux comme l’alliée naturelle du progrès, de la liberté d’expression et de l’impartialité.

À lire aussi, Marine Le Pen (2021): Il faut privatiser l’audiovisuel public

Sur le plan politique, cette dérive peut se trouver relativement limitée, car on a beau vouloir tordre la réalité dans tous les sens, reste que les faits ont leur pesanteur et que l’information, au risque d’être totalement discréditée, se doit d’en rendre compte. En laissant, il est vrai, le champ libre à une interprétation qui, sauf dans de rares publications assumant l’honneur d’être conservatrices, tourne vers des analyses inscrites dans le progressisme de gauche.
Dans le registre sociétal comme on dit, l’audiovisuel public n’est entravé par rien. Il serait scandaleux, voire indécent, de ne pas pourfendre toute « tradition familiale », la normalité majoritaire des conduites hétérosexuelles et de leurs conséquences naturelles, les valeurs et les principes ayant structuré notre société et façonné une civilisation de qualité depuis des siècles. Et, plus globalement, de ne pas tourner en dérision tout ce qui est conservateur et prétend à l’ordre, à la discipline, à l’acceptation des hiérarchies fondées sur le mérite et la compétence, à la diffusion d’un art intelligible et universel, à une humanité respectée parce que respectable et se respectant elle-même.

A lire aussi du même auteur: La gauche est-elle propriétaire de la culture?

Macron-compatible

Je suis persuadé que, si on faisait voter, comme en Italie, les journalistes de l’audiovisuel public, ils ne seraient pas loin de faire preuve d’une révérence de gauche tout en s’indignant du culot que nous aurions à mettre en cause leur honnêteté. Ils ne seraient sans doute pas si éloignés du pouvoir incarné par le président Macron qui n’a eu de cesse, dans beaucoup de secteurs, de promouvoir l’incongru au détriment de ce qu’on pourrait appeler, pour s’en féliciter, l’évidence des attitudes ordinaires, la banalité des bons choix, compris parce que justes. Tout ce qui viendra, dans les prochaines années, constituer l’audiovisuel public comme un formidable outil au service du public et de son pluralisme sera, j’en suis sûr, bienvenu et accepté. Avec un air italien ou non.


[1] https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2024/07/12/giorgia-meloni-a-l-offensive-sur-l-audiovisuel-public-italien_6248877_4500055.html

Que viva España!

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Lamine Yamal (numéro 19) et Dani Olmo (10), lors du match Espagne / Angleterre, finale de l'Euro, Berlin, 14 juillet 2024 © Craig Mercer/Shutterstock/SIPA

La messe de l’Euro est dite – un Euro un peu passé par pertes et profits, l’attention des médias étant, et c’est totalement logique, absorbée par la situation politique en France.


Un état de fait qui n’a pas été atténué par les performances de l’équipe de France, demi-finaliste certes, mais dont le jeu ressemble plus à un somnifère qui a le mérite, vu l’état de nos finances publiques, de ne rien couter à la Sécurité sociale. Le mauvais côté de l’histoire est que, 40 ans après la victoire de la bande à Platini, on se souvient du beau jeu du carré magique et on est tenté de prendre des antidépresseurs qui, eux, coutent un pognon de dingue pour citer qui vous savez.

Pourtant, du beau jeu, il y en a eu ! Par une équipe en particulier qui, cerise sur le gâteau, a remporté le titre. Beau jeu ne rime plus, et depuis longtemps, avec Bleus, mais, depuis cet euro, avec Rouge. La « Roja » nouvelle formule a en effet fait oublier le « tiki taka » incessant de la période bénie du football espagnol quand, de 2008 à 2012, nos amis transpyrénéens avaient remporté d’affilée et logiquement deux Euros et un mondial avec l’équipe mythique des Xavi, Iniesta, Casillas, Xabi Alonso, Puyol, Piqué, Torres, record invaincu.

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Et cette Roja, au sein de laquelle jouent deux Français qui pourtant auraient voulu porter le maillot Bleu mais à qui a toujours été opposé une fin de non-recevoir, Aymeric Laporte et Robin Le Normand, pratique un très beau jeu.

Un jeu offensif, chatoyant, avec peu de calcul et de très grands joueurs en devenir. Comment ne pas être ébahi devant un Lamine Yamal, qui a battu Pelé hier comme plus jeune finaliste d’une grande compétition à 17 ans et un jour, meilleur passeur de la compétition et auteur d’un but sublime face à la France ? Williams, Olmo, Ruiz (aussi bon avec l’Espagne que médiocre avec le PSG, comment l’expliquer ?), Cucurella, Olmo jouent en regardant vers l’avant, pas en pensant à surtout ne pas prendre de but.

Une victoire largement méritée avec sept victoires pour sept matches, et après avoir battu les quatre autres champions du monde européens : Italie, Allemagne (chez elle, après avoir été rejointe à la dernière minute, on peut saluer l’exploit), France puis Angleterre.

Alors bravo à l’Espagne, que viva España, et on attend avec impatience les explications des non-sélections de Laporte et Le Normand, mais j’ai bien peur que nous devions attendre longtemps !

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