Pour rembourser la dette publique, le 11-novembre doit-il cesser d’être férié ? C’est ce que propose le LR Jean-François Copé, et c’est ce qui fait débat…
Ce qui ne fait pas débat, c’est qu’il faut trouver des économies et/ou produire plus de richesses. Et que la France est l’un des pays qui travaille le moins en Europe. Si on veut revenir sur les 35 heures ou retarder l’âge de la retraite, c’est tout de suite l’émeute ; en revanche travailler un jour de plus dans l’année (ou avoir un jour de vacances en moins) ne semble pas idiot, c’est plus indolore.
Deux pistes sont donc à l’étude :
- La suppression d’un jour férié, ce qui représenterait une aide directe à la production (pour le même coût salarial, un jour de travail de plus équivaut à environ + 0,3% de production) ;
- La transformation en journée de solidarité d’un jour férié, c’est-à-dire une journée travaillée et non payée, c’est-à-dire payée à l’Etat, ce qui revient à un impôt de plus pour les seuls salariés (on ne va évidemment pas faire travailler les chômeurs un jour de plus…).
Dans les deux cas, reste à savoir quel jour sacrifier. Les catholiques ont déjà sacrifié le lundi de Pentecôte (dont peu connaissent la signification). Idée sortie du chapeau de Jean-François Copé, hier : supprimer le 11-novembre. « On n’a pas besoin d’un jour férié pour commémorer le 11-Novembre, ou alors ça voudrait dire qu’on a 65 millions de Français au pied des monuments aux morts, ça se saurait », avance-t-il. Pardon pour le maire de Meaux, mais il s’agit d’un argument un peu inepte. Car dans ce cas, il ne reste plus qu’à supprimer aussi le 25 décembre, puisque peu de gens vont à la messe. D’ailleurs, le Premier ministre Michel Barnier a opposé une fin de non-recevoir à M. Copé.
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Philippe Guibert, ancien secrétaire général du Service d’Information du Gouvernement, a lancé hier une idée assez pragmatique : le 15 août. La plupart des gens sont en vacances, et la messe mariale ne semble pas incompatible avec le travail.
Mais pourquoi pas le 11-novembre, alors ? Précisément pour les raisons invoquées pour le supprimer. On nous dit que le 11-novembre, c’est loin, et que le monde a bien changé. Un jour sûrement, pour nos descendants, la Grande Guerre sera ce qu’est pour nous désormais la guerre de trente ans : une guerre abstraite, lointaine… Mais nous vivons encore dans le monde que 14-18 nous a légué. La France ne s’est jamais complètement remise de cette saignée, nous disent les historiens et les démographes. Autre raison invoquée : tous les poilus sont morts. Mais c’est précisément parce qu’il n’y a plus de témoins vivants qu’il faut le commémorer et avec ferveur. Pendant la Première Guerre mondiale, 900 jeunes Français sont morts chaque jour. Novembre 18 est une victoire sans joie. Cette guerre est inscrite dans tous les villages et toutes les familles de France. Or, s’il n’y a plus de survivants pour parler dans les écoles ou à la télévision, ces morts n’ont plus que nous. Les oublier serait les trahir. Et nous trahir.
Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio
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