Chère Martine Aubry,
Nombreux sont les hommes politiques français, même de gauche, qui veulent revenir sur « vos » 35 h et augmenter la durée légale hebdomadaire de travail. Ils ont raison, mais force est de constater qu’aucun ou presque n’explique pourquoi il faut le faire !
Au mieux affirment-ils que cela redonnerait de la compétitivité aux entreprises, ce qui n’est ni de nature à convaincre les Français, ni tout à fait vrai.
La multiplication des RTT a ruiné les salariés
Pas convaincant car ces derniers, le plus souvent, ne comprennent pas que le bien de l’entreprise, c’est aussi le leur. Et en partie faux, car si l’on revient à 39 h, elles seront probablement payées entre 37 h et 39 h, ce qui aura donc peu d’incidence sur la baisse du coût de l’heure de travail. Enfin les entreprises, qui se sont adaptées à la durée légale actuelle, réclament plutôt maintenant une baisse des charges.
Non, pour accepter de revenir sur cet acquis qu’ils pensent social, les Français ont besoin d’une nouvelle approche. Il faut leur dire la vérité, leur démontrer qu’ils ont été les principales victimes du « piège » des 35 h et qu’ils seraient donc les premiers bénéficiaires d’une réforme, avant les « patrons » !
Car en effet, après les classes populaires frappées par le chômage et qui se sont précarisées, ce sont les classes moyennes et aisées, qui font ou défont l’économie d’un pays, qui se paupérisent et entraînent dans leur chute la croissance, condamnant ainsi les chômeurs à le rester.
Simplement parce que pour ces dernières, l’application des 35 h s’est malheureusement le plus souvent traduite, non pas par 4 heures de travail hebdomadaire en moins, mais par des « jours de RTT » en plus, leur donnant environ 8 semaines de congés payés par an au lieu de 5 !
Une erreur fatale qui a « ruiné » les salariés et la France, car voici les réactions en chaîne, logiques et donc prévisibles, que cela a entraîné :
La première dont découlent toutes les autres, c’est que le passage de 39 h à 35 h avec maintien du salaire 39 h a bien sûr engendré le quasi gel des augmentations salariales.
C’est donc avec un pouvoir d’achat qui n’a pas évolué que les Français ont dû financer ces nouveaux jours de congés et surtout les très nombreux voyages qui s’y rapportent (multiplication des séjours courts).
Mais, comme ils n’y renoncent pas pour autant (nous sommes tous témoins ou acteurs de ces incessantes migrations) et compte tenu du coût d’une journée de temps libre en famille, c’est leur train de vie quotidien qui s’est effondré au profit des RTT, les condamnant ainsi à vivre « en mode low cost » !
Les Français doivent re-travailler un peu plus pour vivre mieux
Par conséquent, la consommation et donc la croissance ne progressent plus, voire régressent, générant chaque jour plus de licenciements et moins de revalorisation salariale.
Quant à ces classes moyennes et aisées, ce temps libre qui devait faire leur bonheur ne leur amène que frustrations. Dans leur travail où elles sont « pressées » pour conserver la même productivité qu’avant, mais avec des jours travaillés en moins (stress), et dans leur vie quotidienne où elles ne peuvent plus s’offrir que le nécessaire, voire l’indispensable.
De ce fait, elles ont parfois l’impression que « s’évader » est tout ce qui leur reste, alors qu’à chaque fois au contraire elles s’appauvrissent un peu plus et la France avec. Un véritable cercle vicieux !
Alors oui, les Français doivent re-travailler un peu plus pour vivre mieux, car ils gagneront plus, mais surtout dépenseront beaucoup moins en congés fréquents.
Et ils comprendront vite, car cela aura un effet sensible et immédiat sur leur pouvoir d’achat, que ce sera au profit d’un train de vie quotidien retrouvé.
Revenir sur la durée légale du travail est donc non seulement une urgence, mais un devoir pour nous tous, celui de participer au redressement économique de notre pays, en relançant la consommation et la croissance pour atteindre le plein emploi (taux de chômage inférieur ou égal à 5%).
Voilà chère Martine Aubry. J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop de vous avoir écrit, avec un recul qui me paraît aujourd’hui suffisant, tout le mal que je pense de « vos » 35 h. Et si vous n’êtes pas coupable, vous êtes au moins un peu responsable de ce qui nous arrive, car en tuant à petit feu l’économie française et l’emploi, vous nous avez un peu tués aussi !
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